L’Ile-de-France reste la première destination pour les natifs du Sud-Ouest qui quittent la région. Le retour au pays reste un objectif plus ou moins vague.

 Sud-Ouest 23/07/2012 Par Pierre tillinac

 Ils ont la tête à Paris, mais le cœur dans le Sud-Ouest

 Françoise Laborde, Bernard Montiel (mais aussi Henri Emmanuelli, Alain Juppé, Jean Lassalle, Xavier Darcos, Jean Lacouture, Yves Camdeborde, Marcel Amont ou Christophe Hondelatte…). Ils ont gagné Paris pour mener leur carrière mais n’oublient pas le Sud-Ouest, se retrouvant à la Maison Aquitaine ou basque, ou lors des soirées des Gascons. (archives Christian Daumerie)
« Harrera ». Le mot est écrit en grosses lettres à l’entrée d’une ancienne usine de Saint-Ouen, aux portes de Paris. En basque, il veut dire « accueil ». Sébastien Daguerre aurait aimé le lire en arrivant dans la capitale, au début des années 2000. L’actuel président de la Maison basque de Paris ignorait à l’époque jusqu’à l’existence de ce bâtiment où les salles ont le nom des provinces « d’en bas ». « Cela aurait certainement facilité mon adaptation dans une ville où je ne connaissais presque personne. »
Sébastien Daguerre est fonctionnaire. La réussite à un concours l’a mené tout droit à Paris sans qu’on lui demande son avis. Son parcours n’a rien d’exceptionnel. Tous les ans, depuis des lustres, des milliers de provinciaux quittent la ville où ils ont grandi pour aller travailler ou étudier à Paris. La Maison basque de Paris a été créée en 1956 pour aider les « migrants déracinés » à trouver leur place dans la ville. Aujourd’hui encore, elle propose une trentaine de lits pour des jeunes de 18 à 30 ans, français et espagnols, et rassemble environ 600 adhérents qui peuvent retrouver sur place « un petit coin du pays » (www.eskualetxea.com).
Paris en baisse ?
L’Île-de-France serait-elle en train de perdre de son attractivité ? Selon l’Insee Poitou-Charentes, les comportements migratoires du début des années 2000 semblent lui donner moins d’importance. En 2008, les natifs de la région ayant déménagé au cours des cinq dernières années hors Poitou-Charentes sont allés à parts égales en Aquitaine et dans les Pays de la Loire (8 000 vers chaque région). L’Île-de-France n’est plus que troisième, avec 6 000 départs.
// Les provinciaux montés à Paris coupent rarement complètement les ponts avec leur terre d’origine. Pascal Lapeyre n’a pas oublié sa Charente natale, même s’il n’est pas certain d’avoir envie d’y retourner définitivement quand viendra l’âge de la retraite. Né à Angoulême, après avoir passé des années à sillonner toutes les routes de France, il a fini par reprendre, à 40 ans, un café-restaurant dans le 15e arrondissement. Le Signal est devenu le siège de l’Association des Charentais de Paris (Charente et Charente-Maritime). Ils s’y retrouvent autour du 16 ou du 17 de chaque mois – le 16, comme l’indicatif postal de la Charente, ou le 17, celui de la Charente-Maritime – et acquittent tous les ans une cotisation de 33 euros.
Trouver du travail
C’est pour le travail – et quelquefois par amour – que la plupart de ces natifs du Sud-Ouest ont un jour débarqué à Paris dans des conditions plus ou moins difficiles. « Pendant un an, j’ai galéré à la recherche d’un emploi », se souvient un Périgourdin. « Si j’avais pu trouver du travail là-bas, je serais resté, mais je me suis finalement décidé à monter à Paris pour trouver un boulot. Et ça a marché. »
L’histoire est banale. Les natifs du Sud-Ouest laissent facilement entendre qu’ils auraient préféré rester sur leurs terres plutôt que s’en aller plus au nord. Mais, en même temps, ils reconnaissent souvent ne rien regretter. « C’est aussi un peu un choix », confie l’un d’entre eux. « Ceux qui restent sur place ont la mer, la forêt et la montagne, mais ils ont des postes moins recherchés ou des évolutions de carrière moins intéressantes. »
Le président de l’Amicale des Landais de Paris dit avoir vu les mentalités évoluer. « Il me semble que de plus en plus de jeunes veulent rester au pays. Pour cela, ils sont prêts à accepter des petits boulots ou à trouver un emploi qui ne correspond pas à leur qualification », souligne Jacques Darracq.
Aurore Guilhamet vit à Paris depuis une dizaine d’années. Née à Pau, elle a vécu plusieurs années en région Provence-Alpes-Côte d’Azur avant de rejoindre la capitale sans états d’âme. « Avant de partir, je ne pensais pas être attachée au Béarn, confie-t-elle. Aujourd’hui, il me manque quelque chose. C’est indescriptible. L’esprit du Béarn, une certaine convivialité. » Pour essayer de retrouver ce je-ne-sais-quoi qui fait la différence, elle vient de créer une amicale des Béarnais de Paris (www.bearnaisdeparis.org) qui proposera diverses activités culturelles et festives.
Objectif retour
« Le fait de s’expatrier renforce le sentiment d’appartenance », confirme Thibault Grenier, chargé de communication à la Maison Aquitaine de Paris. « Mais ceux qui pensent au retour ont souvent aussi la crainte de perdre quelque chose en rentrant. » Ils ont souvent peur de s’ennuyer dans des villes qui leur semblent maintenant trop petites et trop calmes, ou de végéter dans des emplois d’un niveau inférieur.
Marie Royer n’a pas eu ce genre d’appréhension. Après quelques années passées à Paris, elle s’est rendu compte qu’elle avait finalement envie de retrouver le département dans lequel elle avait grandi et effectué ses études. Salariée d’une grosse entreprise, un poste qui se libérait à Bordeaux lui a permis de faire sa valise à 28 ans sans voir son salaire baisser. « Professionnellement, je sais qu’il y a des choses que je ne ferai plus, mais je ne regrette absolument rien. » Pour d’autres, le retour au pays peut coûter beaucoup plus cher, notamment quand le conjoint perd son emploi.
Ce retour au pays ne fait pas rêver tous les Parisiens du Sud-Ouest, mais pour nombre d’entre eux, il reste un objectif plus ou moins vague. « Tous ceux que je connais y pensent de temps en temps, mais ils butent toujours sur deux questions : quand et comment ? » note un presque quadragénaire qui se sent très bien dans sa vie parisienne. Sébastien Daguerre, président de la Maison basque de Paris, se pose les mêmes questions, mais la réponse est déjà toute prête : « Un jour, j’y retournerai, et je passerai ma retraite là-bas, c’est sûr. » 

A propos kozett

Deux phénomènes peuvent amener à une manipulation dans la prise en compte des informations par notre conscience : --> Le mirage qui voile et cache la vérité derrière les brumes de la sensiblerie et de la réaction émotionnelle. --> L’illusion qui est une interprétation limitée de la vérité cachée par le brouillard des pensées imposées. Celles-ci apparaissent alors comme plus réelles que la vérité qu’elles voilent, et conditionnent la manière dont est abordé la réalité … A notre époque médiatisée à outrance, notre vigilance est particulièrement requise !
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