Patrimoine des parlementaires : les transparents terribles

Le Canard Enchainé du 5 juin 2013
Bon nombre de parlementaires – à commencer par Claude Bartolone, le président de l’Assemblée – ne voulaient pas que leur patrimoine soit rendu public. Ils ont, en grande partie, obtenu satisfaction.
100_5474Le projet de loi relatif à la transparence de la vie politique prévoit que les déclarations de patrimoine des élus seront contrôlées par la Haute Autorité, qui les remettra aux préfectures, où elles seront consultables. Consultables, mais pas diffusables, contrairement aux impôts des contribuables. Donc confidentielles. « Le fait de publier ou de divulguer les Informations ainsi recueillies serait puni (…) de 1 an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. » Une peine suffisamment dissuasive pour calmer bien des ardeurs.
Ce texte a été accouché dans la douleur en trois temps. Premier temps, le 27 mai : le cadre du projet de loi est fixé par Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des Lois, Bruno Le Roux, patron du groupe PS à l’Assemblée, le député René Dosière et Alain Vidalies, ministre chargé des Relations avec le Parlement. Consulté, Bartolone refuse tout compromis : « Je ne rendrai pas public mon patrimoine. »

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Deuxième temps, le 29 mai : le groupe socialiste se réunit salle Colbert pour parler dudit projet de loi. Pas plus d’une trentaine de députés sont présents. Le président de l’Assemblée prend la posture théâtrale qu’il affectionne et ouvre le feu : « Je suis opposé à la publication du patrimoine des députés ! s’écrie-t-il. Le projet de loi qu’on nous propose, c’est du voyeurisme. Cela ne sert strictement à rien. Il y aura toujours de la surenchère.« 
Vidalies tente de la calmer : « Le président de la République ne peut pas perdre, dans cette affaire, il a pris des engagements… Il faut trouver une solution qui concilie les deux objectifs : transparence et respect de la vie privée. » Sous-entendu : nous avons trouvé la solution, mais elle n’est pas arbitrée définitivement par l’Élysée. Le désordre est tel que les participants ne comprennent pas, et on en reste là. Tout le monde râle.
Informé de l’incident, Hollande, qui s’était prononcé pour la transparence intégrale et a dû reculer devant l’opposition des parlementaires, pique sa colère : « La position jusqu’au-boutiste de Barto est incompréhensible !« 
untitledLe troisième temps est plus festif. Le 31 mai au soir, le président de la république embarque dans sa voiture celui de l’Assemblée nationale pour le conduire au Stade de France, ou va se dérouler la finale de la coupe de foot : Bordeaux contre Evian-Thonon-Gaillard. ils causent. Après le match, Bartolone soutient un projet de loi qui, somme toute, tient largement compte de ses désidérata. Comme quoi le football peut parfois apaiser les esprits, y compris en Seine-Saint-Denis. Même si cette transparence là n’est plus très claire.
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