Sarkozy roule des mécaniques face à l’Iran

Le Canard Enchaîné  du mercredi 25 avril 2012 – Jérôme Canard

Au moment où, à Paris, Washington et Londres, chacun s’inquiète et s’interroge sur la date d’un éventuel raid israélien, des militaires français sont en manœuvre dans le golfe Persique, comme ce fut déjà le cas en 2008.

Cette année, l’état-major utilise la base française d’Abu-Dhabi pour pratiquer ces exercices en compagnie de nos alliés des Emirats arabes unis. A quelque 250 km des côtes iraniennes, pareille démonstration sera sans doute jugée par Téhéran comme une « provocation irresponsable », selon un expert militaire.

Pour ces manœuvres, baptisées « Gulf 2012 », qui ont jusqu’ici débuté le 15 avril dans un parfait silence médiatique … et se termineront le 3 mai, cette fois sous le regard des médias français invités à applaudir, l’armée n’a pas lésiné sur les moyens. Un état-major « tactique » a été dépêché dans l’émirat. Un contingent de 1 100 hommes a été envoyé par avion à Abu-Dhabi où séjournent en permanence 720 militaires français, avec famille et enfants scolarisés. Cela ne pouvant suffire, des Rafale et des Mirage 2000 sont venus rejoindre les six Rafale et les trois Mirage déjà présents sur place. Mieux, une frégate (le « Cassard »), un avion-radar Boeing, des hélicos Super Puma, des avions de transport et des batteries de missiles sol-air Mistral sont aussi de la fête.

Base commerciale

Un détail : cette base installée en 2008 sur décision élyséenne, a été construite et financée par les Emirats. Des amis très chers avec lesquels Sarkozy a signé un accord de défense au cas où, par malheur, les barbus de Téhéran s’en prendraient à eux. Elle comporte un centre d’entraînement au combat, un aéroport et un port réservé aux navires de guerre. Et elle peut tenir le rôle de vitrine pour les fabrications françaises, Rafale ou frégates par exemple. La région ne manque pas de riches clients comme le sont déjà les Emirats.

 

Sans contester la décision élyséenne de pratiquer de telles manœuvres dans une « région instable », certains officiers s’interrogent sur « le positionnement de la France face à l’Iran, alors que les européens sont plutôt en retrait… » Sans oser dire comme plusieurs diplomates, que « le moment est vraiment mal choisi ». Ou que la base française pourrait devenir la cible de représailles iraniennes en cas de d’attaque israéliennes sur les sites nucléaires des barbus de Téhéran.  Mais on ne dérange pas pour si peu Sarkozy pendant le sprint électoral.