La Nouvelle République 12/01/2017
Une loi visant à contrôler l’achat de terres agricoles françaises par des investisseurs étrangers est à l’étude. Tout a commencé dans l’Indre, avec des Chinois
Sommes-nous en train d’assister à une tentative unique dans l’histoire française, qui aboutirait à la création de fermes chinoises géantes sur le sol hexagonal ?
Entre fantasme et réalité, les autorités françaises ont décidé de réagir. Un texte de loi est actuellement présenté pour interdire la vente de terres agricoles aux investisseurs étrangers. Il y a urgence : rien que dans l’Indre, 2.000 hectares de champs et de pâturages seraient déjà tombés dans l’escarcelle de sociétés de l’empire du Milieu.
Pas de droit de préemption possible
Février 2016. On les annonce sur la zone industrielle d’Ozans proche de Châteauroux, en cours de viabilisation. D’après la NR, un véritable scoop, les Chinois débarquent bien. Mais pas dans le secteur et à l’endroit prévu : en quelques mois, plusieurs grosses exploitations agricoles du Sud-Berry viennent d’être rachetées par le groupe Hong-Yang.
Hong-Yang se serait associé à une société amie, Beijing International, pour faire main basse en toute légalité sur des fermes situées à Clion, Châtillon ou Vendœuvres. L’opération est menée en collaboration avec Marc Fressange, un industriel français installé en Chine.
Habituellement, les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) ont leur mot à dire lors de chaque transaction de ce genre. Cette fois, celle de l’Indre n’y a vu que du feu : si l’organisme dispose d’un droit de préemption sur les achats fonciers, les cessions sous forme de part de sociétés échappent à son contrôle. Il suffit donc à l’exploitant individuel de passer en société agricole. Les Chinois rachètent ensuite la majeure partie de ses parts. Et le tour est joué.
« La méthode est opaque »
Janvier 2017. Robert Chaze, président de la chambre d’agriculture de l’Indre, est très demandé. Pas une semaine ou presque sans une interview à la télévision ou dans un quotidien national. Un seul et unique objet de discussion : les Chinois.
« Pourquoi le sujet suscite t-il un tel intérêt ? Cela reflète une peur de la mondialisation. Que des gens habitant à l’autre bout de la planète puissent acheter des exploitations agricoles dans un département français, cela peut paraître inquiétant. En plus, la méthode est opaque. S’il y a une grande idée derrière tout cela, personne ne la connaît. Avons-nous affaire à des investisseurs qui veulent sécuriser des actifs ? Ou sommes-nous face à un mouvement de bien plus grande ampleur ? »