La mort du roi d’Arabie saoudite provoque un déluge de déclarations hypocrites

Le Canard Enchaîné 28 janvier 2015 – Claude Angeli
A la tribune du Forum économique de Davos, le 23 janvier, François Hollande a singé sa propre marionnette : « Je vous appelle, forces vives du monde, chefs des plus grandes entreprises de la planète, à l’engagement. J’appelle le système financier (sic) à couper les sources d’alimentation du terrorisme« . Puis, avant de s’envoler pour l’Arabie saoudite, où il devait présenter ses condoléances au successeur du roi Abdallah, le Président a évoqué les « relations de confiance, y compris pour lutter contre le terrorisme« , qu’il entretenait avec le défunt Sans mesurer le ridicule d’une telle affirmation.
101757266_oToujours à Davos, Christine Lagarde, la patronne du FMI, en grande forme a lancé, évoquant le roi Abdallah : « C’était, d’une façon très discrète, un grand défenseur des femmes. C’était très progressif, ce qui est probablement mieux pour ce pays, mais il y croyait fermement…« . Barack Obama et le vice-président Jo Biden, David Cameron, le président d’Israël, ont eux aussi rendu hommage au vieux roi, et tenu honorablement leur rang dans ce bal des hypocrites. Quitte à faire hausser les épaules ou hurler de rire, diplomates et chefs de service de renseignement, qui savent, eux, ce que le terrorisme doit à la famille royale saoudienne et à feu son monarque.
A Paris, au ministère de la Défense, on se souvient encore d’une étude stratégique transmise à l’état-major des armées et à la hiérarchie militaire en octobre 2013. Un document de 75 feuillets où l’on pouvait découvrir cet hommage aux parrains du djihad : « Avec l’appui financier et logistique des monarchies du Qatar et de l’Arabie saoudite, se sont formés des sanctuaires (notamment au sud de la Libye) constituant autant de bases arrière pour des groupes salafistes armés engagés au Mali et en Syrie.« 
Mutisme présidentiel
Au fil des ans, Hollande recevra des dizaines de notes alarmantes de la DGSE ou en provenance des services alliés sur le comportement de nos amis pétroliers, mais il aura toujours quelque peine à le reconnaître. Ainsi, le 17 mai 2014, à la fin d’un sommet franco-africain, il faudra que deux journalistes de France 24 le harcèlent pour qu’il accepte de parler de « ces organisations humanitaires qui aident les djihadistes« , avant d’admettre : « J’ai averti les pays du Golfe, qui pouvaient un moment (sic) pour prodiguer leur générosité (re-sic) utiliser ces organisations, de cesser [tout financement de ce genre]. Un aveu présidentiel, sans qu’il soit question de citer l’Arabie saoudite ou le Qatar.

CHARMEUR DE SERPENT

Un calife bien ingrat
Ce n’est pas le cas de deux hommes politiques américains Le premier, Bob Graham, qui a dirigé la commission d’enquête sur les attentats du 11 septembre a décrit, voilà quatre mois, la « part d’ombre » de l’Arabie saoudite, toujours épargnée par les Occidentaux alors qu’elle a longtemps financé les djihadistes sunnites, puis, plus récemment, ceux de l’État islamique.
Second spécialiste américain du financement terroriste, David Cohen, sous-secrétaire d’État au Trésor, a admis, en octobre, que des organisations dites humanitaires et des personnalités privées, originaires du Golfe, avaient « alimenté » les combattants de l’État islamique. Mais il arrive parfois aux ingrats de cracher sur la main qui les a nourris : le calife Ibrahim, chef autoproclamé de l’État islamique, par exemple. Durant l’été 2014, cet insolent a soudain annoncé que ses troupes entreraient en Arabie saoudite et marcheraient sur La Mecque, après avoir conquis Bagdad. Inquiet, le roi Abdallah a aussitôt ordonné de fortifier quelque 1 000 kilomètres de frontières et a rejoint la coalition dirigée par les États-Unis, en compagnie du Qatar, du Koweït et des Émirats arabes unis. Depuis, des avions saoudiens bombardent, de temps à autre, ces djihadistes qui n’ont même pas la reconnaissance du ventre.

A propos werdna01

Hors des paradigmes anciens et obsolètes, libérer la parole à propos de la domination et de l’avidité dans les domaines de la politique, de la religion, de l’économie, de l’éducation et de la guérison, étant donné que tout cela est devenu commercial. Notre idée est que ces domaines manquent de générosité et de collaboration.
Cet article, publié dans International, Politique, est tagué . Ajoutez ce permalien à vos favoris.