Le Soir 05/062014 Edito François Mathieu rédacteur en chef adjoint
Un Depardieu ou un Arthur qui s’exile en Belgique, et un torrent de critiques acerbes s’abat sur eux. On ne va pas les plaindre. Les railleries, c’est le minimum minimorum à payer face aux nombreuses possibilités – légales – d’évasion fiscale en Europe.
Là est le problème, évidemment. Aujourd’hui, que l’on soit en société ou en personne physique, dans une Europe en proie à de réelles difficultés budgétaires et économiques, il reste possible de faire son shopping fiscal sans que personne ne puisse trouver à y redire. C’est choquant, à tout le moins interpellant.
Le récent résultat des élections européennes est là pour le rappeler violemment : la montée de l’euroscepticisme et des extrémismes n’est pas seulement le fait d’une crise financière sans précédent. Dans des pays comme le Danemark ou l’Autriche, qui ont fort bien résisté à la crise et qui se portent « socialement » mieux que la plupart de leurs pairs en Europe, le rejet d’une Europe unie et solidaire était tout aussi palpable qu’en France ou en Grande-Bretagne.
Le mal est plus profond. Crise d’identité, crise de croissance… Crise de foi en l’Europe, laquelle cristallise un rejet profond d’une partie grandissante de la population qu’il serait suicidaire de ne pas prendre en considération. Certains diront qu’il est facile de blâmer l’institution « Europe ». Mais comment faire autrement quand un contribuable nanti peut se permettre « d’optimiser » la gestion de son patrimoine en s’asseyant allègrement sur toute forme de solidarité ?
Comment ne pas crier « haro » sur l’Europe quand une entreprise peut exercer son activité principale dans un Etat-membre (et, parfois, y recevoir des subsides plantureux) et remplir – parcimonieusement – les caisses fiscales d’un autre Etat-membre ?