Heureux comme un député attendant son procès…

Le Canard Enchaîné – 30/03/2016 – Christophe Nobili –
Neuf années de procédure… et l’ex-FN Jacques Bompard court toujours. 
jacques-bompard-orange-2734095ovaie_1713Voilà un homme qui n’est pas trop persécuté par cette « Ripoublique » qu’il dénonce sans relâche. Poursuivi dans une affaire de prise illégale d’intérêt depuis neuf ans, le député d’extrême droite Jacques Bompard coule des jours paisibles en sa mairie d’Orange. Ses avocats multiplient les recours dilatoires, et la justice roupille tellement sur son cas que cet ancien du mouvement dissous « Occident » balance aux curieux qui s’inquiètent de son sort : « Il n’y a plus d’affaire. Il n’y avait rien dans ce dossier. »
Pourquoi se gêner ? Cette semaine encore la cour d’appel de Nîmes doit trancher une énième question de procédure relative à son renvoi devant le tribunal. Une belle histoire, à enseigner au plus vite dans les facs de droit…
Terrains d’entente
Fin 2007, à la suite d’une plainte d’un ex-camarade du FN, Bompard fait l’objet d’une enquête ouverte par le parquet d’Avignon.  Motif : le bon maire a délivré à un promoteur tous les permis nécessaires pour bâtir un lotissement provençal, sur lequel deux parcelles ont été vendues à la SI Grégory. Une obscure société civile immobilière créée par un maçon, lequel va ensuite discrètement céder ses parts, à prix d’ami, à Bompard et à son épouse. le genre de plaisanterie qui peut vite mener à la case inéligibilité. Sauf que… 
Une bonne année s’écoule. En janvier 2009, l’édile est entendu par les fonctionnaires de police. Deux années passent encore : en décembre 2010, Bompard est mis en examen pour prise illégale d’intérêt. Le 8 octobre 2013, soit trois ans plus tard, il est renvoyé devant le tribunal correctionnel d’Avignon. Mieux vaut tard que jamais.
arton11801-1b5e4Le maire d’Orange conteste et saisit illico la cour d’appel de Nîmes. Il dépose d’abord une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), au motif qu’un seul juge a enquêté et signé son ordonnance de renvoi. L’argument ne valant pas tripette, la QPC est jugée « dénuée de caractère sérieux » et rejetée… Mis nous voilà déjà en 2014 : en mars, le candidat Bompard est triomphalement réélu. Il dépose un nouveau recours, toujours devant la cour, grosso modo pour le même motif (mais sans QPC cette fois) et « quelques autres bricoles« , reconnaît-on au parquet général de Nîmes, joint par Le Canard. Le délibéré est prévu pour mars 2015, puis repoussé et, enfin, fixé au 312 mars 2016 ! Le procureur général, Michel Desplan, gémit : « C’est vrai que la cour a un peu traîné, mais elle est encombrée par les dossiers criminels. Il n’y a aucun volonté de protéger M. Bompard ! » Ouf ! On commençait à en douter…
Glaive du zèle
Et que va-t-il se passe ce jeudi 31 ? Deux solutions ; soit l’ordonnance de renvoi n’est pas validée, il faut revoir la copie, et c’est reparti pour un long tour, soit elle est confirmée par la cour d’appel, Bompard se pourvoit en cassation… et c’est également reparti pour un long tour. Aprs quoi il faudra attendre que le tribunal d’Avignon fixe la date d’audience du procès…
Image43Petit résumé pour les nuls : visé par une enquête en 2007, mis en examen en 2010, renvoyé en correctionnelle en 2013, Bompard le bienheureux, 73 piges, exerce toujours, en 2016, son quatrième mandat de maire. Il coupe les rubans, parade dans sa ville et organise sa succession, destinant son fauteuil à l’un de ses fistons. Il trône aussi à l’Assemblée nationale (aux côtés de Balkany…) où il s’est fait élire en 2012, et, vu la manière dont la justice politique s’acharne contre lui, il devrait pouvoir se représenter aux législatives de 2017.
Une occasion de rappeler qu’il est partisan, pour les délinquants, d’une justice ferme et rapide !

A propos werdna01

Hors des paradigmes anciens et obsolètes, libérer la parole à propos de la domination et de l’avidité dans les domaines de la politique, de la religion, de l’économie, de l’éducation et de la guérison, étant donné que tout cela est devenu commercial. Notre idée est que ces domaines manquent de générosité et de collaboration.
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