Le Yéti – 23 septembre 2011
Karachi, valises françafricaines, plaidoirie du Parquet pour une relaxe générale dans l’affaire des emplois fictifs de la Mairie de Paris, feuilleton Woerth/Bettencourt… Balayée par les révélations en série de toutes ces “affaires”, la présomption d’innocence cède le pas à une solide et tenace présomption de culpabilité.
Privilège des nantis et des puissants — le Rom, le voleur de bicyclette ou le sans-papier n’en bénéficient guère — la présomption d’innocence n’apparaît plus que comme un ultime rempart des filous pour gagner cahin-caha le rivage des prescriptions commodes et des non-lieux douteux.
Œil poché, pif amoché et proche du chaos, l’idée démocratique, elle, chancelle sous les coups bas. Tous pourris, et si c’était vrai ?
Tous pourris, et si c’était vrai ?
On ne peut comprendre cette longue descente aux enfers de nos illusions, emportées elles aussi dans le maelström de la Grande perdition, si l’on ne se pose pas la question des mécanismes qui président aux comportements humains.
Le chirurgien et neurobiologiste Henri Laborit posait que le cortex cérébral des humains, cette Raison dont nous sommes si fiers, ne nous servait pas à domestiquer nos pulsions inconscientes. Mais, avec l’aide de ce langage qui nous distingue paraît-il des animaux, à les justifier coûte que coûte.
L’idée démocratique, pour ceux qui s’en revendiquent haut et fort, ne devient plus qu’un alibi où manifestement tous les coups sont permis pour conquérir pouvoirs et richesses. A droite comme à gauche. Car si la Françafrique de droite eut son Jacques Foccart, celle de la gauche mitterrandienne s’accommoda fort bien de son Guy Penne.
Ajoutons à ces combines mafieuses, la perversion plus insidieuse qui consiste à légaliser carrément les exactions. Le problème actuel de la dette publique provient, non d’une augmentation des dépenses de l’État, mais d’une diminution volontaire de ses recettes à grands coups de paquet fiscal et de niches juteuses pour quelques-uns. Là encore, droite et gauche institutionnelles s’entendirent comme larrons en foire.
La Grande perdition marque la fin d’un cycle
Heureusement, les comportements humains fonctionnent par cycles qui vont se renouvelant au fil de l’histoire. Henri Laborit distinguait quatre sortes de comportements. Passons sur les deux premiers (les comportements de consommation et de gratification qui présidèrent peu ou prou à nos Trente glorieuses), et arrêtons-nous sur les deux derniers, typiques de cette période de Grande perdition.
Quand il est pris la main dans le sac, quand il et mis devant ses méfaits accomplis, le petit humain adopte le comportement de la punition. Il y fait face, soit en fuyant (on passe à autre chose, on détourne l’attention sur un bouc émissaire), soit en essayant de détruire le sujet de l’agression. Rappelez-vous le président Sarkozy face au « journaliste-pédophile » qui l’interrogeait sur l’affaire Karachi !
L’inhibition, dernier stade avant la guerre ou la révolution
L’ultime comportement du cycle d’Henri Laborit est le comportement de l’inhibition.
« On ne bouge plus. On attend en tension. Et on débouche sur l’angoisse. L’angoisse, c’est l’impossibilité de dominer une situation. »