Détective privé – Enquêter peut être risqué

La Nle République 02/03/2015

 L’homme qui vous observe sans que vous le sachiez

DETECTIVE PRIVE

Il faut un peu de patience et beaucoup de discrétion pour réussir une filature. De jour comme de nuit. – (Photo NR, Jérôme Dutac
Il est arrivé tout en noir. Pas étonnant pour cet homme habitué à travailler dans l’ombre. Bertrand (*), 60 ans, est le seul détective privé du département. « On dit enquêteur », précise ce père de famille à l’apparence d’un rockeur retraité, crâne rasé, fines lunettes et tatouage à l’intérieur du bras.
«  Pour réussir à les semer j’ai dû rouler à plus de 200 km/h sur des petites routes  »
L’homme a conscience d’exercer « une activité qui fait fantasmer les gens ». Lui se décrit comme « un leveur de doutes », s’occupant « des affaires des autres seulement » lorsqu’il est « payé pour le faire ». Peu de personnes savent comment il occupe ses journées. « Je raconte que je suis commercial. » Quand Bertrand dit la vérité, cela suscite méfiance ou curiosité. Même sa femme ne connaît pas les détails de son métier. « Je lui dis où je vais mais rarement pourquoi. Elle sait simplement qui prévenir si elle ne me voit pas revenir. »
Enquêter peut être risqué. « On ne sait jamais ce qu’on va trouver. » Ni sur qui on va tomber. « Récemment, je cherchais un endroit tranquille pour observer une voiture. C’était en pleine nuit, au sud de Blois. En arrivant, doucement, au bord d’un étang, j’ai vu une quinzaine de gars. Ils semblaient dealer. J’ai fait marche arrière. Quelques instants plus tard, deux BMW me suivaient. La course-poursuite a duré quinze minutes. Pour réussir à les semer, j’ai dû rouler à plus de 200 km/h sur des petites routes. Heureusement qu’il n’y avait pas de radar automatique… »
Au volant de sa puissante Audi, Bertrand sillonne les routes de la région, évitant toutefois « certains quartiers de Blois et Orléans ». Trop dangereux. Les deux tiers de ses affaires concernent des entreprises, « essentiellement pour des vols ». Le reste du temps, il est appelé pour des histoires de cœur avec, souvent, les enfants comme source de conflit. Il peut aussi être contacté par des familles cherchant à comprendre le suicide d’un proche. « Avant d’accepter un dossier, je passe du temps au téléphone. J’écoute. Il faut que ce soit légal et légitime, sinon je n’interviens pas. Dans ce cas, je contacte les services sociaux pour aider ces personnes à sortir de la détresse dans laquelle elles sont. »
Bertrand dit recevoir « parfois dix appels par mois, parfois zéro ». Certains sont plutôt insolites. « On m’a déjà demandé d’aller récupérer un chat après une séparation difficile. J’ai refusé. » L’enquêteur privilégie la qualité à la quantité, quitte à ne pas gagner confortablement sa vie. « Dans les grandes villes, on peut avoir beaucoup de demandes. Mais pas dans nos campagnes. C’est mieux d’exercer une autre activité à côté. » Pour l’instant, Bertrand ne fait rien d’autre. Mais cela pourrait changer. Il n’a « pas beaucoup de boulot en ce moment ». Alors il patiente, comme souvent. Après une heure d’entretien, il est reparti comme il est arrivé. Discrètement. Un fantôme qui, peut-être, vous observe sans que vous le sachiez.
(*) Le prénom a été modifié pour préserver l’anonymat
Anthony Fillet
Loir-et-Cher
spy1Pour en savoir plus :Les coulisses du métier de détective privé

A propos kozett

Deux phénomènes peuvent amener à une manipulation dans la prise en compte des informations par notre conscience : --> Le mirage qui voile et cache la vérité derrière les brumes de la sensiblerie et de la réaction émotionnelle. --> L’illusion qui est une interprétation limitée de la vérité cachée par le brouillard des pensées imposées. Celles-ci apparaissent alors comme plus réelles que la vérité qu’elles voilent, et conditionnent la manière dont est abordé la réalité … A notre époque médiatisée à outrance, notre vigilance est particulièrement requise !
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