Le « Balardgone », nouveau ministère de la Défense bombardé par les factures

Le Canard Enchaîné – 04/11/2015 – H.L.

François Hollande, Jean-Yves Le Drian et Martin Bouygues devaient poser ensemble pour la photo d’inauguration de l' »Hexagone Balard« , ce 5 novembre. Il ne manquera sur le cliché que les juges Tournaire et Daïeff, qui enquêtent sur les conditions d’attribution du contrat du nouveau ministère de la Défense en 2011. Ces deux magistrats ont déjà mis en examen, pour corruption et favoritisme, un dirigeant de Bouygues Bâtiment Ile-de-France, Thierry Auriault, un officier soupçonné d’avoir volé des documents et un receleur.

La cérémonie du 5 novembre a été préparée par une équipe de l’Élysée qui a exploré les bâtiments de Balard. Et elle en est revenue un peu effarée. Première surprise : construit à toute vitesse, l’édifice tout neuf n’est pas très flambant, à tel point que certains bureaux ont besoin d’être rénovés avant même d’avoir servi. Normalement, ces travaux doivent être assurés aux frais du bétonneur. Mais l’État qui débourse déjà 3,5 milliards pour s’installer à Balard va devoir aussi casquer. Comme « Le Canard » (29/4) l’a révélé, le moindre aménagement  supplémentaire demandé par les Armées est facturé au prix fort par Bouygues et son associé Thales. Ainsi, la pose d’une simple prise électrique coûte plus de 2 200 euros ! Et le contrat (signé à l’époque par Nicolas Sarkozy…) interdit aux militaires de s’adresser à un prestataire moins cher.  La situation est d’autant plus embarrassante que certains travaux s’avèrent urgents. Par exemple, pour protéger des bureaux de l’état-major jugés un peu trop visibles de l’extérieur.

Le ministre Le Drian n’a pas ce genre de souci. Il a décidé de rester (avec son cabinet) dans ses anciens (et superbes) locaux de l’hôtel de Brienne, et se contente d’effectuer de brefs passages au Balardgone. Cette décision a entraîné des travaux d’aménagement supplémentaires, mais Hollande pourrait la remettre en question suite à l’inauguration. Dans ce cas, il faudra recréer les locaux réservés aux ministres et à ses collaborateurs. Et encore cracher au bassinet…

Autre curiosité budgétaire ; le ministère de la Défense avait prévu, à l’origine, de recouvrir (en partie) à des vigiles privés pour surveiller ces lieux top secret. Il s’est ravisé depuis et a décidé de recourir aux seuls militaires. Mais le marché de gardiennage court toujours, et les factures continuent de tomber comme à Gravelotte..

Lire aussi : L’attribution à Bouygues par le ministère de la Défense d’un contrat de 3,6 milliards dénoncée dans un rapport secret  (Le Canard Enchaîné 15 mai 2013)