Indignation après l’évacuation de Roms dans des rames de la RATP. Son PDG, M. Mongin, a rejeté la responsabilité de l’opération sur les forces de l’ordre !

L’évacuation d’un camp de migrants d’origine roumaine et bulgare, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), le 31 août, en les faisant monter dans un tramway de la RATP, suscite une vive polémique depuis la révélation de l’affaire, jeudi 1er septembre, par Médecins du monde (MDM). Un certain nombre de voix se sont élevées pour dénoncer un scénario, selon elles, similaire à celui de la déportation des juifs durant l’Occupation.
Selon le récit fait par Livia Otal, chargée de mission Roms à MDM en Ile-de-France, le camp évacué sur une décision de justice, le 31 août au matin, se situait juste en face d’une ligne de tramway. Mais, lors de cette opération de police, les quelque 150 migrants qui occupaient illégalement le campement auraient été  » obligés «  de monter dans une rame qui était à l’arrêt à la station voisine.
Difficulté : c’était alors une heure d’affluence et les Roms avaient avec eux tous leurs effets personnels (caddies, bicyclettes, bagages…)  » Afin de gêner le moins possible les voyageurs et de minimiser le retard « , selon la RATP, le  » régulateur local  » du tramway aurait du coup décidé, sans alerter sa direction, de faire monter les migrants dans une autre rame qui suivait, vide celle-là, et se rendait au dépôt.  » Une décision prise dans l’urgence « , plaide la RATP.
D’après les témoignages recueillis par MDM auprès des Roms évacués, ces derniers auraient été accompagnés par «  groupes de dix, sous escorte de deux CRS «  jusqu’au terminus : Noisy-le-Sec. Là, une autre compagnie de CRS les attendait et les aurait de nouveau  » forcés «  à monter dans des RER en leur demandant de ne  » plus revenir « .  » Beaucoup ne savaient pas où ils étaient, ils sont montés puis redescendus dès qu’ils ont pu pour prendre un train dans l’autre sens « , rapporte Mme Otal.
La révélation de l’affaire a suscité nombre de réactions, jeudi, en particulier de la RATP.  » Le tramway n’est pas fait pour ça « , a critiqué son PDG, Pierre Mongin. Il a dénoncé une  » opération manifestement mal conduite «  et rejeté la responsabilité sur les forces de police. La CGT de la RATP a aussi pointé  » une méthode scandaleuse «  et regretté que les agents soient les  » supplétifs de ces basses besognes « .
La préfecture de Seine-Saint-Denis, elle, a assuré n’avoir  » jamais réquisitionné de tramway ; ni elle ni la police « . Au ministère de l’intérieur, on assure par ailleurs que les migrants ont  » toujours été libres de leurs mouvements « , que ce soit à Saint-Denis ou en gare de Noisy-le-Sec. Les policiers dépêchés l’ont été seulement  » pour canaliser l’afflux important de gens « , défend-on.
Le conseil régional d’Ile-de-France, présidé par Jean-Paul Huchon (PS), a dit avoir saisi le préfet  » pour que toute la lumière soit faite sur cette opération (…) et que les responsables soient sanctionnés « . D’après M. Huchon, la réquisition du tramway, qui dépend des transports publics d’Ile-de-France, s’est faite  » hors de tout cadre juridique « .
 » Heures sombres « 
Cette scène  » m’a rappelé des souvenirs d’école et de cinéma « , a déploré le conseiller général Gilles Garnier (PCF), dans une lettre adressée au préfet et au PDG de la RATP. C’est une  » opération – qui – rappelle les heures les plus sombres de notre histoire « , a déclaré Cécile Duflot, patronne d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV). Des propos jugés  » choquants «  par la Place Beauvau.
L’incident révélé par MDM vient une nouvelle fois mettre en lumière l’impasse juridique dans laquelle se trouvent les Roms en France. En tant que citoyens européens, ils ont le droit de circuler librement, à condition de justifier, au-delà de trois mois, d’un minimum de ressources. Mais du fait de l’absence de visa, les autorités ont souvent du mal à évaluer la durée réelle de leur séjour et se contentent de les évacuer des terrains qu’ils occupent illégalement.
Si un certain nombre d’entre eux sont expulsés chaque année vers la Roumanie et la Bulgarie – ils représentent près d’un tiers des expulsions -, beaucoup reviennent. Ils vivotent alors souvent de petits trafics et de mendicité.  » Nous connaissons certaines familles depuis plusieurs années « , raconte Mme Otal. Depuis leur évacuation, mercredi, la plupart des Roms sont ainsi déjà  » revenus «  en Seine-Saint-Denis, selon elle. Jeudi soir, ils avaient trouvé un nouveau terrain où s’établir, à Aubervilliers, quand une nouvelle opération de police est venue les déloger.
Elise Vincent © Le Monde samedi 3 septembre 2011
dessin sur Le Post

 

A propos kozett

Deux phénomènes peuvent amener à une manipulation dans la prise en compte des informations par notre conscience : --> Le mirage qui voile et cache la vérité derrière les brumes de la sensiblerie et de la réaction émotionnelle. --> L’illusion qui est une interprétation limitée de la vérité cachée par le brouillard des pensées imposées. Celles-ci apparaissent alors comme plus réelles que la vérité qu’elles voilent, et conditionnent la manière dont est abordé la réalité … A notre époque médiatisée à outrance, notre vigilance est particulièrement requise !
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