A cogolin, sur la plage abandonnée au FN, copinages et crustacés…

Le Canard Enchaîné – 11/01/2017 – Anne-sophie Mercier et Christophe Nobili –
A Cogolin, le maire maréchal-lepeniste livre son bord de mer aux promoteurs immobiliers et ses bancs de sable aux copains.
Marine Le Pen avait raison. Le 4 janvier, adressant ses vœux à la presse, elle évoquait, avec des trémolos dans la voix, sa vision de la chose publique : « La politique avec un grand P ! » C’est une « belle chose, passionnante », martelait la cheftaine du Front. Il suffit d’aller voir avec quelle passion ces mairies conquises par le FN en 2014, et qui font la fierté du lepénisme triomphant, conduisent des opérations immobilières.
Exemple à Cogolin, où le dénommé Marc-Etienne Lansade officie comme premier magistrat. Cette riante bourgade du Var a l’immense avantage d’être située en bord de mer, plus précisément dans le golfe de Saint-Tropez, ce qui ouvre aux entrepreneurs entreprenants quelques réjouissantes perspectives. Lansade, un proche de la nièce Marion Maréchal-Le Pen affiche de grands ambitions pour sa cité. Et c’est l’immobilier qui fait battre son cœur.
L’école Balkany
A peine élu, ce bon maire a promptement embauché à ses côtés un certain Jean-Marc Smadja, cousin d’Isabelle Balkany, qui a fait ses classes à la mairie de Levallois-Perret. Autrement dit, une pointure, une référence. La preuve : M. Smadja a été promu « conseiller spécial en urbanisme« . Pour une commune de 12 500 habitants, c’est impressionnant. Côté spécial, l’intéressé a dirigé à Levallois une société d’économie mixte aujourd’hui dans le viseur de la justice. Pour ce qui est du conseil, il n’a pas tardé à montrer ses talents.
La ligne de conduite est simple : on brade ! Surtout que le maire craint fort de sauter, sa politique ayant déjà fait partir dix conseillers du Front national… La mairie vient donc de décider de vendre au promoteur Cogedim un terrain boisé de 13 hectares – une rareté -, dont 10 seront construits, pour, a l’arrivée, 60 000 m2 de logements. L’édile avait pourtant juré que ce joyau du littoral resterai dans le patrimoine communal. Pour les caisses de la ville, le prix de cession du terrain à la Cogedim n’est pas négligeable : 34 millions d’euros. Mais de l’avis de tous les experts en mètres carrés du cru, la municipalité aurait pu en tirer bien davantage. Un collectif d’indolents Cogolinois, regroupés au sein de l’association Place publique, a même osé avancer que le terrain valait le double. Le maire a ignoré ces excités. Lansade a fait adopter une modification simplifiée du plan local d’urbanisme (PLU) en conseil municipal, sous les applaudissements d’un public de fans FN.slide_4
Louée soit la mairie
Rien de nouveau sous le soleil pour d’autres habitants de la commune, qui s’étaient déjà étranglés, en janvier 2015, lors de la location d’un village vacances dans le même secteur. Le maire avait alors attribué un bail pour trois ans (et pour 600 000 euros de loyer) à la société Marina Paradise. Une boîte parfaitement inconnue, et pour cause : elle n’était même pas créée au moment de la signature et n’a fait son entrée au registre du commerce qu’un mois plus tard, bénéficiant, en prime, d’un joli cadeau : l’autorisation de sous-louer ses infrastructures touristiques et, ainsi, de dégager « une marge au détriment de la commune« , comme cela n’a pas échappé à la chambre régionale des comptes Paca.  Ce que Marina Paradise s’est empressée de faire, en sous-louant les lieux au spécialiste du mobil-home Homair Vacances pour un montant bien caché, secret des affaires oblige…
Sea, duplex and sun
Quelques mois après son arrivée, le maire a mis aux enchères la gestion et l’exploitation des 500 m2 de la plage des Marines (ça ne s’invente pas) de Cogolin. Trois candidats ont déposé un dossier. Jusque là, rien à dire. Sauf que l’un d’eux a vite été écarté par la municipalité et que les deux autres ne se sont pas battus comme des lions. D’un côté, une dénommée Marie-Laurence Guillemard, présentée par Lansade comme « gérante d’un restaurant à Paris », de l’autre, Farshad  Forouzandeh, redoutable adversaire, ci-devant patron de l’Epi Club, joyeux établissement de Ramatuelle, où le maire FN a ses habitudes nocturnes avec ses amis locaux et nationaux du parti.cogolin-plage-des-marines-3-photo-bertrand
L’édile avait juste oublié de mentionner que Mme Guillemard était aussi directrice générale dudit club, et bientôt un peu plus… En effet, elle a emporté le marché après un heureux désistement de son concurrent… qu’elle a épousé quelques mois plus tard, en juin 2015. Une union célébrée par le brave maire qui leur a cédé sa plage.
Pour clore cette belle histoire d’amour et d’affaires (la délégation est prévue pour neuf ans et à peine 12 000 euros par an), Lansade, Forouzandeh et leur copain Samdja s’affichent à l’occasion en phot dans les rubriques pipole, un verre de mojito à a main.  Santé, Cogolin ! 
La foire aux bonne affaires de Fréjus
Dans cette autre commune varoise, dirigée par le frontiste David Rachline, un pote de Marc-Etienne Lansade, c’est aussi la grande braderie. Directeur de campagne de Marine Le Pen pour la présidentielle, le maire ne s’embarrasse pas. Pour faire rentrer de l’oseille et montrer qu’il n’augmente pas les impôts, il vend à tout-va : terrains de foot, courts de tennis, bords de mer… En moins de trois ans, Rachline a cédé pour 29 millions d’euros de réserves foncières à des promoteurs privés. A IP Gest, un bétonneur fréjusien, il a, par exemple, vendu près de 10 000 m2 de terrain, qui vont accueillir 160 logements pour 6,4 millions. Et, comme à Cogolin, il fait des affaire avec la Cogedim.frejus-19_500x375
Ce promoteur là va bâtir 187 logements sur ce qui était une fierté de la ville : le stade Pourcin, installé au cœur de Fréjus depuis 1947, et dont les tribunes avaient été refaites il y a dix ans. Le maire l’a lâché pour 6,5 millions d’euros.  Approchez, approchez !

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