Ces éditocrates qui sèment la haine

Zéro hebdo N°1 – 10/08/2016 –

Avec le retour de la peur et du terrorisme, partis extrémistes européens et éditocrates haineux se frottent les mains. Daesch, comme une corne d’abondance, leur offre chaque jour de quoi alimenter leurs chroniques et leurs programmes politiques qui, sans cela, paraîtraient bien vides au regard de l’actualité et des enjeux de la société française.

Le Front national et les autres représentants de l’extrême droite politique ne sont pas les seuls à profiter directement du climat délétère et des attentats qui frappent la France. Tapis à l’ombre de leur studio ou de leur bureau cossu de l’ouest parisien, les éditocrates s’en donnent à cœur joie.Pour eux, rien de tel qu’un drame humain ou qu’une menace pour surfer sur les peurs les plus irrationnelles ou faire du chiffre, encore du chiffre. Mais qu’ont-ils de particulier ces éditocrates ? Sont-ils constitués d’une matière différente des autres journalistes ? Possèdent-ils des pouvoirs surhumains pour parvenir à repousser chaque jour les frontière de la connerie et la malhonnêteté intellectuelle sans être vus ? Non. Ce sont tout simplement de petits malins qui profitent de la torpeur ambiante et du fait que les membres du CSA soient en charentaises pour sévir. Radios privées, quotidiens nationaux, sites Internet à forte audience, chaînes de télé… Happés par l’appel de l’air de la parole décomplexée (en clair, assumant de plus en plus d’être de parfaites pourritures), ils gagnent des parts de marché tout en récupérant le temps de cerveau disponible entre deux matches de foot. Le tout, pour faire avancer leurs idées politiques au détriment de leur devoir d’informer.

D’origine musulmane…     

Comme ça, posé sur le papier, on pourrait croire qu’il s’agit d’une faute de frappe. Mais non. Certains éditocrates portent le concept d’origine musulmane dans leur rhétorique nauséabonde. L’un d’entre eux s’illustre particulièrement dans l’art de bricoler les concepts et de les bourrer dans un trou pour les rendre crédibles. Ivan Roufiol, plume en chef du Figaro et soutien officieux de tout ce qui permettre de virer ces saletés d’immigrés de la saint terre de France, est un cas d’étude à lui tout seul. L’idée de l’origine musulmane, c’est lui. Il en a noirci quelques milliers de page sur son Fig et dans des bouquins qui ont dû s’arracher dans les milieux nationalistes. Mais si, en le lisant, vous prenez deux secondes pour rebrancher votre cerveau et que vous décortiquez son concept, vous vous rendez vite compte qu’il s’agit d’une mascarade. L’origine marquant une appartenance géographique ou ethnique, on se demande bien ce que vient faire une notion de croyance dans tout cela. Et même en passant des heures à retourner une encyclopédie ou à scruter le globe terrestre d’un œil inquisiteur, personne à la rédaction n’a encore mis la main sur la Musulmanie. On a bien trouvé la Mauritanie, le Mozambique ou Madagascar. La Moldavie est également là, pas de doute. Ce la dit, personne n’a réussi à détecter la Connerieland sur une carte. Pourtant, il est clair que certains de nos contemporains en sont issus.

Le grand remplacement

Tremblez brave gens ! D’ici quelques jours, les contours de la France éternelle ne ressembleront plus qu’à un vaste califat ! Les écoles enseigneront le Coran à toute heure, les pains au chocolat disparaîtront lors du ramadan, la Compagnie Créole sera contrainte de chanter « Au Bal Mosquée » si elle veut survivre… Voilà, en résumé ce que prophétisent les apôtres du grand remplacement. En clair, plus il y aura d’immigration en France, et plus celle-ci se transformera en une bête immonde et dénaturée, un entité aux antipodes du modèle blanc, chrétien et un brin raciste que ces éditocrates aiment tant. Zemmour en tête. Lui, qui chaque matin défend la patrie en danger à grand renfort d’évocations vichystes et des sous-entendus douteux.

2016, l’âge d’or des éditocrates

C’était inespéré. depuis le temps qu’ils attendaient que les faits soient assez forts pour qu’ils brodent enfin un début d’argument solide. Avec les attentats des derniers mois, ils tiennent leur vérité absolue, ils la tiennent ! Depuis que les hordes (selon leurs termes bestiaux) de migrants envahissent l’Europe chrétienne, ils ne se tiennent plus du tout. Les chroniques volent aux  quatre vents et les vielles prophéties ressortent du placard. On exhibe une femme voilée sur les réseaux sociaux en hurlant : « Je vous l’avais dit ! Ça commence. » On parle d’une prétendue hausse de la délinquance en la collant sur le dos des étrangers. On relais sans sourciller la diatribe fécale du Front national. Certains, au fond des rédactions les plus respectables, ont depuis longtemps troqué leur carte de presse contre celle d’un parti. Un dangereux mélange des genres qui conduit notamment la part lucide des lecteurs à rejeter en bloc tout ce que les médias produisent. L’avenir de la presse ne saurait être partisane, et tant que les éditocrates œuvreront, à l’antenne pour imposer une conception biaisée du monde au détriment de l’information, cet avenir à du plomb dans l’aile. Mais ils s’en foutent. Ils ne sont pas là pour ça.