Livre : Jacques Ellul, l’homme qui avait presque tout prévu

Les éditions du Cherche Midi ont eu  l’excellente idée de rééditer le livre du journaliste du Canard Enchaîné Jean-Luc Porquet, « Jacques Ellul. L’homme qui avait presque tout prévu »,
Ed. Le Cherche Midi, 2003, 290 p., 18 euros.
Ce fut sans doute un des grands penseurs de langue française de la deuxième moitié du siècle écoulé. En tout cas, l’un des ceux qui menèrent le plus loin la critique d’un changement technique ayant perdu le sens. Mais, comme beaucoup de prophètes, il ne fut guère entendu – sauf aux Etats-Unis où, sous l’impulsion d’Aldous Huxley, auteur du Meilleur des mondes, ses livres ont été traduits et quantité de thèses lui ont été consacrées. Il fut encore moins écouté, si bien que, sur le soir de sa vie, il confiait « Ce qui s’est produit a, presque chaque fois et dans tous les domaines, confirmé ce que j’avais prévu. Or, je ne puis m’en réjouir, ni m’en enorgueillir, car j’écrivais pour éviter qu’il en soit ainsi! »
Il était donc juste qu’un livre d’introduction à une oeuvre dense – une cinquantaine de livres! – lui soit consacré. Disons-le sans fard, il s’agit d’une excellente introduction, puisque qu’elle donne envie d’aller voir de plus près ce que disait Ellul de la société technicienne dès les années 50: qu’elle marginalise et contribue à exclure les plus faibles. L’intérêt de ce livre est de nous montrer un Ellul touche-à-tout, dénonçant la violence sociale des institutions, critiquant la croissance, partisan de la réduction radicale du temps de travail, écologiste avant l’heure. Mais c’est surtout l’analyse du système technicien qui restera dans l’histoire des idées, à défaut d’avoir réussi à influencer les décideurs eux-mêmes. Un système qui impulse une dynamique, modèle la société, crée des problèmes qu’elle promet de résoudre grâce à de nouvelles techniques. Oui, il faut relire Ellul et rendre grâce à Jean-Luc Porquet qui nous en donne l’envie.
Alternatives Economiques – Denis Clerc

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