Vous avez demandé l’hôpital ? Ne quittez pas …

Charlie Hebdo – 14 novembre 2011 – Patrick Pelloux
Mardi  8 novembre 2011, 17 heures. Une partie des hôpitaux de Paris ne répond plus ! Ils n’ont plus de téléphone. C’est une énorme panne de l’opérateur SFR qui a plongé dans le silence une partie de ses abonnés. Jamais une telle panne n’a touché les hôpitaux et, surtout, aucun système de sécurité n’a été mis en place. Avez-vous entendu parler de cela ? Seules quelques brèves dans de rares médias, mais pas de « une », ni d’analyse. Est-ce en rapport avec l’énorme pub de campagne SFR actuellement dans tous les médias ? Toujours est-il que, sans téléphone, le bordel a été total et immédiat.
Les hôpitaux sont un des grands systèmes où la moindre panne logistique a un « effet papillon » : panne électrique, panne d’eau, panne d’oxygène, panne d’approvisionnement de médicaments, panne de téléphone. Concrètement, plus personne ne pouvait téléphoner. Véhicules du SAMU immobilisés en attente de destination, appels des médecins dans els hôpitaux impossible, tout est en attente et tout devient inquiétant. Sans oublier les gens qui n’arrivent plus à joindre les hôpitaux.
10% de malheurs
Mais comment les hôpitaux publics en sont-ils arrivés là ? Depuis dix ans, ils sont soumis à des économies incroyables, comme s’ils étaient la Grèce de chez nous. Coincés entre les emprunts toxiques, la mise en place d’une tarification à l’activité suicidaire, des regroupements et la flambée du coût de la téléphonie. Comme tout a été livré à la concurrence, les hôpitaux, préférant l’économie à la sécurité, ont cru bon de changer d’opérateurs. Pourtant, il n’y avait jamais eu de coupure téléphonique généralisée du temps de France Télécom.
Le plus cocasse, c’est que le changement d’opérateur s’est fait quelques jours avant la panne. C’est le central SFR de Courbevoie qui aurait subi une panne, mais personne n’en sait plus que les messages convenus de la direction des hôpitaux se félicitant du retour progressif à la normale en quelques heures.
Si un chirurgien au cours d’une opération arrête tout, c’est sa carrière qui va s’éteindre, si un urgentiste arrête une réanimation, la plainte est directe… Une direction des hôpitaux change d’opérateur téléphonique, tout tombe en panne et …rien ! Le téléphone peut ne plus sonner, tout le monde s’en fiche. Les opérateurs téléphoniques misent sans doute sur le sempiternel 10% de pertes… S’équiper d’un système de sécurité coûte très cher, sans doute plus que les simples conséquences d’une panne. Mais les hôpitaux, eux, n’ont pas le droit à l’erreur et surtout pas à ces 10% de pertes.
Au final, les hôpitaux vivent une crise qui va s’aggraver, car les économies sur des systèmes susceptibles de tomber en panne remettent profondément en cause la sécurité des malades. Alors ? Il va falloir commencer à apprendre à travailler à l’hôpital sans eau, ni électricité : bienvenue au Moyen Âge !

A propos werdna01

Hors des paradigmes anciens et obsolètes, libérer la parole à propos de la domination et de l’avidité dans les domaines de la politique, de la religion, de l’économie, de l’éducation et de la guérison, étant donné que tout cela est devenu commercial. Notre idée est que ces domaines manquent de générosité et de collaboration.
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