24 Heures Suisse – 11 octobre 2012 – Christine Talos
Une étude sur le gaspillage alimentaire révèle que la Suisse jette chaque année deux millions de tonnes de nourriture aux ordures. Soit l’équivalent par personne d’un repas complet quotidien.

Les chiffres sont effarants: à l’échelle de la planète, un tiers de la nourriture mondiale disponible est gaspillée! Et la Suisse ne fait pas mieux puisqu’un tiers des aliments produits finit également à la poubelle chaque année. Soit deux millions de tonnes de nourriture ou un repas entier par personne et par jour.
C’est ce que révèle une étude menée par Claudio Beretta et Joao Almeida, des chercheurs de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich et de l’Université de Bâle, dont les travaux ont été repris conjointement par le WWF et la fondation Foodwaste.ch. Ceci dans le cadre de la Journée mondiale de l’alimentation qui aura lieu le 16 octobre prochain.
Consommateurs les plus gaspilleurs
Au vu des résultats basés notamment sur des chiffres émanant des Offices fédéraux de la statistique, de l’agriculture ou de la santé publique, et contrairement aux idées reçues, ce n’est pas le commerce de détail qui a le plus de progrès à faire en la matière, avec un taux de seulement 5%. Car les principaux gaspilleurs sont les consommateurs eux-mêmes, avec un taux de 45%!
Derrière eux, l’industrie alimentaire gaspille elle aussi énormément avec 30% d’aliments qui passent à la poubelle. Un gaspillage dû surtout au tri visant à éliminer les marchandises de moindre valeur. L’agriculture est également mauvaise élève avec un taux de 13%. En cause: les fruits et légumes non récoltés en raison de leur mauvaise mine ou leur mauvaise taille, selon le communiqué du WWF.
Mais que faire pour lutter contre cet énorme gaspillage alors qu’un être humain sur huit ne mange pas à sa faim, selon un rapport de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentaire et l’agriculture (FAO) publié mardi. Et que la planète dispose de suffisamment d’aliments pour nourrir tout le monde, selon son président.
Enjeu écologique
«Le problème est très complexe et il n’y pas de solution simple», soupire Pierrette Rey, porte-parole du WWF. Or l’enjeu est de taille sur le plan écologique. «D’autant que jeter des haricots produits dans son jardin n’a pas le même impact sur l’environnement que jeter ceux qui viennent par avion du Kenya», explique-t-elle.
Mais si tous les niveaux de la chaîne alimentaire jouaient le jeu, un tiers des déchets actuels pourrait être évité et nous n’aurions pas besoin d’importer autant d’aliments de l’étranger. Il serait alors possible d’économiser chaque année autant de CO2 qu’en émettent 500’000 voitures, selon elle.
La conseillère nationale vert’libérale vaudoise Isabelle Chevalley s’inquiète elle aussi du gaspillage en Suisse. «C’est insultant pour les paysans à qui l’on fait produire des aliments qui finissent à la poubelle!» s’exclame-t-elle. La politicienne a déposé un postulat sur ce sujet en mars dernier. Il demande au Conseil fédéral quelle est sa politique pour lutter contre le gaspillage.