France 2 critiquée après son interview de Bachar Al-Assad

Le Monde.fr | 21.04.2015
L’interview, lundi soir sur France 2, du président syrien, Bachar Al-Assad, suscite quelques crispations dans la classe politique française.
« J’ai trouvé que ça n’honorait pas le service public », a réagi mardi 21 avril au matin sur RFI le député et ancien ministre François Lamy, pour qui « ce n’est pas le rôle » de la télévision publique française d’interroger « un dictateur dont on sait qu’il est responsable du massacre d’une grande partie de sa population civile ».

4619992_3_0324_interview-du-president-syrien-bachar_6ede91799584e278fdf9c8d69160e7f8

Interview du président syrien, Bachar Al-Assad, par David Pujadas, diffusée le 20 avril 2015 sur France 2. AFP/-
Un entretien « pour apprendre quoi ? », s’est interrogé M. Lamy« Rien. Pour que M. Assad nous explique que la France soutient les terroristes, pour nous expliquer – ce qui, paraît-il, est le scoop du jour – qu’il y aurait eu des contacts avec les services français. Des contacts avec les services étrangers, il y en a tous les jours. Tout ça pour lui laisser la parole, le laisser dire un certain nombre de mensonges sans réagir. »
« Qui a créé Daech [l’organisation de l’Etat islamique] ? Qui a permis que ce groupe islamiste surgisse à un moment où on sait très bien que Bachar Al-Assad a ouvert les prisons, a permis à ces groupes de se créer pour contrer l’Armée syrienne libre, c’est-à-dire les démocrates syriens qu’il a mélés d’ailleurs, hier, sans aucune réaction du journaliste, aux terroristes qui, paraît-il, combattaient le régime syrien ? », s’est encore agacé M. Lamy.
Al-Assad « bombarde son peuple avec des barils d’explosifs »
L’élu partage ainsi l’avis d’Elisabeth Guigou, députée socialiste et présidente de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale. « N’oublions jamais que les opposants syriens, non djihadistes, ont manifesté pacifiquement, et que Bachar Al-Assad les a réprimés avec férocité », a écrit l’ancienne ministre sur son compte Twitter lundi soir, ajoutant que le président syrien, « contrairement à ce qu’il prétend, bombarde son peuple avec des barils d’explosifs et des armes chimiques ».
N’oublions jamais que B. al-Assad, contrairement à ce qu’il prétend, bombarde son peuple avec des barils d’explosifs et des armes chimiques. — Elisabeth Guigou (@elisabethguigou)
L’élue de Seine-Saint-Denis a été rejoint par son confrère des Hauts-de-Seine, le député socialiste Alexis Bachelay, qui a désigné le président syrien comme un « sanglant dictateur » et qualifié l’entretien d‘« honteux ».
A quoi sert cet entretien avec le sanglant dictateur Bachar El Assad sur @France2tv ? Pour l’instant, c’est juste honteux @davidpujadas ! — Alexis Bachelay (@ABachelay)
« Notre mission est d’informer »
Le journaliste David Pujadas a, lui, répondu aux critiques mardi matin sur Europe 1, en défendant sa « mission d’informer » : « D’un côté, la diplomatie française a pris des positions dans ce conflit et sur Bachar Al-Assad. Notre mission est d’informer. Il y a des intérêts contradictoires, car on n’a pas les mêmes missions. »
« Nous, la question qu’on se pose, c’est “est-ce qu’interviewer l’un des protagonistes d’un des pires conflits depuis vingt ans permet à nos spectateurs de se forger une opinion ?” La réponse est indéniablement : “Oui !” », a-t-il insisté.
Lire aussi : Sur France 2, le discours bien rodé de Bachar Al-Assad

A propos kozett

Deux phénomènes peuvent amener à une manipulation dans la prise en compte des informations par notre conscience : --> Le mirage qui voile et cache la vérité derrière les brumes de la sensiblerie et de la réaction émotionnelle. --> L’illusion qui est une interprétation limitée de la vérité cachée par le brouillard des pensées imposées. Celles-ci apparaissent alors comme plus réelles que la vérité qu’elles voilent, et conditionnent la manière dont est abordé la réalité … A notre époque médiatisée à outrance, notre vigilance est particulièrement requise !
Cet article, publié dans Débats Idées Points de vue, International, Médias, Politique, est tagué , , . Ajoutez ce permalien à vos favoris.