Solidarité – Aider les réfugiés syriens est une obligation morale

Le Monde.fr | 05.01.2015
Editorial – Dans son message de Noël, le pape François a de nouveau fustigé l’indifférence de la communauté internationale face au sort des réfugiés syriens. Au diapason de ce qu’il avait déclaré devant le Parlement européen à Strasbourg, fin novembre 2014, le pape a souhaité que « l’indifférence se change en proximité et le refus en accueil, pour que tous ceux qui à présent sont dans l’épreuve puissent recevoir les aides humanitaires nécessaires pour survivre à la rigueur de l’hiver, revenir dans leur pays et vivre avec dignité ».
A l’heure où les populations syriennes fuient massivement leur pays en guerre depuis près de quatre ans, l’Europe étant confrontée à un afflux de réfugiés, on garde en mémoire la phrase prononcée par Michel Rocard, en 1990, selon laquelle « la France ne peut accueillir toute la misère du monde ». Mais on a oublié la conclusion de l’ancien premier ministre : la France « doit savoir prendre fidèlement sa part ».
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La France répond-elle à l’appel au secours du peuple syrien ? Au regard des chiffres, la réponse est négative. La France n’est pas exemplaire, alors qu’on est en droit d’attendre d’elle davantage de solidarité. Seuls 2 000 Syriens ont obtenu la protection de la France en 2014, selon l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Un chiffre faible, qui place pourtant la Syrie au quatrième rang des pays demandeurs d’asile en France.
Même s’ils l’obtiennent dans 96 % des cas, tous les Syriens ne demandent pas forcément le statut de réfugié ou la protection subsidiaire. Autant entrent chaque année sur des statuts d’une autre nature, comme celui d’étudiant. En plus, la France a accepté, en 2014, à la suite de la demande du commissaire aux réfugiés, d’accueillir 500 réfugiés sélectionnés par le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR). Le pays des droits de l’homme a ainsi ouvert ses portes à quelque 4 000 Syriens en 2014. Un nombre à mettre en regard avec les 3,3 millions de Syriens réfugiés de par le monde.
La part de la France
La plupart de ceux qui ont fui le conflit se sont installés dans les pays voisins. La Turquie en compte 1,6 million, le Liban 1,5 million, la Jordanie 600 000. Selon Amnesty International, parmi ceux qui participent à cet exode massif, seuls 4 % franchissent les frontières de l’Europe. Et parmi eux, comme l’a noté François Hollande sur France Inter, lundi 5 janvier, bien peu choisissent la France. Leur préférence va à la Suède, aux Pays-Bas et surtout à l’Allemagne. La situation de l’emploi, la présence d’une forte communauté de Syriens, notamment en Bavière, sont des éléments attrayants. A contrario, la réputation de lenteur du système français d’asile fonctionne comme un repoussoir. Il faut aujourd’hui en moyenne dix-neuf mois pour obtenir un statut de réfugié en France, contre neuf mois dans la plupart des pays européens. Un projet de loi, adopté en première lecture à l’Assemblée, en décembre, vise à réduire ces délais.
« Il faut faire barrage aux passeurs », a lancé Antonio Gutteres, haut-commissaire de l’ONU pour les réfugiés, dans un entretien au Temps du 5 janvier. L’ancien premier ministre portugais critique sévèrement le manque de coordination entre pays européens. Ces derniers jours, la marine italienne a sauvé plus de 1 200 personnes sur des cargos à la dérive. Face à l’ampleur du drame des réfugiés, une action concertée des membres de l’Union européenne est une obligation morale. Et la France doit prendre fidèlement sa part.

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