5 questions sur la nouvelle loi limitant l’exposition aux ondes électromagnétiques

Le Monde /Planète – 24/01/2015 – Par Audrey Garric et Pierre Le Hir
Des antennes de télévision sur des toits.
Des antennes de télévision sur des toits. | REUTERS/© Marcelo Del Pozo / Reuters
Un an après un « enterrement de première classe » aux yeux des écologistes, l’Assemblée a adopté, jeudi 23 janvier, une proposition de loi de compromis pour limiter l’exposition aux ondes électromagnétiques générées par les technologies sans fil – téléphones mobiles, tablettes, Wi-Fi.
Ce texte écologiste, fruit d’un an de travail avec les socialistes et le gouvernement, apparaît comme un « compromis constructif » et « une première réponse » aux préoccupations portant sur les ondes, selon le ministre de l’écologie, Philippe Martin. Les opérateurs des télécoms, au contraire, craignent qu’il n’entrave le développement de ce secteur, en faisant naître des « peurs irraisonnées ».
Que prévoit la loi adoptée par les députés ?
La « modération » est le maître mot de la loi « relative à la sobriété, à la transparence et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques ». Cette modération ne conduira pas à abaisser les seuils réglementaires d’exposition de la population, mais vaudra surtout pour les « points atypiques », où « les niveaux d’exposition dépassent sensiblement la moyenne observée à l’échelle nationale ». Selon Fleur Pellerin, ministre déléguée à l’économie numérique, citée dans Le Parisien du 23 janvier, « autour d’un millier de sites » sont concernés.
Pour les téléphones portables, les fabricants devront préconiser l’usage d’un kit mains libres. Toute publicité ciblant les moins de 14 ans sera également interdite. S’agissant des enfants, la proposition de loi initiale des écologistes visait à interdire les équipements Wi-Fi dans tous les établissements d’accueil des moins de 6 ans. Mais le gouvernement a fait voter un amendement qui restreint cette mesure aux moins de 3 ans, c’est-à-dire aux crèches et aux garderies. Elle ne concernera donc pas les écoles maternelles.
Enfin, au sujet des personnes souffrant d’électrohypersensibilité aux champs électromagnétiques, le gouvernement devra remettre au Parlement un rapport traitant, en particulier, de « l’opportunité de créer des zones à rayonnements électromagnétiques limités, notamment en milieu urbain », ainsi que des « conditions de prise en compte » de leurs difficultés en milieu professionnel.
Lire (édition abonnés) : Les députés votent une loi a minima sur les ondes
Quelles sont les principales sources d’exposition aux ondes ?
Les ondes sont extrêmement présentes dans notre environnement quotidien. Tous les appareils électriques sous tension créent en effet un champ électromagnétique. La principale source d’exposition est de « très loin » le téléphone portable, selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Les antennes-relais pour la téléphonie mobile, qui se développent très rapidement avec le déploiement de la 4G, génèrent également des ondes, bien que l’exposition moyenne soit bien inférieure aux téléphones. A l’extérieur, les lignes électriques, transformateurs ou voies ferrées sont aussi des sources de rayonnements électromagnétiques.
Enfin, tous les appareils connectés de notre environnement personnel nous exposent aux radiofréquences : les ordinateurs et tablettes, les technologies Wi-Fi, Bluetooth et RFID (Radio Frequency Identification, ou puces électroniques), mais aussi les lampes fluorescentes, les fours à micro-ondes, les plaques à induction ou les machines à laver.
Carte de densité des antennes-relais Carte de densité des antennes-relais | Le Monde
Quel est leur impact sanitaire ?
Si cette question controversée génère une littérature scientifique foisonnante, elle n’a toujours pas été tranchée. En mai 2011, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), agence de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a classé les ondes électromagnétiques comme « cancérogène possible » en raison d’études évoquant une possible augmentation du risque de tumeur cérébrale pour des utilisateurs intensifs (à partir de 30 minutes quotidiennes).
Deux ans plus tard, dans une analyse publiée en octobre 2013, évaluant plus de 300 études internationales, l’Anses pointe, avec des niveaux de preuve limités, des effets biologiques chez l’homme ou chez l’animal, concernant le sommeil, la fertilité mâle ou encore les performances cognitives. Malgré tout, « les conclusions de l’évaluation des risques ne mettent pas en évidence d’effets sanitaires avérés », estime-t-elle.
L’Anses insiste toutefois sur « le développement massif des technologies recourant aux radiofréquences et conduisant à une exposition intensive de la population, le cas échéant des personnes les plus sensibles, et à laquelle elle ne peut se soustraire ». Le déploiement de la 4G « devrait s’accompagner d’une augmentation de l’exposition du public », ajoutent les experts de l’agence. L’Anses invite alors de manière générale à « limiter les expositions de la population », en particulier par le biais des téléphones portables, et incite à l’utilisation d’une oreillette.
Lire : Ondes : pas d’effets avérés sur la santé, mais mieux vaut limiter son exposition
Faut-il abaisser les valeurs limites d’exposition ?
L’exposition aux ondes électriques est mesurée en volt par mètre (V/m). En France, les valeurs limites d’exposition du public ont été fixées par un décret de 2002, qui transpose dans le droit national une recommandation européenne de 1999.
Pour la téléphonie mobile, ces seuils dépendent de la bande de fréquence utilisée par les antennes-relais. Ils sont de 41 V/m ou 58 V/m pour la téléphonie mobile 2G, et de 61 V/m pour la 3G ; la 4G s’inscrit aussi dans cette fourchette. Les associations « anti-ondes », prônant la mise en œuvre du principe de précaution « Alara » (As Low As Reasonably Achievable, aussi bas que raisonnablement possible), demandent un abaissement de la limite d’exposition à 0,6 V/m, un niveau recommandé en 2011 par le Conseil de l’Europe.
L’exposition moyenne sur le territoire français est en réalité très inférieure aux seuils réglementaires, puisqu’elle est de 1 V/m. Mais il ne s’agit que d’une moyenne. Selon une étude du Comité opérationnel sur les ondes de téléphonie mobile (Copic), portant sur seize communes représentatives des différents environnements, environ 90 % des niveaux d’exposition sont inférieurs à 0,7 V/m et 99 % à 2,7 V/m. Toutefois, des pics sont observés, jusqu’à 10 V/m. La même étude conclut qu’un abaissement de l’exposition à 0,6 V/m entraînerait « une forte détérioration de la couverture du réseau, en particulier à l’intérieur des bâtiments », qu’il faudrait compenser par une multiplication au moins par trois du nombre d’antennes-relais. L’Anses considère également qu’il n’a pas de « base sanitaire » à ce seuil de 0,6 V/m.
Lire : Pour réduire les ondes électromagnétiques, il faut trois fois plus d’antennes-relais
Les écologistes et les associations considèrent pourtant qu’une réduction des seuils est possible. Huit pays membres de l’Union européenne (Belgique, Bulgarie, Grèce, Italie, Lituanie, Luxembourg, Pologne, Slovénie) ont adopté des limites plus restrictives que la France, notamment dans les « lieux de vie » et les « lieux sensibles ». C’est aussi le cas de la Suisse et du Liechtenstein.
Quelles sont les revendications des électrohypersensibles ?
Les personnes électrohypersensibles (EHS) souffrent de diverses pathologies (maux de tête, réactions cutanées, insomnies, tachycardie, etc.) qu’elles attribuent aux champs électromagnétiques. Cette maladie non reconnue en France toucherait 3 % de la population selon les associations – un chiffre impossible à confirmer en l’absence d’évaluation nationale. Soutenus par une quinzaine de collectifs (Une terre pour les EHS, Robin des toits, Priartem), les EHS, dont certains sont obligés de vivre en marge de la société, demandent la mise en place « urgente » de zones blanches, vierges d’ondes.
Lire le reportage : Les électrosensibles à la recherche d’une terre vierge de toute onde
Et les témoignages : Ces malades des ondes électromagnétiques, qui « survivent »
En octobre, une petite commune des Hautes-Alpes, soutenue par la députée européenne EELV Michèle Rivasi, a annoncé son souhait de créer la première zone blanche de France, afin d’accueillir une trentaine de personnes pour une durée limitée. Au stade du projet, le site qui nécessite des aménagements, notamment l’enfouissement d’une ligne électrique et d’un transformateur, ainsi que l’installation d’un chauffage au gaz pour les personnes intolérantes aux émissions d’ondes électriques, pourrait voir le jour dans deux ou trois ans, a évoqué l’eurodéputée.
Lire : Ondes : une commune des Hautes-Alpes veut créer la première zone blanche de France



require([« lib/require/plugin/domReady! », »lmd/ui/ie9-pinning »],function(b,a){a.start()});

A propos werdna01

Hors des paradigmes anciens et obsolètes, libérer la parole à propos de la domination et de l’avidité dans les domaines de la politique, de la religion, de l’économie, de l’éducation et de la guérison, étant donné que tout cela est devenu commercial. Notre idée est que ces domaines manquent de générosité et de collaboration.
Cet article, publié dans Industrie, Santé, est tagué , , . Ajoutez ce permalien à vos favoris.