Les fermes de demain seront verticales

Le Canard Enchaîné – 27/01/2016 – Conflit de canard – 
Dans la campagne nantaise, le groupe Florentaise est en train édifier une « ferme verticale ». Dix mètres de hauteur ! Une ferme entièrement pilotée par ordinateur où tomates, concombres et salades grandiront sur des pains de culture manipulés par des robots ! Le tout en atmosphère conditionnée et sous un soleil artificiel constitué de micro-diodes électroluminescentes ! Inauguration au printemps. L’objectif de Florentaise est d’en vendre, d’ici deux ans, un peu partout sur la planète. Mais quel intérêt ?

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Vue générale d’une unité de production. © AeroFarmsÉtats-Unis
Spécialiste français des supports de culture hors-sol, Florentaise s’enorgueillit d’avoir, mis au point la pyrolyse de la biomasse fraîche, un vrai « charbon vert ». La manip consiste à cuire des déchets végétaux dans un four à pyrolyse en continu, à haute température et en l’absence d’oxygène. On obtient du GreenChar, un charbon magique qui piège le CO2. Ainsi, l’éleveur de porcs industriel qui aligne 2 000 bêtes va pouvoir délayer son lisier avec du GreenChar et s’afficher COP21 compatible. En effet, « 1kg de GreenChar = 2,7 kg de crédits carbone », annonce Florentaise, ravi par ce produit « qui fait du bien à notre planète« .
Mais ce n’est qu’un premier pas. Pour le « leader français des supports de culture », l’avenir de l’agriculture est en milieu urbain. Un, dans trente-cinq ans, les trois quarts de l’humanité vivront en ville. Deux, avec les fermes verticales, plus besoin de s’embêter avec la terre : n’est-elle pas pauvre en nutriments, imprévisible, bêtement naturelle, emplie de vie, donc de parasites ?
Le groupe, qui livre chaque année 1 million de mètres cube de terreau, s’est spécialisé dans le pain de culture : pour accélérer la pousse de tomates ou de concombres, ce savant dosage de compost, d’engrais, de tourbe, de fibres de résineux et de coco est perfusé par des goutte-à-goutte qui l’imbibent d’une solution nutritive. Idéal pour les usines à légumes que sont les fermes verticales…
Arguments de vente imparables : d’abord la culture hors-sol c’est écolo, parce qu’il n’y a pas de pesticides; ensuite la production est estampillable « locavore » (consommation locale); enfin, si on y ajoute du GreenChar, on peut même prétendre participer au sauvetage de la planète. Et tan pis si cette nourriture verticale est standardisée, insipide, hors-saison, fabriquée quasi sans agriculteurs. L’essentiel est qu’elle soit hautement rentable avec peu de main-d’œuvre et des consommateurs sous la main.
La fin des haricots ?  

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