Israël – Les pauvres, les riches et les colons

Siné Mensuel – janvier 2017 – Michel Warschawski –
De tous les pays de l’OCDE*, Israël est celui où le fossé entre les riches et les pauvres est le plus important. Il est passé depuis longtemps le temps d’Israël en tant que symbole d’une société égalitaire, modèle d’État social. La contre-réforme néolibérale menée avec une brutalité sans précédent par Benyamin Netanyaou dans les années quatre-vingt a créé un paradis pour quelques centaines de milliardaires et une vraie misère pour 19,6 % de la population, considérés comme indigents, selon les critères de l’OCDE.
israel_indignesPoursuivons avec le chiffres publiés par la Sécurité sociale israélienne : 1,7 million de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, soit 21,7 % de la population, dont près de 30 % d’enfants. Deux parties sont particulièrement touchées : d’une part, la minorité palestinienne d’Israël, dont 53 % vivent sous le seuil de pauvreté, et, d’autre part, les Juifs orthodoxes, dont 48,75 % sont définis comme pauvres.
En un mot, Israël est un pays riche (AAA pour les agences de notation internationales) où un tiers des enfants vivent dans la pauvreté : les dépenses sociales sont descendues à 16,9 %du PNB alors que la moyenne dans les pays de l’OCDE est de 21,6.
Où vont donc les richesses accumulées ? Elles sont, bien entendu, accaparées par une grande bourgeoisie qui exporte capitaux et technologies dans le monde entier (en particulier dans le secteur électronique militaire). Là aussi, il faut reléguer au tiroir des vieux souvenirs l’exportation des oranges Jaffa et des avocats Carmel comme élément central du commerce international israélien : les fruits et légumes ont été depuis longtemps remplacés par des armes et l’électronique de précision. 
Mais une partie du budget échappe aux rapaces de l’industrie, du gros business et des banques pour financer la colonisation et les colons, qui, contrairement à ce que l’on prétend parfois, ne sont pas une entreprise économique (même si certains y font leur beurre) mais bel et bien un projet politique porté par une idéologie nationaliste, voire messianiste.
israelcoloniep888Au moment même où la Sécurité sociale publie son rapport sur la pauvreté, le gouvernement annonce que chacun des quelques dizaines de résidents de la colonie d’Amona va recevoir un million de shekels** pour avoir été obligé de déménager de quelques centaines de mètres de l’endroit où ils s’étaient installés sans demander l’autorisation à qui que ce soit et sans prendre en considération le fait qu’ils vivaient sur des terres privées de résidents palestiniens. Ces derniers avaient saisi la justice qui, après une dizaine d’années de guérilla judiciaire menée par les colons israéliens, exigeait le départ de ces colons dits « sauvages ». Déplacé de quelques centaines de mètres, chaque colon recevra un million de shekels, mais 70 millions vont être en plus déboursés pour préparer une nouvelle colonie sur d’autres terres palestiniennes, celles-ci expropriées cette fois selon les règles.
* L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), est une organisation internationale d’études économiques dont les pays membres — des pays développés pour la plupart — ont en commun un système de gouvernement démocratique et une économie de marché.
** Le shekel,  ou shekalim au pluriel, est la monnaie nationale de l’État d’Israël. Le shekel est divisé en 100 agoroth. Un euro vaut environ 4 shekalim.

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Hors des paradigmes anciens et obsolètes, libérer la parole à propos de la domination et de l’avidité dans les domaines de la politique, de la religion, de l’économie, de l’éducation et de la guérison, étant donné que tout cela est devenu commercial. Notre idée est que ces domaines manquent de générosité et de collaboration.
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