La Belgique s’intéresse au conflit de l’UMP à travers le journalisme français

La Libre be. 05/12/2012 Virginie Roussel Correspondante à Paris
UMP : « Les loups désignent le mâle dominant »
 François Fillon est naïf, peut-il gérer un parti, voire un pays ?
Christophe Barbier, directeur de la rédaction de « L’Express », analyse les enjeux du conflit entre les deux candidats à la présidence de l’UMP, François Fillon et Jean-François Copé.
Pour ces élections à la présidence de l’UMP, Jean-François Copé a utilisé la structure du parti. Pourquoi François Fillon n’a-t-il pas exigé qu’il démissionne pendant la campagne ?
François Fillon a commis trois erreurs. D’abord une erreur de naïveté. Il pensait que son élection allait être facile et que le fait de ne pas maîtriser l’appareil n’était pas un problème. Il pensait aussi que les militants écouteraient les sondages qui lui étaient favorables. Deuxième erreur, il n’a jamais dirigé un appareil politique. Il ne s’est pas rendu compte techniquement de l’avantage que ça procurait à Copé. Troisième erreur, s’il avait dirigé l’appareil, il aurait fait la même chose. Il ne pensait donc pas que tout ça était répréhensif. Aujourd’hui, il peut difficilement attaquer Copé pour l’usage de l’appareil et de l’argent.
Si François Fillon est naïf, peut-il gérer un parti, voire un pays ?
Il n’avait absolument pas l’intention de gérer le parti. S’il est proclamé vainqueur à une prochaine élection, ce n’est pas lui qui s’en occupera. Autour de lui, Wauquiez, Pécresse, Ciotti, Estrosi, adorent ça. Fillon n’a jamais aimé ce genre de mécanique, ce genre de cambouis, tout comme Philippe Seguin, son mentor, qui avait laissé la direction effective à Nicolas Sarkozy en 1997. Il voulait un parti pour lui servir de vitrine, d’affiche, pour être officiellement chef de l’opposition. Son but, c’est la présidentielle.
Comment un sportif tel que Fillon, pilote automobile qui plus est, n’a-t-il pas su gérer le départ de la course ?
Il est en train de montrer des qualités de combattant. En course automobile, il aime doubler dans les virages. C’est un homme qui aime aussi la tauromachie. Et on assiste à une sorte de corrida. Mais il y a aussi chez Fillon un notable, quelqu’un qui considère que certaines choses lui sont dues. Il pensait qu’après avoir été Premier ministre, il était évident que le parti le choisirait comme chef. Sarkozy s’étant arrêté et Juppé n’étant plus vraiment dans la course, c’est lui qui avait le grade le plus élevé. Le notable Fillon a été un peu trop naïf, un peu trop sûr de lui. Depuis la contestation du 18 novembre, on voit Fillon le sportif. Mais c’est un peu tard.
Comment Jean-François Copé peut-il espérer réussir en employant les mêmes méthodes que Nicolas Sarkozy, alors qu’aujourd’hui, avec Internet et Twitter, les élections ne se gagnent plus par la force ?
Hélas, la politique depuis 2000 ans fait quand même gagner par la force, par le fait d’être plus résistant que l’autre, d’être prêt à mourir pourvu que l’autre meure aussi. C’est immuable ! Les moyens de communication sont une autre manière d’exercer sa force.
L’UMP aurait-elle des difficultés relationnelles avec la démocratie ?
Oui, incontestablement. L’UMP est l’héritage du RPR. Ces partis ont la culture du rapport de forces. Entre eux, les loups désignent le mâle dominant, le plus fort de la meute. En France, la droite est ou bien légitimiste, c’est l’héritage du sang, ou bien bonapartiste, avec la prime au coup de force.
Nicolas Sarkozy peut-il s’exprimer librement alors qu’il siège au Conseil constitutionnel ?
Normalement, il n’a pas le droit de s’exprimer publiquement sur des affaires politiques dans des émissions de télévision, des communiqués. Mais il a le droit de déjeuner avec qui il veut et de recevoir dans son bureau.
A-t-il intérêt à sortir du bois ?
Non. Si au premier froncement de sourcil tout était rentré dans l’ordre, on aurait dit que Sarkozy reste le vrai chef. Mais on constate à la fois qu’il est difficile de le remplacer et qu’il n’a pas d’autorité.
Au final, à qui va profiter cette pagaille générale ?
L’UMP discréditée va devoir retourner vers les Français en s’expliquant, en s’excusant et en développant des idées. Coppé et Fillon, deux présidentiables, vont devoir retrouver un contact avec les Français. Et ce sera très difficile. Quant à Sarkozy, on a vu qu’il pensait à 2017. Mais que ça ne va pas être facile pour lui non plus de retrouver un parti uni, solide, et de s’imposer comme candidat de ce parti. Tout ça est très bon pour François Hollande.
Une nouvelle figure charismatique émerge-t-elle ?
Il faut attendre d’autres élections, les municipales, les régionales. En 2004, à gauche, une vedette a surgi qui s’appelait Ségolène Royal parce qu’elle avait gagné les régionales. Elle a battu la droite dans la région de Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Et c’est là-dessus qu’elle a construit son ascension. C’est devenu une star.

A propos kozett

Deux phénomènes peuvent amener à une manipulation dans la prise en compte des informations par notre conscience : --> Le mirage qui voile et cache la vérité derrière les brumes de la sensiblerie et de la réaction émotionnelle. --> L’illusion qui est une interprétation limitée de la vérité cachée par le brouillard des pensées imposées. Celles-ci apparaissent alors comme plus réelles que la vérité qu’elles voilent, et conditionnent la manière dont est abordé la réalité … A notre époque médiatisée à outrance, notre vigilance est particulièrement requise !
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