Naufrage Costa Concordia : télescopage médiatique pour le commandant de l’Elysée qui doit remonter le paquebot France après la perte du A

Nouvel Obs  le 22-01-2012 par Serge Raffy
Sarkozy et le syndrome du Titanic
L’actualité est souvent cruelle. Et aussi injuste. Au moment où Nicolas Sarkozy a le plus besoin d’images fortes pour sauver sa fin de règne, un événement terrible vient frapper sa communication de plein fouet : le naufrage du Costa Concordia. Un remake du Titanic version méditerranéenne. Avec son cortège de drames et de douleurs.
Epouvantable télescopage des images du paquebot échoué comme une grosse baleine en fin de vie et celles du capitaine Courage de l’Elysée, tentant de jouer les sauveteurs en chef d’un pays au bord du gouffre. Le choc est violent et pourrait bien provoquer des dégâts politiques plus considérables qu’on ne croit. Début janvier, Sarkozy avait en effet revêtu le costume de Red Adair, ce pompier américain spécialiste de l’extinction des incendies de puits de pétrole, mort en 2004, à Houston. Un héros universel.
Le rôle était parfait, taillé sur mesure : Sarko, « El Comandante », avec sa vista et sa maestria de grand navigateur, face au pilote de pédalo, allait nous sortir des récifs et nous éloigner de cette mer déchaînée qu’on nomme pudiquement la crise. Et puis, patatras, le capitaine Schettino, tel Zorro, est arrivé. Ce marin d’eau tiède, au look de Rudolf Valentino, a bouleversé le scénario.
Une calamité, ce Schettino, « El crétino »… En jouant les pétochards devant la terre entière, il a balayé des  semaines de boulot des communicants du Président. En quelques heures, on a compris que tous les capitaines n’étaient pas des modèles de « bravitude » et qu’ils pouvaient même se révéler de sacrés couards.
Oubliées, les métaphores maritimes
Ah, Schettino, l‘anti-héros. Ce galonné de croisières de luxe avait même invité à son bord, selon la presse italienne, une jeune danseuse moldave, aux courbes rappelant vaguement celles de Pamela Anderson, l’héroïne d' »Alerte à Malibu », une autre spécialiste des sauvetages en mer… Une petite « berlusconade ». Il fallait bien que la croisière s’amuse.
Incroyable phénomène médiatique : le bling-bling était revenu dans la campagne présidentielle presque par effraction. Comme un tatouage que l’on avait fait disparaître et qui surgit à nouveau. Bien sûr, tout cela est de l’ordre du symbolique, de l’inconscient collectif, comme dirait Gramsci, mais cela compte dans la bataille des images. Désormais, tout ceux qui s’amuseraient à tenter des jeux de mots liés à la maîtrise du gouvernail du bateau France, seraient immanquablement entraînés dans le tourbillon du drame du Costa Concordia.
En matière de navigation, après le pédalo, le hors-bord, le paquebot, désormais usés, il ne reste que le voilier pour se sortir du pétrin. Mais qui osera utiliser cette métaphore à haut risque ? Pendant quelque temps, les staffs des candidats devront oublier le monde de la mer, car, à la première incartade, le spectre Schettino le dégonflé, devenu un personnage de comedia del arte, surgira comme un diablotin de sa boîte. Reste peut-être une solution : le sous-marin. Là, au moins, on peut se cacher. Mais n’est-ce pas déjà le choix du président ? Celui du candidat non déclaré, qui avance en eaux profondes… Il faudra bien qu’un jour il remonte à la surface.
 

A propos kozett

Deux phénomènes peuvent amener à une manipulation dans la prise en compte des informations par notre conscience : --> Le mirage qui voile et cache la vérité derrière les brumes de la sensiblerie et de la réaction émotionnelle. --> L’illusion qui est une interprétation limitée de la vérité cachée par le brouillard des pensées imposées. Celles-ci apparaissent alors comme plus réelles que la vérité qu’elles voilent, et conditionnent la manière dont est abordé la réalité … A notre époque médiatisée à outrance, notre vigilance est particulièrement requise !
Cet article, publié dans Politique, est tagué , . Ajoutez ce permalien à vos favoris.