Vive l’abolition de la chasse !

Site de Charlie Hebdo – 20/09/13
Le chasseur plaide la légitime défense, par CharbC’est pas tous les jours dimanche. Le 21 septembre, qui est un samedi, manif à Paris contre la chasse, place d’Iéna, à 14 heures. Charollois, un juge aveugle et grand héros du mouvement antichasse, explique pourquoi il faut y aller.
Un mot sur Gérard Charollois, grand héros du mouvement antichasse. Ce type estréellement un cas. Aveugle, il est juge à Périgueux, où il préside la chambre de la famille du tribunal de grande instance. Amoureux de la vie, de la nature, des animaux, il a été le vice- président du glorieux Rassemblement des opposants à la chasse (ROC)du temps de Théodore Monod. Il vient de publier une nouvelle édition de Pour en finir avec la chasse (éd. Imho) et il prépare une manif.
Le 21 septembre, à 14 heures, place d’Iéna. Une partie de l’équipe de Charlie sera là, dont Cabu, Luce Lapin, et Fabrice Nicolino.
Vous organisez donc une manif contre la chasse, ce qu’on n’avait pas vu en France depuis des lustres. Mais pourquoi ?
Gérard Charollois: (Il rigole.) Pourquoi ? Mais parce que l’opposition à la chasse est en France majoritaire, et qu’il est grand temps de la rendre visible. L’association que je préside, la Convention Vie et Nature (CVN) a commandé à la Sofres, en janvier 2011, un sondage. La question posée était celle-ci: «Êtes-vous plutôt favorable à ce que l’animal sauvage bénéficie, comme l’animal domestique, de la protection légale contre les actes de cruauté et les mauvais traitements?» 87% ont répondu oui, et 7% non. C’est écrasant! C’est formidable! Et pourtant, rien ne bouge.
Chasseurs assassins, par CharbJustement. J’allais vous dire: rien ne change. Vous avez l’explication?
L’évidence, c’est qu’il y a divorce entre l’opinion publique et la classe politique. Cette dernière se sent obligée de s’agenouiller devant les fédérations de chasse, et, tous les deux ou trois ans, les députés votent une nouvelle loi chasse pour faire plaisir au lobby. Franchement! Certes, nous n’avons pas la puissance matérielle, la puissance financière des chasseurs. Eux, quand ils organisent une manifestation importante, ils louent des cars et font monter les leurs par dizaines de milliers. J’en sais quelque chose, car le 25 février 1989, au cours d’une grande manifestation du parti de l’extrême chasse CPNT dans les rues de Périgueux, où je travaille, j’ai été pendu en effigie. Seulement, moi, je suis fier d’avoir essuyé leurs injures. Pour la manifestation que nous organisons le 21 septembre, nous n’avons pas un sou. CVN ne touche pas un euro de l’État, et je sais que des sympathisants viendront à leurs frais de province, alors qu’ils sont aux minimums sociaux. C’est à ce prix, élevé, que nous entendons donner enfin une visibilité à ceux qui, en France, refusent et condamnent la chasse.
Sérieusement, vous la voyez venir, la fin de la chasse ?
Quand il n'y aura plus d'animaux à massacrer...
Tout a une fin. Les combats de gladiateurs, les bûchers, le bagne, l’esclavage appartiennent au passé. Beaucoup, qui sont victimes du syndrome de la faiblesse, croient que la chasse est forte. C’est une illusion! Je me suis battu des années — au passage, je salue la vaillance d’Allain Bougrain Dubourg — contre la chasse à la tourterelle dans le Médoc. Tout le monde craignait une jacquerie, avec des incidents graves à la clé, en cas d’action de l’État. Il aura suffi de la dissolution du «comité tourterelles» des braconniers et d’une action judiciaire enfin concrète pour faire disparaître le problème. Tout l’édifice repose sur deux pieds vermoulus. Un, les fédérations de chasse sont les héritières directes de structures corporatistes crées par Pétain le 28 juin 1941, les sociétés départementales de chasseurs. Deux, les décideurs entretiennent la vision bucolique et passéiste d’une France qui n’existe pas.
La chasse est peut-être moribonde, mais elle bouge encore…
Les chasseurs étaient 2,4 millions en 1975, ils ne sont plus que 1,2 million, et encore! Car on compte les cartes distribuées, et certains peuvent en avoir une départementale et une nationale. Le monde de la chasse se comporte comme une Bastille assiégée, comme si elle était à l’abri d’une ligne Maginot imprenable. Alors que l’Europe se dirige doucement vers l’abolition, la France s’obstine. Or il n’est plus possible que moins de 2% de la population s’octroie des droits pareils sur la faune sauvage et le territoire national tout entier. C’est un déni de démocratie. Et n’oublions pas la question éthique: a-t-on le droit de tuer un être sensible pour se distraire? Ma réponse est: NON.
Propos recueillis par Fabrice Nicolino

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