La chute des journaux conduit à la faillite des kiosquiers – l’ancien PDG de Presstalis, a-t-il laissé la coopérative se déliter malgré une aide publique de 30 millions… ?

chien lisant très drôle Nouvel Obs 06/02/2013

SOS journaux en péril

 Difficile d’imaginer une situation aussi absurde : les journaux en version sont en train de mourir, leurs ventes reculent mois après mois – la chute moyenne des quotidiens sur un an est de -9% mais elle atteint -18% pour « Libé », -17% pour « Le Parisien » et -12% pour « Le Monde »,  et chacun sait que d’ici quelques années, il n’existeront sans doute plus sous forme papier…
Et pourtant une corporation a décidé de les tuer encore plus vite, alors qu’elle vit de leur distribution : les syndicalistes du livre CGT (on ne parlera pas d’ouvriers dans leurs cas, car leurs salaires les classent dans une catégorie sociale supérieure).
 La chute des journaux conduit en effet d’abord à la faillite virtuelle  des kiosquiers. Au-delà, Presstalis, la coopérative qui distribue la plupart des journaux, est aussi en faillite, réelle celle-là. Pour s’adapter à son nouvel univers de plus en plus petit, faute d’avoir su développer d’autres activités, Presstalis doit réduire logiquement son personnel et ses centres de distribution. Ce n’est pas une austérité idéologique. Lorsque le train a remplacé la diligence, on avait supprimé les relais de poste sur tout le territoire. Il se passe la même mutation avec le numérique.
 Cette remise à niveau aurait dû être anticipée mais ce n’est qu’en 2012 que la direction de Presstalis, et les éditeurs de journaux qui la dirigent, ont décidé d’agir. Parce qu’il n’y avait plus d’autre issue. Ils veulent donc supprimer, confortablement et avec indemnités,  un échelon de distribution, et la moitié des postes – 1250 emplois sur 2500 – ce qui est énorme, c’est vrai. Rien ne dit que cela suffira, d’ailleurs, vu le « trend » baissier, mais ce sera déjà une assurance de survie temporaire.
 Sauf que… le Livre-CGT refuse le plan. Les emplois de Presstalis, comme ceux des imprimeries, sont très bien payés, ils n’ont pas d’équivalents dans le reste de l’économie. De plus, s’il acceptait leur disparition, le syndicat signerait – aussi – sa fin à lui car il n’existe  plus que dans ces entreprises-là.  Donc, il dit niet, et bloque depuis des mois la livraison des journaux à tour de rôle.
 Ce faisant, il accélère la chute des ventes de journaux et tue un peu plus vite les kiosquiers. Mais ses membres s’en foutent, car ils partent du principe que l’Etat et les éditeurs feront comme d’habitude : ils finiront par payer soit sous forme d’emplois surpayés et sauvegardés, soit sous forme de primes de départ délirantes. « Les ouvriers du livre, en tout cas ceux qui ont décidé d’aller à la politique du pire, pensent qu’en mourant ensemble nous vivrons plus longtemps. Funeste erreur », écrit aujourd’hui Nicolas Demorand dans « Libé.fr ».
 Dans ce bras de fer, le Livre-CGT a un point fort : il fait peur aux éditeurs. Il peut bloquer la machine, voire parfois se montrer violent. Les patrons ont l’habitude de céder à toutes ses demandes depuis longtemps. Et en refusant d’imprimer leurs journaux, ils ont – en un sens – donné un coup de pouce au syndicat, car c’est une façon de faire pression sur les pouvoirs publics : aucun ministère n’avait aujourd’hui de journaux.
 Le grand lecteur de quotidiens qu’est le président Hollande est bien obligé de voir qu’il y a urgence… chose qu’il sait d’ailleurs parfaitement. Le président en veut beaucoup à l’ancien PDG aRémy Pflimlin dessinde Presstalis, Rémy Pflimlin – désormais PDG de France Télévisions – d’avoir laissé la coopérative se déliter malgré une aide publique de 30 millions…
 Aujourd’hui, la pression du Livre-CGT, redoublée par la pression des éditeurs, oblige l’Etat à agir : soit en faisant respecter le travail chez Presstalis, soit en accélérant le plan social. Sans cela, la situation des kiosquiers ne sera plus gérable : ils fermeront tous leurs portes, et la presse ne pourra vivre qu’avec ses abonnés vieillissants. Une perspective terrifiante pour notre profession.
Claude Soula

A propos kozett

Deux phénomènes peuvent amener à une manipulation dans la prise en compte des informations par notre conscience : --> Le mirage qui voile et cache la vérité derrière les brumes de la sensiblerie et de la réaction émotionnelle. --> L’illusion qui est une interprétation limitée de la vérité cachée par le brouillard des pensées imposées. Celles-ci apparaissent alors comme plus réelles que la vérité qu’elles voilent, et conditionnent la manière dont est abordé la réalité … A notre époque médiatisée à outrance, notre vigilance est particulièrement requise !
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