Libye – L’Occident doit empêcher un massacre

 Le soir BE. lundi 14 mars 2011, BAUDOUIN LOOS

Le risque s’amplifie de jour en jour de voir des massacres terrifiants accompagner la reconquête des villes un temps aux mains des rebelles. Commentaire de Baudouin Loos  Vidéo

Dans l’affaire libyenne, un gros malaise prend forme : compte tenu de la nature même du régime Kadhafi, le risque s’amplifie de jour en jour de voir des massacres terrifiants accompagner la reconquête des villes un temps aux mains des rebelles. Si les insurgés du côté de Benghazi, dans cet Est libyen frondeur qui n’a jamais vraiment accepté le joug de Kadhafi, venaient à céder devant l’armée loyale au régime, une très prévisible boucherie se produirait sous le regard d’un monde, une fois de plus, impuissant à prévenir l’irréparable.

Comment s’empêcher de prendre le parti des rebelles contre le régime de Mouammar Kadhafi ? Sans doute ce dernier dispose-t-il d’une certaine base populaire. Sa tribu ne l’a pas lâché. Les bénéficiaires de son clientélisme non plus. Ceux-ci auraient d’ailleurs beaucoup à perdre si les rebelles finissaient par vaincre. Ce qui nourrit leur férocité. Sans parler des mercenaires, payés pour occire…

Mais ce régime, par ailleurs honni, comme l’attestent les scènes de liesse dans les villes libérées, est indéfendable. De Washington à Bruxelles, son départ est réclamé. Mais le « serial killer » libyen n’en a cure. Le plus crispant, c’est que les moyens militaires d’un seul Etat européen moyen ne feraient qu’une bouchée de l’armée libyenne…

Mais les Etats-Unis se refusent à avancer. Les aventures militaires en terres arabo-musulmanes ont souvent tourné au cauchemar. Liban, Somalie, Afghanistan, Irak : Washington sait ce qu’échec ou enlisement veulent dire.

Les Européens ? Ils n’agiront, disent-ils, qu’avec un mandat des Nations unies, lequel ne pourrait ne jamais arriver, compte tenu des réticences russes et chinoises. Certains d’entre eux eurent moins de scrupules de droit international, en d’autres temps, contre la Serbie ou l’Irak. Au moins la Ligue arabe vient-elle de donner son feu vert à l’établissement d’une zone d’interdiction aérienne. Encore faut-il la mettre en œuvre sans délai…

Pourra-t-on encore longtemps s’en laver les mains ? Le Français Nicolas Sarkozy a voulu, seul, jouer aux justiciers. Même si on peut exprimer des doutes sur la clarté de toutes ses motivations, il n’en a pas moins eu le mérite de claironner l’urgence des choses. Son cavalier seul n’a aucun sens, mais l’Occident a bien un devoir moral d’empêcher un carnage.