La Russie emprisonne les militants de Greenpeace venus protéger l’Arctique
Équipage de l’Arctic Sunrise : Mobilisons nous pour leur liberté ! Demandez leur libération
Ce samedi 5 octobre, nous nous mobiliserons partout en France pour protester contre cette tentative d’intimidation visant à décourager ceux qui défendent notre planète. Dans les prochains jours, vous retrouverez sur le site internet les lieux et les heures de ces rassemblements.
LE MONDE | 30.09.2013 | Par Piotr Smolar
La Russie emprisonne les militants de Greenpeace venus protéger l’Arctique
L' »Arctic Sunrise », le bateau de Greenpeace arraisonné par les forces russe dans les eaux de l’Arctique. | REUTERS/HANDOUT
Un tribunal de Mourmansk vient d’envoyer un avertissement limpide aux organisations écologistes. Elles ne bénéficieront d’aucune tolérance en Arctique, zone d’intérêt vital pour l’Etat russe. Dimanche 29 septembre, huit membres de l’équipage de l’Arctic-Sunrise, un navire de Greenpeace, ont été placés en détention provisoire pour deux mois. Leurs vingt autres compagnons, ainsi qu’un photographe et un vidéaste, avaient subi un sort identique quelques jours plus tôt. Les 30 membres de l’équipage du brise-glace battant pavillon néerlandais représentent 18 pays. Ils sont poursuivis pour « piraterie en groupe organisé », crime passible de quinze ans de prison.
L’Arctic-Sunrise a été arraisonné le 19 septembre par un commando héliporté de garde-côtes russes, puis remorqué jusqu’au port de Mourmansk. La veille, les militants de Greenpeace avaient tenté d’aborder une plate-forme pétrolière de Gazprom, afin de dénoncer ses projets de forage en eaux glacées, au-delà du cercle polaire. Le champ pétrolier de Prirazlomnaya est situé au milieu de parcs nationaux et de réserves naturelles peuplés de morses et d’ours polaires. Outre la fonte des glaces qui s’accélère, les organisations écologistes dénoncent depuis des années ces projets industriels, qui pourraient causer des dommages irréversibles.
La mise en détention des membres de Greenpeace a provoqué une vague de protestations internationales. « Tout le monde comprend que leur détention est illégale, mais même la procédure de mise en détention est entachée d’un tel nombre de violations que nous ne savons laquelle en premier doit faire l’objet d’un appel », a expliqué Dmitri Artamanov, représentant de Greenpeace à Mourmansk.
LES MILITANTS DE GREENPEACE « NE SONT PAS DES PIRATES »
Le 25 septembre, au cours du Forum de l’Arctique, le président russe, Vladimir Poutine, a reconnu que, « bien sûr », les militants de Greenpeace « ne sont pas des pirates ». Mais ils ont créé, affirme-t-il, un danger en matière de sécurité sur la plate-forme. M. Poutine a par ailleurs affirmé qu’il était « impossible » d’arrêter les projets d’exploitation dans cette zone si prometteuse. « En vertu de notre politique nationale, seules les compagnies disposant des dernières technologies innovantes et ayant assez de ressources économiques auront le droit de produire du pétrole en Arctique », affirme-t-il.
L’Arctique est un projet stratégique de l’Etat russe. Deux compagnies ont le droit d’y travailler : Gazprom et Rosneft, cette dernière s’étant associée avec Exxon Mobil, Statoil et Eni. L’enjeu est énorme pour l’économie russe, dont la croissance est très dépendante des ressources naturelles. Les bouleversements actuels sur le marché de l’énergie, avec l’avènement du gaz et du pétrole de schiste, menacent la puissance russe, qui a besoin de trouver de nouveaux champs à exploiter. L’Arctique et la mer de Pechora sont un Eldorado glacé.
Mais le forage lui-même coûte une fortune, et les technologies nécessaires ne sont pas encore satisfaisantes. Gazprom Neft, qui possède le site de Prirazlomnaya, essaie d’ailleurs de convaincre les autorités de lui accorder des conditions fiscales privilégiées, afin que la marge dégagée soit plus conséquente. Le montant total des investissements a été estimé entre 4 milliards et 5 milliards de dollars (3 milliards et 3,7 milliard d’euros).
VÉTUSTÉ DES INSTALLATIONS
En 2012, Gazprom avait retardé le début des travaux de forage pour des raisons de sécurité, après une première opération de Greenpeace, en août, qui avait pris d’assaut la plate-forme de Prirazlomnaya. L’organisation avait publié une lettre du ministère russe des situations d’urgence, qui montrait que le plan de réponse à un éventuel déversement pétrolier n’avait pas été révisé. Les organisations écologistes dénoncent la vétusté de certaines pièces de la plate-forme, qui proviendraient d’autres sites, ainsi que la faiblesse des scénarios de crise envisagés dans les plans d’urgence. Que faire si une grande quantité de pétrole se répand sous la glace ? Comment intervenir dans la nuit polaire, par – 60 °C ? Le 1er juillet, une loi rendant responsables les compagnies pour ce genre de catastrophe est entrée en vigueur.
Les propos rassurants tenus par les autorités au sujet des précautions prises pour toute opération de forage dans l’Arctique laissent de nombreux experts sceptiques. La Russie a créé une journée de l’écologie, le 5 juin, mais cette fête reste purement symbolique. La protection de l’environnement n’a jamais été une préoccupation ni un mouvement politique. Depuis l’époque soviétique, l’Etat fonctionne par grands projets, souvent au mépris des hommes et de l’environnement. Les Jeux olympiques de Sotchi, qui auront lieu en février 2014, en sont une illustration. Dans ce contexte, les organisations de défense de l’environnement, comme Bellona ou Greenpeace, subissent une forte pression de l’administration. Sans parler des militants en région, qui dénoncent les constructions illégales ou les expropriations de terrain.
Lire : » En Russie, l’équipage de l' »Arctic-Sunrise » placé en détention provisoire«
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Frédéric Baylot
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Résistance Inventerre 