Suicide à l’hôpital Pompidou : réponse à Patrick Pelloux

L’Obs Le PLUS 31-12-2015 Par Bernard Granger Prof. de psychiatrie
Mon cher Patrick Pelloux, le « très puissant » te répond
aPatrick pellouxLE PLUS. Le 17 décembre, Jean-Louis Megnien, cardiologue à l’hôpital européen Georges Pompidou, à Paris, s’est défenestré sur son lieu de travail après un long arrêt maladie. Dans le numéro de « Charlie Hebdo » sorti ce 30 décembre, Patrick Pelloux s’interroge : pourquoi le professeur Granger, « un psychiatre très puissant », n’a-t-il alerté que la direction ? Ce dernier a souhaité lui répondre ici.

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L’hôpital européen Georges-Pompidou, à Paris (F.DURAND/SIPA)
Mon cher Patrick,
 J’ai lu avec intérêt ta tribune dans « Charlie Hebdo » sur le suicide de notre très regretté collègue Jean-Louis Megnien. Je partage une partie de tes analyses et, comme tu me fais l’honneur de me citer comme « très puissant » dans les réseaux de l’AP-HP, je me permets de mettre cette puissance à t’informer de certaines choses qui pourraient t’aider dans tes commentaires.
 Je revendique une parole libre et indépendante
 La première est que je connaissais Jean-Louis Megnien et que je suis dépositaire de nombreux éléments me permettant de porter une appréciation documentée sur ce drame. Tu parles de « réseaux politiques, religieux, médiatiques, francs-maçons, pharmaceutiques et industriels » des « professeurs ».
 Bien que professeur, je n’appartiens à aucun de ces réseaux. Je revendique une parole libre et indépendante. Cela peut te sembler étonnant, mais c’est ainsi.
 La faute en grande partie à ceux qui harcèlent
Tu parles de Bachelot. J’ai combattu sa loi qui donne tous les pouvoirs aux directeurs, et non comme tu l’affirmes aux professeurs. Et quand on donne des pouvoirs sans limites à un directeur, il trouve facilement des kapos dans notre communauté pour abuser de ses pouvoirs avec leur complicité.
 Tu parles de la loi de 1958. S’il y a eu des suicides chez Renault, est-ce dû à l’invention du moteur à explosion ? Non, c’est la faute en grande partie à ceux qui harcèlent, comme cela a été le cas à l’égard de Jean-Louis Megnien. Si tu avais lu ma lettre récente à la direction générale, tu aurais remarqué ceci :
 « Je ne méconnais pas la complexité d’un acte suicidaire sur le lieu de travail, le mélange fréquent de causes personnelles et de motifs professionnels, le degré plus ou moins élevé de fragilité de tout homme. Cependant, cela ne peut pas être un prétexte pour occulter la façon dont ce collègue a été objectivement maltraité, non seulement par certains de ses pairs, mais aussi par l’administration. »
 La loi oblige à un devoir de prévention
Si je me suis tourné vers la direction générale, c’est tout simplement parce que la loi l’oblige à un devoir de prévention et qu’elle est pénalement responsable en cas de harcèlement.
 Or, les faits de harcèlement abondent, à l’égard de Jean-Louis Megnien, mais pas seulement. Si je mets en cause la directrice du groupe hospitalier, c’est qu’elle est accusée de faits de harcèlement par plusieurs médecins de l’hôpital où elle exerce actuellement ou même d’un autre hôpital au moins où elle a exercé antérieurement.
 Continue de nous informer et passe une bonne fin d’année.
 Amitiés.
0611397722999Bernard Granger

A propos kozett

Deux phénomènes peuvent amener à une manipulation dans la prise en compte des informations par notre conscience : --> Le mirage qui voile et cache la vérité derrière les brumes de la sensiblerie et de la réaction émotionnelle. --> L’illusion qui est une interprétation limitée de la vérité cachée par le brouillard des pensées imposées. Celles-ci apparaissent alors comme plus réelles que la vérité qu’elles voilent, et conditionnent la manière dont est abordé la réalité … A notre époque médiatisée à outrance, notre vigilance est particulièrement requise !
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