Et si l’Etat s’intéressait aussi à la durée du mariage de tous et pour tous ?

Blog de David Abiker – 29 octobre 2012 –
Le mariage, tout le monde y tient décidément. Les homos le veulent, les religieux le veulent en l’état, l’UMP ne le veut que pour les hétéros tandis que les socialistes veulent tenir leur promesse avec le Mariage pour tous.
Mais imaginons, imaginons qu’à la façon du roi Salomon, nous disions aux hétéros comme aux homos, vous voulez le mariage ? Soit. Dans ce cas, mariez-vous pour la vie. Vous souriez déjà et vous avez raison.
Mais tout de même…
Dans ce débat sur le mariage pour tous, une question est éludée. C’est la question qui fâche. C’est le problème le plus difficile à surmonter. C’est celui de la longévité et de la durabilité du mariage. Cette question est évidemment totalement évacuée, on l’évite même. Qu’est-ce qu’un mariage heureux ? Un mariage obtenu de haute lutte, un mariage consommé ou un mariage qui dure ? Cette question –là est éludée, elle est même censurée tant elle remettrait en cause les automatismes de nos débats modernes sur la famille.
Ce débat sur le mariage se déroule comme s’il fallait décrocher à tout prix le permis de conduire mais que la conduite, ensuite, était secondaire. Après tout, quitte à réfléchir au mariage pour tous, pourquoi ne pas tenter de réfléchir à l’amélioration du mariage de tous et toutes, non ?
C’est le grand paradoxe de l’air du temps qui souffle sur ces discussions. On se donne les moyens du mariage, on milite pour qu’il évolue, pour qu’il s’ouvre à tous mais quand il s’agit de faire durer le mariage, de le consolider, de le pérenniser il n’y a plus personne. Circuler, y’a rien à voir. Et que les couples, hétéros ou homos se démerdent avec l’amour qui dure trois ans.
Il y a évidemment une explication.
Le divorce s’est banalisé.
La famille recomposée est aujourd’hui normalisée.
La modernité c’est la recomposition, pas la décomposition…
Sans oublier que la durée du mariage ne concerne pas la société, elle ne concerne que les mariés et leurs enfants, c’est une affaire privée, pas une affaire publique. A priori…
Pourtant, le mariage qui ne dure pas fait des ravages de toutes sortes. La rupture fabrique de la douleur, de la précarité économique, de la solitude et sans doute aussi de la détresse sociale. Des études anlo-saxonnes pas si loufoques  montrent que les gens mariés vivent en meilleure santé et plus longtemps. Même si pour dix articles célébrant les joies de la famille recomposée il s’en écrit un seul sur les conséquences dramatiques du divorce, personne ne niera que l’éclatement des familles est autant un soulagement pour leurs composantes qu’une réelle source de difficultés.
Cet dimension-là est évidemment négligé dans nos contrées et la société travaille davantage à panser les plaies des couples et des familles divorcées qu’à prévenir les séparations. L’Etat de ce point de vue est davantage pompier que médecin. Du reste, la prévention du divorce fait sourire. Car aujourd’hui, qui se soucie de prévenir les divorces ? Les religieux car c’est leur crédo et la fédération française du coaching conjugal parce que c’est son business (je ne crois pas qu’elle existe d’ailleurs…) ; donc on se marre doucement.
J’ai pourtant le souvenir d’avoir reçu à Europe1 un certain Julien Damon qui s’était intéressé à la politique américaine en matière de promotion du mariage et de prévention du divorce. Il avait commenté dans un long article cette politique et ses résultats. J’ai retrouvé en fouillant dans ma mémoire le nom de Julien et surtout l’article en question que je vous laisse dévorer. On y apprend qu’il n’est pas complètement ridicule de mettre en place des politiques de promotion et de conservation des mariages. Pas complètement réactionnaire non plus puisque ces politiques pourraient soutenir les mariages homos comme les mariages hétéros.
Car il ne suffit pas de d’accorder le droit aux uns et autres de se marier, encore faut-il que le mariage pour tous soit véritablement encouragé et protégé dans la durée par l’Etat qui semble considérer les divorces comme une sorte de fatalité qui ne le regarde absolument pas. Pourquoi donc ? Lui qui se mêle d’à peu près tout ces derniers temps, lui qui intervient dans tout jusqu’à notre consommation de cigarettes et d’alcool ? Ah oui mais mais les cancers coûtent de l’argent public…!
Comme si l’éclatement des familles n’avait pas un coût pour la collectivité.
C’est un autre débat mais il me paraît très connexe à celui qui se dessine sous nos yeux en ce moment sur le mariage pour tous. Je suis personnellement et depuis assez peu de temps favorable au mariage pour tous. Je me demande si l’enjeu, au-delà de la possibilité des homosexuels de se marier, n’est pas d’en profiter pour s’interroger sur les moyens à mettre en œuvre pour que ces mariages durent, qu’ils concernent des couples hétéros ou des couples homos. Après tout le développement durable n’est pas qu’une affaire de plantes vertes, il pourrait aussi être une affaire de couples et de familles.

A propos werdna01

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