« Apocalypse première guerre mondiale « – Pourquoi rajouter des effets « hénaurmes » qui noient le propos sous des déflagrations électroniques : Double fracas

MACHARDCHRO+CRP1_ori_jpg_180Le Monde | 19.03.2014 |
France 2 lançait, mardi 18 mars à 20 h 45, les deux premiers épisodes d’« Apocalypse, la première guerre mondiale », une série de cinq films historiques de Daniel Costelle et Isabelle Clarke.
Certes, il s’agit d’un travail de titan qui a nécessité la consultation et la restauration de quelque 500 heures d’archives.

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Mais l’impression que donnent les deux premiers épisodes, intitulés Furie et Peur, est celle d’un déjà-vu : images colorisées, récit dit d’une voix neutre (celle de l’acteur et réalisateur Mathieu Kassovitz), le tout débité à la manière des bons vieux manuels d’histoire-géographie de nos écoles d’antan.
Mais la chose a du bon et il n’y a rien de contestable à refaire, à l’usage des jeunes générations notamment, le déroulé de cette extraordinaire et monstrueuse période qui, comme beaucoup de guerres, commence un été, dans une quiétude que rien ne semble devoir déranger, et se poursuit dans un emballement et un carnage incontrôlables avant de s’enliser.
De ce point de vue, l’aspect pédagogique du travail de Daniel Costelle et Isabelle Clarke est à saluer, et le récit façon « grande fresque » risque de réunir un grand nombre de téléspectateurs.
Je suis en général réfractaire à la colorisation des images d’archives, mais elle a pour avantage de rapprocher notre époque de celle que connurent nos arrière-grands-pères : qui, parmi la génération des cinquantenaires, n’a pas connu ces douilles d’obus, sculptées ou non, que les poilus rescapés de cette boucherie monumentale et absurde ont si souvent placées sur leur cheminée ? Un siècle, ce n’est rien, au fond, comme le rappellent ces visages, ces corps si proches et si familiers, que le noir et blanc originel des caméras cantonnent d’ordinaire dans un passé lointain et mythique.
DES EFFETS « HÉNAURMES »
On comprendra que, pour accompagner ces images d’horreur, il fallait autre chose que les nombreuses chansons faussement guillerettes de l’époque. Mais pourquoi rajouter des effets « hénaurmes » qui noient le propos sous des déflagrations électroniques, des percussions synthétiques ?
Ce type d’illustration sonore est devenu une redoutable engeance qui colle aux images de films de guerre ou d’action, de séries policières comme à celles de « Top Chef », où la moindre larme d’un candidat malheureux est accompagnée d’une soupe musicale dégoulinante, et le suspense ponctué par des rythmes ahanants et assourdissants. (Preuve que ces illustrations sont interchangeables : les crédits précisent que certaines « musiques additionnelles » ont été empruntées à la bande originale d’« Apocalypse, la deuxième guerre mondiale », réalisée en 2008 par les mêmes auteurs.)
Je le répète ici depuis des mois : le film documentaire français prend un tour inquiétant. Par peur d’ennuyer, il joue une carte populiste et se transforme en pâle imitation d’un blockbuster américain.
Renaud Machart Journaliste au Monde
noteOuf ! c’est la réflexion que je me fais à chaque rendez-vous avec la télé ! Il n’y a pas qu’Apocalypse ou l’on perd des mots en raison du bruit assourdissant des musiques. grrrrrrrrrr

A propos kozett

Deux phénomènes peuvent amener à une manipulation dans la prise en compte des informations par notre conscience : --> Le mirage qui voile et cache la vérité derrière les brumes de la sensiblerie et de la réaction émotionnelle. --> L’illusion qui est une interprétation limitée de la vérité cachée par le brouillard des pensées imposées. Celles-ci apparaissent alors comme plus réelles que la vérité qu’elles voilent, et conditionnent la manière dont est abordé la réalité … A notre époque médiatisée à outrance, notre vigilance est particulièrement requise !
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