LE MONDE | 03.03.2016
Editorial du « Monde ». Du temps de la splendeur des empereurs chinois, que ce soit sous la dynastie des Tang (618-907), considérée comme l’âge d’or de la civilisation chinoise, ou, plus récemment dans l’histoire, sous celle des Ming (1368-1644), la Chine se voyait et se vivait comme le centre du monde. Les voisins les plus proches étaient traités comme des vassaux, les pays les plus lointains considérés comme des « barbares ». Dans un rapport de suzeraineté, où chacun trouvait son compte, les premiers se soumettaient à la loi de l’empire, dont les frontières n’étaient pas encore fermement fixées. Les seconds devaient être tenus à l’écart.
Malgré les révolutions et l’avènement des Etats-nations, il reste des traces de cet héritage dans la politique menée aujourd’hui à Pékin par le Parti communiste chinois, au pouvoir depuis 1949. La Chine, plus forte et plus puissante, a, certes, retrouvé sa place dans le monde, ce qui est une bonne nouvelle pour le reste de la planète. Mais elle renoue aussi – et cela est plus inquiétant – avec les prétentions hégémoniques de l’empire du Milieu. Des prétentions qui ne sont pas sans alarmer des pays proches, comme le Vietnam ou les Philippines.
On le voit sur mer aussi bien que sur terre. Sur mer, avec le renforcement de la présence chinoise dans des îles de la mer de Chine méridionale, là où transite chaque année un tiers du commerce mondial. L’archipel des Paracels en est un bon exemple, où Pékin aurait, d’après les Etats-Unis, déployé une batterie de missiles sol-air, alors que l’endroit est revendiqué aussi par Taïwan et le Vietnam. Réagissant à ce constat, mardi 1er mars, le secrétaire à la défense américain, Ashton Carter, a mis en garde Pékin contre toute « militarisation » de cette zone et a affirmé que Washington ne resterait pas les bras croisés.
Une attitude désolante et choquante
Sur terre, la Chine n’hésite plus à faire fi des frontières nationales pour imposer sa loi.