Japon-Chine – Tensions sur les Senkaku, l’Onu invite à négocier – La Chine s’arroge l’espace aérien des îles Senkaku

Deux bombardiers américains B-52 non armés ont survolé les îles Senkaku- Diaoyu, objet d’un conflit territorial sino-japonais, sans en informer Pékin, qui avait annoncé ce week-end la mise en place d’une « zone de défense » dans l’espace aérien de l’archipel.
 Ce survol lundi soir n’a donné lieu à aucune réaction chinoise, selon le département de la défense américain. La Maison Blanche a quant à elle invité la Chine à résoudre son contentieux avec Tokyo sans recourir « à des menaces ni à des propos incendiaires ».
 Les autorités chinoises ont menacé samedi de prendre des « mesures défensives d’urgence » contre les avions qui ne respecteraient pas ses nouvelles règles d’identification dans l’espace aérien des îles Senkaku-Diaoyu, situées au sud-ouest du Japon, à 330 kilomètres des côtes  chinoises.
 Le gouvernement japonais a mis en garde contre les conséquences imprévisibles de la mise en œuvre des nouvelles mesures chinoises. Tokyo renforce par ailleurs ses moyens militaires pour contrer la menace chinoise. Le secrétaire à la défense américain, Chuck Hagel, a quant à lui parlé de « tentative de déstabilisation pour modifier le statu quo existant dans la région ». Les deux principales compagnies aériennes du Japon, ANA et Japan Airlines, ont par ailleurs accédé à la demande du gouvernement japonais qui les a invitées à ne plus soumettre leurs plans de vol à la Chine pour la zone contestée.
 L’ONU a suggéré à Tokyo et à Pékin de trouver une solution « par des négociations, dans le respect des lois internationales », a déclaré le porte-parole de Ban Ki-moon, M. Nesirky.
Le Monde 27/11/2013

La Chine s’arroge l’espace aérien des îles Senkaku

LE MONDE | 25.11.2013  | Par Philippe Mesmer (Tokyo, correspondance) et Brice Pedroletti (Pékin, correspondant)

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Un avion de la défense japonaise survole les îlots Senkaku/Diaoyu, en octobre 2011. | AP
L’annonce, samedi 23 novembre de la création par Pékin d’une zone de défense aérienne en mer de Chine orientale, a fait monter d’un cran les tensions en Asie de l’Est.
Premier concerné, le Japon a protesté contre la création de cette zone incluant les îlots Senkaku (appelés Diaoyu par les Chinois), sous son administration mais revendiqués par la Chine et Taïwan. « C’est une décision unilatérale qui nous amène à redouter des événements imprévisibles dans la zone », a déclaré le 24 novembre le chef de la diplomatie japonaise Fumio Kishida, qui s’est dit prêt à protester au plus haut niveau.
Le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, a critiqué une action « unilatérale » à même d’« exacerber les risques d’incident ». Chuck Hagel, secrétaire à la défense, a rappelé que les Senkaku-Diaoyu restaient concernés par l’alliance de sécurité nippo-américaine.
Séoul a également exprimé ses « regrets », car la nouvelle zone empiète sur celle de la Corée du Sud en mer Jaune. Elle inclut le rocher immergé appelé Ieodo dans la péninsule, revendiqué par la Chine qui l’appelle Suyan.
Les Senkaku-Diaoyu, potentiellement riches en matières premières, attisent les tensions sino-japonaises depuis leur nationalisation par l’Archipel en septembre 2012. Tokyo a racheté trois des cinq îles – sous contrôle nippon depuis leur restitution par les Etats-Unis en même temps qu’Okinawa en 1972 – à leur propriétaire privé, une initiative à l’origine de violentes manifestations antijaponaises en Chine.
LE JAPON  » HYPOCRITE ET IMPUDENT « 
Le 25 novembre, le Japon a été qualifié d’« hypocrite et impudent » par le quotidien chinois Huanqiu Shibao (Global Times) dans un éditorial. Pékin a également enjoint les Etats-Unis à « corriger leur erreur et cesser de faire des remarques irresponsables ».
La veille, l’agence officielle Chine nouvelle reprochait à Tokyo d’avoir « brisé le statu quo en place depuis plusieurs décennies », en « prenant l’initiative unilatérale de nationaliser les îles il y a un an ». Depuis le traité de paix et d’amitié sino-japonais de 1978, le différend des îles Senkaku-Diaoyu ne devait pas, d’un commun accord, perturber les relations bilatérales.
En créant la zone, la Chine s’estime dans ses droits : Pékin n’a « aucune intention de générer des tensions, selon l’agence Chine nouvelle, qui rappelle que vingt pays ont créé de telles zones depuis les années 1950. L’initiative de la Chine est de défendre ses droits légitimes et de protéger ce qui lui a toujours appartenu. »
La décision chinoise suit une série d’initiatives prises depuis la nationalisation des îles pour faire monter les enchères. Pékin a soumis pour la première fois une demande officielle de reconnaissance des Senkaku-Diaoyu aux Nations unies à l’automne 2012, puis chargé ses garde-côtes de patrouiller plusieurs fois par semaine autour des îlots. Les Japonais répondent en envoyant leurs propres garde-côtes. Dans le même temps, l’aviation chinoise n’a cessé de faire prendre à ses appareils un « cap convergent » vers les îles – c’est-à-dire sans pénétrer dans l’espace aérien japonais, mais forçant les chasseurs japonais à se préparer au décollage d’urgence.
PÉKIN POUR UNE CO-ADMINISTRATION
Cette stratégie chinoise vise à faire reconnaître à Tokyo, qui s’y refuse, le fait que les îles sont bien un territoire maritime contesté. Il s’agit pour Pékin d’imposer un nouveau statu quo, celui d’une co-administration des Senkaku-Diaoyu.
Le Japon, de son côté, a lancé une campagne de communication visant à faire reconnaître ses droits sur ces îles. (1) Le 16 octobre, le gouvernement a mis en ligne une vidéo expliquant « objectivement » la position nippone. L’initiative a vivement irrité Pékin.
Tokyo doit également dévoiler début décembre sa nouvelle stratégie de défense pour les dix années à venir. Le renforcement des moyens d’intervention pour protéger les « îles isolées du sud-ouest » – dont font partie les Senkaku-Diaoyu – devrait y occuper une place prépondérante.
L’importance croissante prise par le domaine aérien dans ce jeu du chat et de la souris autour des Senkaku-Diaoyu est ce qui inquiète le plus les experts : les risques d’accrochage y sont beaucoup plus élevés que sur mer. Masahiko Komura, ancien chef de la diplomatie nippone, a appelé, le 24 novembre, les responsables de la défense des deux pays à rester en contact étroit pour « éviter que la situation s’envenime ».
Philippe Mesmer (Tokyo, correspondance) Journaliste au Monde et Brice Pedroletti (Pékin, correspondant) Journaliste au Monde
 (1) Sur Inventerre : Japon – îles Senkaku : Ichiro Komatsu présente ici les faits historiques, regrettant que l’ambassadeur de Chine en France (Le Monde du 31 octobre) est pour le moins une mémoire sélective.

A propos kozett

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