Lettre ouverte à Nicolas Sarkozy : Regardez ce que vous avez fait de la France Monsieur le Président

Ze Rédac – 2 mai 2012 –

Nicolas Sarkozy au Trocadéro - cc UMP Photos

Nous pourrions, Monsieur le Président, vous accuser d’avoir laissé, après cinq années de mandat, la France en ruine : 600 milliards d’euros de dette supplémentaires, 36 milliards de déficit commercial et 9 milliards d’euros de déficit de la sécu en plus, 350 000 emplois industriels perdus, 1 000 000 de chômeurs de plus, plus de 300 000 pauvres supplémentaires, plus de 20% d’augmentation des violences sur les personnes.
Avec un tel bilan, alors que vous aviez érigé en 2007 et durant les années précédentes, la politique du résultat en dogme indépassable de la morale politique, vous n’auriez pas dû vous représenter. Cela n’aurait pas effacé vos piètres résultats mais vous auriez gagné, aux yeux des Français, en décence.
Mais après tout, nous sommes en démocratie et chacun a le droit d’être candidat à une élection. Il appartiendra aux électeurs de juger et de dire s’ils veulent continuer pendant encore cinq ans avec vous à la tête du pays.
Malheureusement, votre bilan ne s’arrête pas à ces statistiques qui ne sont que le reflet froid du malheur semé.
Regardez, Monsieur le Président, regardez ne serait-ce qu’un instant avec les yeux de votre jeunesse, ceux d’avant le début de votre carrière politique qui a petit à petit substitué en vous le cynisme de l’ambition personnelle à l’idéalisme gaullien qui plaçait l’unité du pays au-dessus de tout, regardez en ce 1er mai 2012 dans quel état de division vous laissez la France après seulement cinq années d’exercice du pouvoir.
Paris, capitale de la France. Trois cortèges ou rassemblements, en opposition les uns les autres, en détestation les uns des autres,  comme symboles d’une République qui ne paraît plus, en ce jour, indivisible.
Le cortège syndical de Bastille à Nation est inscrit dans les gènes sociaux de la France, une tradition dont on a le sentiment qu’elle ne s’éteindra jamais. Connaissant un succès irrégulier, le défilé a parfois été, comme en 2002, l’expression incroyablement forte de l’attachement des Français aux valeurs de la République avec comme conséquence l’appel au vote pour le candidat de votre camp.
Plus souvent, le 1er mai s’est déroulé dans l’indifférence quasi-générale, y compris la vôtre nous en sommes certains. Peut-être y voyiez-vous une sorte de folklore certes un peu ridicule mais en tous cas ne menaçant en rien vos propres valeurs. Même le 1er mai 2007 n’avait pas donné lieu à des commentaires particuliers de votre part.
Tout cela était bien inoffensif pour la République et pour la valeur travail, convenez-en.
Cinq après votre élection, changement complet de décor. Vous avez tellement brutalisé, humilié, méprisé les syndicats qu’ils en sont venus à briser leur tradition de neutralité politique (voir le papier d’Hemingway Front syndical contre Sarkozy). Pour de pures raisons électorales, vous avez vous-même prononcé la déclaration de guerre en les faisant siffler dans vos meetings et en les désignant comme responsable, après les avoir caressé dans le sens du poil au début de votre mandat, de la distance qui s’est creusée entre vous et le peuple.
Le 1er mai est subitement devenu dangereux, au point que, pour qu’il ne contamine pas votre « France silencieuse » attachée au « vrai travail », vous avez, cet après-midi, pour la première fois rassemblé sur le pavé parisien des gens, comme Alain Juppé, qui n’en avaient jamais éprouvé le besoin un 1er mai.
Par cet acte symbolique fort, vous avez opposé deux France et ce n’est pas votre discours aux accents de 2007, convoquant de Gaulle, Jaurès et les défenseurs de Dreyfus, qui y changera quoi que ce soit. Vous avez, dans la seule recherche de votre profit personnel, mis l’une en face de l’autre, avec des sentiments hostiles de l’une à l’égard de l’autre, deux France, celle du « vrai travail » et celle de… on ne sait pas trop, tant vous êtes flou sur la question, laissant la porte ouverte à tous les fantasmes poujadistes. De chaque côté, des centaines de milliers de Français.
Et puis, il y avait à Paris un troisième rassemblement, celui de Marine Le Pen. Un rassemblement à l’importance particulière, bien que traditionnel, du fait du score sans précédent réalisé par la candidate du Front National au premier tour d’une élection présidentielle. Alors que vous vous faisiez fort de réduire à pas grand-chose ce parti, il a prospéré comme jamais sous votre mandature et vous en avez la responsabilité essentielle : des promesses mirifiques non tenues et un discours, depuis Grenoble en juillet 2010, qui a brisé plus que tout autre, du fait de votre position institutionnelle, les tabous du vote anti-étrangers.
Monsieur le Président, ce 1er mai 2012 est à l’image de votre mandat. C’est un 1er mai de confrontation à votre initiative. C’est, pour les travailleurs et leurs représentants, un 1er mai de légitime défense. C’est pour vous même et Marine Le Pen un 1er mai d’exploitation des peurs et des tentations les plus sombres de l’électorat.
Voilà ce que vous avez fait de la France Monsieur le Président. Vous n’êtes pas digne de la confiance que les Français vous ont accordée en 2007. Ils ont cru en vous, en votre capacité à tirer le pays vers le haut, ils ont cru qu’ensemble tout deviendrait possible. Ils ont aujourd’hui une France qui s’affaisse et un président qui tente de la diviser.
Les Français ne se laisseront pas faire Monsieur le Président. La France est un peuple susceptible qui n’aime pas être trompé. En faisant encore preuve d’un grand civisme dimanche, il vous en apportera la démonstration.

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