Dieu fric

Charlie Heddo – 13/04/2016 – l’Édito de Riss –
A peine sorties dans les journaux, les révélation du scandale des comptes offshore au Panama sont déjà d’un ennui mortel. Le seul petit plaisir procuré par cette affaire est la surprise des noms que l’on découvre de-ci de-là, comme des œufs de Pâques dans l’herbe. Tiens Platini ! Tiens Pedro Almodovar ! Tiens David Cameron ! Tiens, le Premier ministre islandais ! On attend des noms croustillants. On veut savoir qui a touché comme on veut savoir qui a couché avec qui.
160407-panama-lepen-mutioMais au bout du compte, qu’aura-t-on appris vraiment de nouveau ? Rien que nous ne savions déjà. : que les paradis fiscaux sont des repaires de truands et des voleurs d’argent public. Que certains hommes politiques ne croient pas en leur propre pays au point d’en faire sortir leur pognon pour le planquer à l’étranger. Que les sportifs aiment le fric plus que le ballon et que des cinéastes peuvent être aussi talentueux derrière un compte offshore que derrière une caméra. Qu’au fond la pureté existe peu et que l’argent, le sale argent, surtout quad on ne veut pas payer d’impôts dessus, nivelle par le bas.
Les belles âmes de haute moralité sont des espèces en voie de disparition
Cette affaire dévoile l’ampleur d’un mal qui touche tous les milieux sociaux, y compris les plus aisés : la vulgarité d’esprit. Les grands écrivains peuvent être aussi mesquins qu’un petit patron qui ne déclare pas à l’Urssaf ses employés payés au noir, et les grands artistes peuvent être aussi rapaces que des petits truands de quartier. Les belles âmes de haute moralité sont des espèces en voie de disparition comme les rhinocéros d’Afrique. Même les religieux ont perdu leur aura de morale. La vulgarité d’esprit envahi tout. Y compris le monde des idées. On écoute avec attention beaucoup d’intellectuels fameux nous expliquer le chaos du monde et on n’entend qu’une enfilade de clichés de bistrot du commerce. On veut croire à chaque élection présidentielle qu’un homme nouveau va surgir pour tout changer et tirer la société par le haut, et six mois après on est déjà déçus.
Alors certains, pour fuir la banalité de leur époque, se tournent vers le passé pour y trouver un peu de grandeur. Un ancien élu de Vendée achète à prix d’or un anneau supposé avoir appartenu à une pucelle purifiée par feu. des ados croient dur comme fer des textes religieux écrits il y a mille quatre cent ans et s’envolent vers la Syrie, comme d’autres avant eux partaient pour Katmandou, pensant y élever leur âme. La vulgarité la plus affligeante à pour seule concurrente la bêtise la plus crasse. A vous de choisir. Panama ou Raqqa…
IMG_0049La fuite est le point commun de ces deux destinations. la fuite vers un paradis fiscal, la fuite vers un paradis céleste. Des programmes de déradicalisation ont été mis en place pour les jeunes qui se sont fourvoyés dans l’extrémisme islamique. il faudrait envisager les mêmes programmes de déradicalisation pour les obsédés du fric. Pour les fanatiques de l’argent et du truandage prêts à tous les subterfuges pour tromper la vigilance des forces de l’ordre et envoyer à l’étranger leurs millions. Le Panama comme la Syrie sont des destinations morbides. Au bout, on trouve la mort et rien d’autre. Car l’obsession de l’argent est un truc de zombie. Plus on y pense, moins on est vivant. On n’emporte pas son fric dans la tombe. Mais combien ont été envoyés dans la tombe pour que d’autres emportent leur fric ? Trafiquants de drogues, marchands d’armes, dictateurs, bourreaux, hommes politiques mafieux, ces gens n’aiment pas la vie, ils n’aiment que l’argent. Ce sont des kamikazes du fric : quand  le scandale explose, ils éclaboussent tout ce les entoure. Le dieu Fric n’a pas de pitié pour ses martyrs.

A propos werdna01

Hors des paradigmes anciens et obsolètes, libérer la parole à propos de la domination et de l’avidité dans les domaines de la politique, de la religion, de l’économie, de l’éducation et de la guérison, étant donné que tout cela est devenu commercial. Notre idée est que ces domaines manquent de générosité et de collaboration.
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