Écoutes administratives : la Loi Renseignement soumise à l’examen du Conseil constitutionnel

Le Canard Enchaîné – 10/08/2016 – H. L. –

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C’est un scud de fort beau gabarit que viennent de lancer trois associations d’internautes contre les écoutes administratives et la Loi Renseignement. Ces empêcheurs d’espionner en rond (La Quadrature du Net, French Data Network et la Fédération des fournisseurs d’accès à Internet associatifs) ont déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) dont les conséquences pourraient se révéler très gênantes pour les grandes oreilles à la française. Le Conseil d’État a jugé cette QPC assez sérieuse pour décider de la transmettre, le 22 juillet, au Conseil constitutionnel.
Barbouze à la pêche
Les trois associations visent un article du Code de la sécurité intérieure qui affranchit une partie des écoutes de tout contrôle et de toute autorisation préalable. Il s’agit, dit la loi, des « mesures prises par les pouvoirs publics pour assurer, aux seules fins de défense des intérêts nationaux, la surveillance et le contrôle des transmissions empruntant la voie hertzienne« . Derrière ce charabia se cache la possibilité d’écouter n’importe qui n’importe quand, car le terme de « voie hertzienne » inclut aussi bien les communications par portable que celles qui utilisent le WiFi, le GPS, les clés 3G ou 4G, etc.
Seul (et maigre) garde-fou : cette disposition est réservée – en principe – aux surveillances « aléatoires et non individualisées« . En clair, les services sont censés se contenter d’une sorte de « pêche au chalut », sans viser quiconque nommément. Mais si les renseignements ainsi collectés conduisent les barbouzes à vouloir surveiller X ou Y, elles doivent demander une mise sur écoute officielle des suspects. En passant, cette fois, sous les fourches Caudines de la Commission nationale de contrôle des techniques du renseignement. La surveillance « aléatoire et non individualisée » n’en constitue pas moins une zone grise propice à toutes les dérives, soupçonnent les trois associations. Dans sa requête, leur avocat, Patrice Spinosi, souligne qu’elle permet aux services de renseignement de porter atteinte aux libertés publiques et à la vie privée sans aucune garantie ni aucun recours pour les « écoutés ».
Une éventuelle censure du Conseil constitutionnel, qui se prononcera avant la fin octobre, risquerait de mettre par terre ce bel édifice. Et d’obliger le gouvernement à laisser les juges accéder un peu plus aux secrets des grands oreilles. Un cauchemar de barbouze !

charlie-909-altermondialistes

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