Livre best-seller : « Manifeste pour le bonheur »

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Stefano Bartolini / Manifeste pour le bonheur
Traduit de l’italien par Étienne Schelstraete – 320 p., 21 €
La force et l’originalité du livre tient en son programme : Comment passer d’une société de l’avoir à une société du bien-être. Le diagnostic de l’auteur est sans concessions : notre société est malade du consumérisme qui vampirise jusqu’au plus intime de la psyché humaine ; notre société met les citoyens sous la dépendance d’un système économique fondé sur l’individualisme et la rareté et qui, au final, ne crée que de la frustration et développe les inégalités ; notre société alors même qu’elle est statistiquement dans l’abondance a pour symptômes, l’absence de bonheur, le délitement du lien social, une agitation fébrile source de stress, une crise de l’estime de soi. Comment sortir de cette impasse ? Tel est le remarquable travail de l’auteur, Professeur d’économie à Bologne, qui décrit un ensemble de politiques susceptibles d’accomplir la mutation nécessaire. En quelque sorte le manuel d’une société enfin alternative et relationnelle. Ainsi développe-t-il les politiques urbaines (avec son idée originale de ville relationnelle), les politiques qui enrichissent le tissu social, de nouvelles politiques de l’éducation, de la santé ou de l’organisation du travail. Pas un livre utopique mais un livre programme qui a connu un grand succès en Italie et qui est en cours de traductions aux États-Unis et en Angleterre.
Selon cet essai stimulant, la culture de la consommation, propre à notre économie de marché et attisée par la publicité t les médias, nous rend malheureux Stéphano Bartolini s’appuie sur de nombreuses enquêtes, menées aux États-Unis et en Europe, pour démontrer le « paradoxe du bonheur » : plus une société est riche (en termes de produit intérieur brut par habitant), plus le pourcentage de gens se disant heureux décline et plus augmente le nombre de suicides, la consommation d’alcool et des drogues, ou encore les maladies cardiovasculaires
Le piège des revenus en plus Pourquoi ?
petites-coccinellesA cause de la pauvreté relationnelle, elle aussi en croissance – aggravation de la solitude, recul de l’engagement civique, En raison aussi de l’augmentation des revenus : un individu travaillera plus pour tenter de gagner plus s’il veut avoir le même smartphone que son voisin, mais celui-ci fera pareil pour s’offrir la même tablette que son chef, etc… A l’arrivée, les ménages s’endettent pour consommer (ce qui, en 2008, a mené droit au krach). L’angoisse et la dépression sont d’ailleurs plus répandues chez ceux qui déclarent qu’une excellente situation économique est l’objectif principal de l’existence. En 1995, c’était le cas de 74% des étudiants américains, contre seulement 39% en 1970. Les enfants sont particulièrement victimes de cette pression compétitive à l’école et de leur plus forte exposition aux médias.
Moins de biens, plus de liens
220px-Penser_un_autre_mondeLe problème, c’est que ces méfaits sont bons pour la croissance. Saint Graal de tout gouvernement, même dit de gauche. Stéphano Bartolini appelle ce paradoxe le « capitalisme NEG » (pour croissance endogène négative) : de nouveaux besoins sont créés par la disparition de biens communs gratuits (une rivière non polluée, de temps avec ses enfants, pour les loisirs), remplacés par des biens privés et chers (une semaine aux Maldives, une babby-sitter). Proche en cela de la pensée décroissante, il écrit : « Un changement radical du mode de vie doit passer par la réduction du besoin d’argent. Il faut donner aux gens l’occasion de faire le choix de la décroissance, ce qui n’est possible qu’à travers une organisation sociale qui leur permette de construire une vie plus heureuse ». Moins de biens, plus de liens, en quelque sorte. il pointe quelques combats décisifs (taxation de la publicité, santé préventive,etc), loin d’être perdus d’avance.  ( Simon Barthélémy -TerraEco mars 2013)

A propos werdna01

Hors des paradigmes anciens et obsolètes, libérer la parole à propos de la domination et de l’avidité dans les domaines de la politique, de la religion, de l’économie, de l’éducation et de la guérison, étant donné que tout cela est devenu commercial. Notre idée est que ces domaines manquent de générosité et de collaboration.
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