Combien coûtent les anciens présidents et Premiers ministres ? Infographies : Les frais engagés par l’Etat, en 2014, pour V. Giscard d’Estaing, J. Chirac et N.Sarkozy

Mediapart a obtenu le détail des frais engagés par l’Etat pour les anciens locataires de l’Elysée et de Matignon
France Info 09/02/2016 Infographies  et Blog René Dosière
Les retraités de la République continuent de coûter cher aux contribuables. D’après les travaux du député socialiste René Dosière, Valéry Giscard d’Estaing coûte environ 2,5 millions d’euros par an à l’Etat, Nicolas Sarkozy 2,2 millions, Jacques Chirac 1,5 million. Mediapart (article payant) a pu consulter les données du secrétariat général du gouvernement et publie, lundi 8 février, le détail des dépenses engagées pour les anciens chefs de l’Etat.

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Nicolas Sarkozy, Valéry Giscard d’Estaing et Jacques Chirac au Conseil constitutionnel, à Paris, le 1er mars 2010. (CHARLES PLATIAU / AFP
Trente-cinq ans après son départ de l’Elysée, Valéry Giscard d’Estaing bénéficie encore de bureaux, pour un coût de 290 363 euros en 2014. Plus que Nicolas Sarkozy (242 727 euros) et Jacques Chirac (205 088 euros). En plus de payer un certain nombre de collaborateurs, l’Etat français prend en charge de nombreux frais annexes pour les anciens présidents : du carburant de leur voiture à leurs abonnements presse en passant par leurs fournitures de bureau.afiCapture-d-ecran-2015-01-27-a-14_19_08
Les frais engagés par l’Etat pour Valéry Giscard d’Estaing en 2014
Les frais engagés par l’Etat pour Nicolas Sarkozy en 2014
Les frais engagés par l’Etat pour Jacques Chirac en 2014
Les anciens présidents peuvent aussi piocher dans le mobilier national pour meubler et décorer leurs bureaux. Nicolas Sarkozy possède ainsi une série de chaises « Neuilly » à sa disposition, tandis que Jacques Chirac a emprunté 19 œuvres, dont une estampe de Serge Poliakoff, une gravure de Max Ernst ou une lithographie d’André Masson.
Les frais de chauffeurs et d’assistants des anciens Premiers ministres en 2014
Blog René Dosière
Plus de 6 millions d’euros par an, c’est le coût global à la charge de l’Etat, des anciens présidents de la République. Les récentes réponses à mes questions écrites permettent de découvrir que l’ex le plus dispendieux est… Valéry Giscard d’Estaing (2,5 millions) suivi de N. Sarkozy (2,2 millions). Jacques Chirac ne coûte « que » 1,5 millions. Qui aurait parié sur ce tiercé dans l’ordre ?
Retour sur le « statut » des anciens présidents.
Les deux Républiques précédentes ignoraient la vie des anciens de la République. En 1932, les chambres de la IIIème République décidaient sur proposition d’un député de verser une dotation annuelle correspondant   à un montant mensuel d’environ 11 000 euros d’aujourd’hui mais à la condition qu’une loi ait précisé que le Président « a bien mérité de la Patrie » !
Cette disposition fut annulée en 1955, par une loi du 3 avril prévoyant que les anciens présidents de la République percevront une dotation annuelle d’un montant égal à celui du traitement d’un conseiller d’Etat, soit environ 6 000 euros mensuels.
Cette disposition est toujours en vigueur et s’applique aux anciens présidents que sont V. Giscard d’Estaing, J. Chirac, N. Sarkozy. En cas de décès la moitié de cette somme est réversible sur la veuve. Il ne s’agit pas d’une « retraite » le montant étant égal quel que soit l’âge de l’intéressé et la durée de ses fonctions. Dans le cadre de la Vème République, le général de Gaulle ne modifie pas les dispositions financières concernant la présidence, ce qui, au fil du temps, conduira à un budget éloigné de la réalité et opaque pour l’essentiel.
Il faudra attendre 2008 pour que le Parlement vote, à la demande de N. Sarkozy et après mes multiples interventions sur cette question, un budget vérité, contrôlé par la Cour des comptes.
Néanmoins le Général de Gaulle se soucie de l’avenir de son prédécesseur, René Coty, dont le rôle a été décisif dans sa nomination comme dernier président du conseil doté des pleins pouvoirs pour préparer la Vème République puisque la constitution créé un organe nouveau « le Conseil constitutionnel » dont les anciens présidents de la République sont membres de droit ce qui (leur assure rémunération actuelle de 12 000 euros mensuels, à condition de siéger, ce que V. Giscard d’Estaing est le seul à faire).
La question du « statut » des anciens présidents ne se pose pas pendant longtemps : le Général de Gaulle quitte le pouvoir en mai 1969 et décède un an plus tard. Son successeur G. Pompidou meurt en cours de mandat en avril 1974. C’est donc après la défaite de V. Giscard d’Estaing, en mai 1981, que se pose la question.
A la demande de F. Mitterrand, le Premier ministre, Laurent Fabius envoie un courrier à V. Giscard d’Estaing, daté du 8 janvier 1985 fixant « de manière permanente le statut dans la Nation ». En réponse à l’une de mes questions écrites (24/06/2008) le Premier ministre évoque une « décision » et résume de manière très succincte le contenu de cette lettre qui reste secrète (elle n’a jamais été publiée au Journal officiel) jusqu’en juin 2010.
Ayant obtenu une copie de ce courrier, je le rends public sur mon blog. Une reproduction de cette lettre figure, également, en annexe de mon ouvrage « L’argent de l’Etat » paru en février 2012 [  lettre 8 janvier 1985 ]
On y apprend que les anciens présidents bénéficient d’un « appartement de fonction meublé et équipé ». Deux personnes sont affectées au service de cet appartement.
Pour assurer la protection rapprochée « deux fonctionnaires de la police nationale » sont mis à leur disposition. En outre le domicile et leur résidence font l’objet d’une « protection particulière » dont les modalités sont fixées avec les préfets concernés.
« Une voiture de fonction est attribuée avec deux chauffeurs ».
Enfin, sept collaborateurs permanents, choisis par l’ancien chef de l’Etat sont énumérés : un chef de cabinet, deux assistants, un fonctionnaire des archives nationales, trois secrétaires dactylographes. Au total les anciens présidents disposent de 13 personnes en permanence !
L’intégralité des dépenses est prise en charge par l’Etat dans une opacité certaine.
Au fil de mes recherches, j’apprends que les dépenses de location et d’entretien, ainsi que les dépenses automobiles sont prises en charge par le budget du Premier ministre.
La réponse que je viens de recevoir à ma question sur ce sujet précise les dépenses de fonctionnement suivantes (montant 2014 en euros) lire
Dés que je disposerai des réponses qui me font défaut – en particulier le coût de la sécurité – j’actualiserai ces calculs.
Le niveau élevé de ces dépenses, 6,2 millions d’euros par an, me conduit à formuler les souhaits suivants.
  1. Il n’est pas admissible que de telles sommes soient dépensées sur la seule base d’une lettre personnelle – longtemps restée secrète – d’un Premier ministre à un ancien président. D’ailleurs à l’occasion de la clarification du budget de l’Élysée, en novembre 2007, la directrice de cabinet de N. Sarkozy écrivait « il convient de donner une base juridique plus solide au statut des anciens Présidents de la République et aux moyens que l’Etat leur alloue ». Rien n’a été fait en ce domaine. Je souhaite qu’un décret du Premier ministre soit élaboré et publié au Journal officiel établissant une base juridique incontestable.
  2. Ce décret devrait prévoir que les dépenses supportées par l’Etat sont exclusives de toute rémunération privée à l’exception des activités intellectuelles (ouvrages par ex…) et d’une activité politique de premier plan. (Pour éviter tout procès d’intention, le décret préciserait que ces restrictions ne s’appliquent pas aux anciens présidents actuels).
  3. La prise en charge par l’Etat de ces dépenses publiques devrait être limitée dans le temps à une durée maximale de 5 ans.
  4. La dotation attribuée aux anciens présidents pourrait être revue. Aujourd’hui égale au traitement d’un conseiller d’Etat en service ordinaire, elle pourrait correspondre à celui d’un président de section, voire du Vice Président du Conseil d’Etat.
  5. Cette revalorisation interviendrait en même temps que le départ des anciens présidents du Conseil constitutionnel. Le départ est d’autant plus nécessaire que le rôle du Conseil constitutionnel s’est modifié. Mais il y faut une réforme de la Constitution rejetée, jusqu’à présent, par l’opposition de droite.
La république exemplaire voulue par le Chef de l’Etat implique désormais que soient clarifiés le rôle et les moyens mis à la disposition des anciens présidents par l’Etat.

A propos kozett

Deux phénomènes peuvent amener à une manipulation dans la prise en compte des informations par notre conscience : --> Le mirage qui voile et cache la vérité derrière les brumes de la sensiblerie et de la réaction émotionnelle. --> L’illusion qui est une interprétation limitée de la vérité cachée par le brouillard des pensées imposées. Celles-ci apparaissent alors comme plus réelles que la vérité qu’elles voilent, et conditionnent la manière dont est abordé la réalité … A notre époque médiatisée à outrance, notre vigilance est particulièrement requise !
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