Fichier des pièces d’identité : la patronne de la Cnil a demandé un débat parlementaire

Libération – 02/11/2016 – avec AFP –
La présidente de la Cnil, Isabelle Falque-Pierrotin, à Paris le 8 avril 2016La présidente de la Cnil, Isabelle Falque-Pierrotin, à Paris le 8 avril 2016 Photo ERIC PIERMONT. AFP

Isabelle Falque-Pierrotin s’inquiète du fichier rassemblant des données sur 60 millions de Français et des éventuelles dérives. «Cela nécessite un débat au Parlement.»
«Il s’agit d’un changement majeur» : Isabelle Falque-Pierrotin, présidente de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) plaide pour un débat parlementaire sur le nouveau fichier regroupant les données personnelles de quasiment tous les Français, qui soulève des craintes pour les libertés publiques. «Il existait déjà un fichier pour les passeports de 15 millions de personnes, mais là, on passe à un fichier national qui concerne tous les Français. Cela n’a jamais été fait et je crois que cela nécessite un débat au Parlement. Il ne nous paraît pas convenable qu’un changement d’une telle ampleur puisse être introduit, presque en catimini, par un décret publié un dimanche de Toussaint», a expliqué la présidente de la Cnil, Isabelle Falque-Pierrotin, dans un entretien recueilli par l’AFP.
Lire notre décryptageUne nouvelle mégabase de données, ça la fiche mal
«C’est une affaire sérieuse, importante, qui touche tous les Français. Je crois nécessaire qu’il y ait une décision collective sur un sujet aussi sensible, non seulement par son contenu mais par son existence même. Il faut que la souveraineté nationale pèse les avantages et les inconvénients du dispositif et exprime un choix politique», a-t-elle insisté, regrettant que le gouvernement ait choisi, contre son avis, d’adopter «la voie réglementaire». «Mais il est toujours possible d’organiser un débat au Parlement, c’est encore d’actualité», a-t-elle fait valoir.
Plusieurs voix se sont déjà élevées pour déplorer la création d’un «mégafichier de 60 millions de Français». Auprès de Libération, le sénateur socialiste Gaëtan Gorce, membre de la Cnil, a déploré que le gouvernement ait décidé de créer «un fichier monstre» et le président d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme, Michel Tubiana, a redouté un possible «piratage du fichier».
Lire l’interviewGaëtan Gorce : «Ce décret crée un monstre.»
Les «risques» du fichier
Consultée par le gouvernement le 20 juillet, la Cnil avait rendu le 29 septembre un avis dans lequel elle recommandait notamment au gouvernement la réalisation d’une «véritable étude d’impact» et «l’organisation d’un débat parlementaire».
Interpellé mercredi à l’Assemblée par le député LR Lionel Tardy qui regrettait déjà l’absence de débat au Parlement, le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve a assuré que toutes les garanties avaient été prises et a défendu une simplification administrative. Le locataire de la place Beauvau a également souligné que la CNIL a considéré que les finalités du fichier «étaient déterminées, explicites et légitimes».
«Quel est le risque de ce fichier ? C’est qu’il soit utilisé pour permettre l’identification des gens à la volée, dans la rue. On attrape votre photographie via une caméra de surveillance ou on récupère votre empreinte digitale sur une scène de crime ou lors d’une manifestation et on les compare avec une base de données centrale», explique Isabelle Falque-Pierrotin.
«Il est évident que ce n’est pas du tout aujourd’hui dans les finalités du fichier qui a pour vocation de lutter contre l’usurpation d’identité», mais «cet outil de grande ampleur peut faire craindre qu’il puisse être utilisé à d’autres fins, peut-être pas aujourd’hui mais demain», souligne la présidente de la Cnil. Et, parmi les services de sécurité, «le nombre très large des personnes habilitées à consulter le fichier, en gros quelque 2 000 personnes, accroît potentiellement ce risque», a-t-elle ajouté, en pointant également les risques d’attaques de hackers.

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