Nouveau MUR ? – En Roumanie, un mur érigé dans un quartier rom divise les habitants

« Pourquoi ce mur? Que veut-on cacher, la pauvreté? », s’indigne Alexandru Banta, un habitant rom de Baia Mare (nord de la Roumanie), au pied d’un mur érigé par la municipalité près de deux barres de logement social habitées par des Roms.
 Deux ouvriers finissent de construire un mur devant des immeubles de logement social habités par des Roms, le 21 juillet 2011 à Baia Mare
Depuis quelques semaines, ce mur de 1,8 mètre de haut et 100 mètres de long, qui sera inauguré lundi, provoque un vif débat. Les ONG dénoncent une « discrimination » contre les Roms, tandis que les autorités assurent qu’il est destiné à « protéger » des voitures les enfants qui jouent tout près de la route voisine.
 Dans ce petit quartier de logement social, les deux bâtiments les plus proches de la route sont peuplés principalement de familles roms.
Après une vingtaine d’accidents en 12 mois, selon le maire, les autorités de cette ancienne ville minière de 146.000 habitants ont décidé de construire un mur de béton, isolant les bâtiments de la route. « Nous avons considéré que ce projet de délimitation de la zone d’habitation de celle de circulation routière est bénéfique pour faire baisser le nombre d’accidents », indique le maire Catalin Chereches à l’AFP.
Mais des associations de défense des droits de l’Homme l’ont jugé « profondément discriminatoire et humiliant ». « L’argument de la protection n’est qu’un prétexte, cette solution est disproportionnée », estime Marian Mandache de l’ONG Romani CRISS, qui aurait préféré l’installation de ralentisseurs. « L’argent aurait pu être mieux utilisé en aménageant une aire de jeux pour les enfants », souligne-t-il, regrettant l’absence de programmes d’éducation et d’emploi pour les Roms dans ce quartier.
A travers le pays, seuls 27% des Roms ont un emploi stable, selon une étude publiée fin 2010, et la moitié d’entre eux ne disposent d’aucune qualification.
La minorité rom de Roumanie compte officiellement 535.000 membres, mais selon les ONG ils seraient en fait quelque 2 millions dans ce pays de 22 millions d’habitants.
De loin, le bâtiment délabré où habitent M. Banta, sa femme et cinq de leurs enfants semble abandonné. L’eau courante a été coupée car les habitants ne payaient pas les factures et tous les résidents doivent aujourd’hui s’approvisionner au robinet situé dans la cour.
Dès que des dizaines d’enfants sortent jouer dans la cour, boueuse et parsemée d’immondices, le quartier s’anime. Les enfants jouent avec la boue, qu’ils modèlent.
« Nous sommes envahis par les rats, mais ils nous construisent un mur! », lance d’une fenêtre une femme, un nouveau-né dans ses bras. « J’ai cinq enfants. Je n’ai pas d’argent pour les envoyer à l’école. Qu’est-ce que je peux leur donner à manger? Du béton? », peste dans l’escalier sombre Rodica, une mère sans emploi.
Les locataires hésitent à donner leurs noms, craignant d’être chassés de l’immeuble.
Pour M. Banta, c’est une véritable « prison » que la mairie a fait construire. « Comme des condamnés enfermés derrière des barreaux et des murs, les enfants ne voient pas ce qu’il y a au-delà du mur », déplore-t-il. « On peut faire une clôture, mais pas un mur en béton ». Un autre habitant, Alin Ghiulai, se félicite de cette construction, une opinion qui tranche avec celle de ses voisins.
« Moi je surveille mes petits, mais beaucoup laissaient leurs enfants jouer dans la rue », dit-il.
« Nous remercions Monsieur le maire, car personne avant lui n’avait pensé à faire quelque chose pour ce quartier. Tous ont été uniquement intéressés par les campagnes électorales », ajoute-t-il, alors qu’une élection législative partielle est prévue à Baia Mare dans quelques semaines.
« Nous allons décorer le mur, nous voulons créer une zone de civilisation », affirme le maire, assurant que la mairie disposerait bientôt de fonds pour rénover le HLM délabré, comme elle l’a déjà fait pour d’autres.
De l’autre côté du mur, un couple habitant une maison coquette lui serre la main. « Nous vous remercions. Personne n’avait pensé à nous avant », dit la femme souriante.Une opinion partagée par d’autres habitants de la ville.
« Le maire a fait une très bonne chose. Je me sens plus en sécurité quand je passe par là maintenant. Il y avait trop d’enfants qui jouaient dans la rue. Et on ne voit plus la misère », dit Gabriel, un chauffeur de taxi.
TV5MONDE  BAIA MARE (Roumanie) (AFP) – 31.07.2011 © 2011 AFP

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