LE MONDE | 25.04.2016
Que ce soit à Palmyre (Syrie), Khorsabad (Irak) ou Angkor (Cambodge), au Caire et à Assouan (Egypte), Bamiyan (Afghanistan) ou Cagliari (Sardaigne), les nouvelles technologies révolutionnent l’archéologie.
Sur le terrain, drones, scanners, photogrammétrie, modélisation en trois dimensions (3D), rayons laser et reconstitution virtuelle produisent des documents inédits. Omniprésent sur des zones de conflits souvent minées comme le sont les territoires tenus par l’organisation Etat islamique (EI), le drone permet de photographier l’inaccessible.
Le Monde dévoile le premier état scientifique des destructions opérées par les djihadistes dans les cités antiques de Palmyre et de Khorsabad. Architecte, cofondateur d’Iconem, start-up française des technologies numériques au service du patrimoine en péril, Yves Ubelmann est revenu de Palmyre le 14 avril avec 20 000 photos. Dont celles du principal sanctuaire de « la perle du désert », le temple de Bêl, « le Seigneur » en palmyrénien, détruit à l’explosif en août 2015 par l’EI. Et dont il ne reste que le portique debout et un amas de pierres.
« J’étais sur place une semaine après le départ de Daech [acronyme de l’EI] le 27 mars, lors de la reconquête du site par les troupes gouvernementales et l’aviation russe. C’est la première mission scientifique avec les archéologues de la Direction générale des antiquités et des musées syriens [DGAM] », indique Yves Ubelmann, qui opère en Syrie depuis 2006 dans le cadre de missions françaises. Notamment à Palmyre, où il a réalisé la muséographie d’une salle du musée du site antique : « Je l’ai revu en ruines. Les scientifiques, avec lesquels je me suis bien entendu, sont les mêmes, mais dans une situation dramatique, avec de vrais problèmes à résoudre, de documentation, de sauvegarde. » La reconquête de Palmyre par l’armée de Bachar Al-Assad ne constitue pas, pour Yves Ubelmann, « une raison d’abandonner » les archéologues du DGAM : « Pour moi, c’était un devoir, une évidence, de répondre à leur demande, d’autant que Maamoun Abdulkarim [archéologue, directeur de la DGAM] a un discours très clair, apolitique. »
‘’Yves Ubelmann, architecte, cofondateur d’Iconem :
« Notre travail photographique s’apparente à celui de la police judiciaire après un crime, pour conserver un témoignage exact »