Le démantèlement des centrales nucléaires : un sacré bazar

Siné Mensuel N° 50 – février 2016 – Blandine Flipo –
Arrêter le nucléaire c’est bien. Mais se « débarrasser » des centrales, pose d’énormes difficultés que personne ne semble avoir bien évaluées. Exemples. 
345aa152600bd9b2d91e4bd7e90e7d09Ce n’est pas un scoop; Areva est au bord de la faillite. L’entreprise ne s’est donc pas fait prier pour se vanter, le 29 décembre dernier, d’avoir remporté un contrat de « plusieurs millions d’euros » pour démanteler les réacteurs de la centrale Superphénix. Le business du démantèlement, voilà une solution d’avenir ! Parce que 1) vendre des centrales ça devient vraiment compliqué, surtout si elles sont pleines de trous (comme l’EPR). 2) Toutes les centrales construites dans les années 70 sont en fin de vie. 3) le démantèlement est l’assurance de contrats quasi à perpétuité. Eh oui, car si les centrales sont compliquées à construire, on s’embarque dans une autre dimension pour les déconstruire. Pour une raison simple : « Personne n’y a jamais vraiment songé lors de leur construction » remarque le physicien Bernard Laponche, spécialiste du nucléaire et fondateur de l’association Global Chance. Du coup, ce genre de chantier casse-tête peut facilement durer des décennies… D’autant que vu la radioactivité qui y règne, il est toujours urgent d’attendre. Au point qu’à ce jour, en France, personne n’a jamais réalisé de » déconstruction complète d’une quelconque centrale !
Ce n’est pas faute d’avoir essayé. Le cas le plus fameux est Brennilis, une petite centrale construite dans les années 80 en Bretagne et qui n’a pratiquement jamais fonctionné. Il y a dix ans, EDF décide d’en faire la vitrine de sa science du démantèlement. Or, non seulement la centrale est toujours debout, mais les avaries s’enchaînent. Le dernier exemple en date nous est raconté par Chantal Cuisnier du Réseau Sortir du nucléaire : « En septembre, un feu s’est déclaré sur le chantier d découpe de l’enceinte du réacteur. Les ouvriers avaient laissé sécher des lingettes imprégnées de liquide inflammable et utilisé une meuleuse juste à côté... ». Malin. Les pompiers ont débarqué, balancé des seaux d’eau sur ce chantier ultra-radioactif. Et l’Agence de sécurité nucléaire (ASN) gendarme du nucléaire, a collé un avertissement à EDF. L’électricien préféré des français n’avait même pas prévu de plan incendie…
Déplacer les déchets est-ce une solution ?
Le chantier de la centrale de Superphénix (arrêtée en 1997 après à peine onze mois de production éléctrique effective) promet d’être aussi rigolo. D’abord parce que, sur plainte du Réseau Sortir du nucléaire, EDF vient d’être condamnée en appel le 11 janvier à 20 000 euros d’amende pour violation des règles de sécurité lors de la première phase de démantèlement. La quelle a consisté à retirer tout le sodium et le plutonium du réacteur. Sans qu’EDF ne juge utile de respecter les consignes de sécurité pour protéger le personnel… Ensuite, parce que « Superphénix, comme Brennilis, est une centrale complexe, difficile à déconstruire. Ne serait-ce que parce que le sodium a tendance à explose au contact de l’air et de l’eau« ,souligne Laponche. Or, ce sodium se trouve toujours sur place, enfermé dans des tonnes de béton.
d4ef39eb1d69665766c2d911b8aee9e6Car il n’existe aujourd’hui aucune solution de stockage de ce type de déchets radioactifs à long terme. Cigéo, le projet de cimetière souterrain radioactif prévu à Bure (Meuse), n’a pas été encore adopté. Et le sera-t-il jamais, sachant que sa construction coûterait 25 milliards d’euros ? Enfin, parce que défaire des centrales, c’est bien beau, mais « cela revient à déplacer les déchets radioactifs d’un point A à un point B, avec tout le risque que cela peut engendrer pour les populations concernées. Cela vaut-il le coup ? s’interroge Bernard Laponche, qui rappelle qu’il y a quelques mois seulement, Areva avait remporté un contrat de démantèlement en Grande-Bretagne. Depuis ce contrat a été annulé, les Anglais n’arrivant pas à se décider sur le sort de leur ancienne centrale. Décidément, le nucléaire, c’est la poisse. Même quand on n’en veut plus !
Lire : Areva : Les contribuables n’ont pas à payer pour sauver une industrie nucléaire en faillite !  (Réseau sortir du nucléaire 26/02/2016)
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