Petit manuel de désobéissance citoyenne – précieux conseils dispensés à ces lutteurs de l’impossible : les lanceurs d’alerte

LE MONDE | 05.03.2014 | Par Gérard Davet et Fabrice Lhomme

Protéger les lanceurs d’alerte

alemonde_petit-manuel-de-desobeissance-citoyenne_dd43982a8730317cd5e5c6143ed111e0

aMaitre_William_Bourdon_GabonMaître William Bourdon est un gêneur patenté. Un avocat parisien aux convictions sociales et politiques certaines. Il n’aime pas l’ordre établi, l’argent sale, les dictateurs africains, les hommes politiques corrompus, les systèmes répressifs.
Aussi ne faut-il pas s’étonner quand il publie un ouvrage documenté, instructif, intitulé Petit manuel de désobéissance citoyenne. Il y est question d’un sujet qui le taraude. Comment protéger sur le plan juridique ceux qui, un jour, décident de se révolter contre un ordre illégal, ou, mieux, en viennent à révéler des secrets d’Etat ?
Dans ce livre, de précieux conseils sont dispensés à ces lutteurs de l’impossible. On y croise des figures désormais connues : Irène Frachon, ce médecin qui révéla les dangers du Mediator, Edward Snowden, cet espion qui mit au jour les sales méthodes de la NSA, ou encore Hervé Falciani, l’informaticien de HSBC, qui pourfend les dérives des banques suisses. Me Bourdon sait de quoi il parle, il est le défenseur d’Hervé Falciani. Ce qui lui ôte évidemment une objectivité qu’il ne revendique pas…
« DÉLÉGITIMER LA DÉMOCRATIE »
La problématique est ancienne. Mais l’auteur stigmatise de « nouvelles formes de collusion entre l’argent et les pouvoirs qui ont contribué à délégitimer la démocratie ». En ces époques arides, la soif de démocratie demeure, pourtant. « L’exception de citoyenneté », ce concept cher à William Bourdon, compte de vrais héros. Ainsi, ce petit juge provincial, Paul Magnaud, qui relaxa en 1898 Louise Ménard, coupable d’avoir volé un pain, au motif qu’elle et son enfant n’avaient pas mangé depuis 36 heures.
Et les lanceurs d’alerte, ces anonymes qui deviennent fameux en révélant les turpitudes du système. Me Bourdon soumet une vraie idée, en examinant les lois en vigueur chez nos voisins. Prenez le Luxembourg, qui dispose d’une loi exemplaire pour protéger les lanceurs d’alerte. Une forme de leurre, puisque dans ces pays personne n’a intérêt à briser l’omerta. En France, une loi, votée en décembre 2013, permet à ces « saints qui sont aussi des traîtres », d’être protégés sur le plan juridique, s’ils font montre de leur bonne foi. Ce n’est certes pas suffisant, assure l’auteur.
Qui appelle donc de ses vœux la création d’une autorité administrative indépendante, protectrice. En attendant, Me Bourdon recommande aux lanceurs d’alerte de s’appuyer sur leur réseau relationnel. Et de solliciter des avis juridiques, tout en faisant appel à des relais médiatiques. Bref, de s’entourer, avant de dénoncer.

Petit manuel de désobéissance citoyenne par William Bourdon
Jean-Claude Lattès, 218 pages, 12,5 €
Gérard Davet Journaliste au Monde

A propos kozett

Deux phénomènes peuvent amener à une manipulation dans la prise en compte des informations par notre conscience : --> Le mirage qui voile et cache la vérité derrière les brumes de la sensiblerie et de la réaction émotionnelle. --> L’illusion qui est une interprétation limitée de la vérité cachée par le brouillard des pensées imposées. Celles-ci apparaissent alors comme plus réelles que la vérité qu’elles voilent, et conditionnent la manière dont est abordé la réalité … A notre époque médiatisée à outrance, notre vigilance est particulièrement requise !
Cet article, publié dans Débats Idées Points de vue, Justice, Résistance, est tagué , . Ajoutez ce permalien à vos favoris.