Étiquetage alimentaire : simplifier, c’est trop compliqué !

Le Canard Enchaîné – 08/03/2017 – Conflit de Canard –
« Une mesure d’étiquetage simpliste » dont les effets positifs escomptés sont incertains ». Il y a deux ans quasi jour pour jour, l’Association nationale des industries alimentaires (Ania) pilonnait, dans un communiqué, la très énervante idée de coller sur les produits alimentaires des pastilles de cinq couleurs différentes selon leur profil nutritionnel. Quel projet saugrenu, en effet, que de vouloir rendre l’étiquetage compréhensible pour le consommateur !
Un avis pleinement partagé par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses).  Celle-ci vient de rendre à la ministre de la Santé, qui doit trancher début avril sur l’étiquetage simplifié, un rapport au vitriol contre le logo Nutri-Score, le satané projet que pousse depuis 2013 le patron du Programme national nutrition santé – (PNNS), qui sert à sensibiliser les Français sur l’importance de bien se nourrir.
Curieusement, ledit rapport reprend point par point les arguments égrenés par l’Ania dans son communiqué de 2015. Exemple : là où l’association écrivait « les systèmes de notation nutritionnelles ignorent les déterminants fondamentaux d’une alimentation équilibrée », l’Anses le reformule plus doctement : « la démarche des systèmes d’information nutritionnelle (SIN) s’oppose à la complexité fondamentale des relations entre l’alimentation et la santé ».
De même, lorsque le lobby agroalimentaire dénonce les « effets contre-productifs » de l’étiquetage nutritionnel, la critique est ainsi reprise, sous la plume de l’agence : « il existe des risques d’effets contre-productifs. » En clair, les consommateurs sont tellement idiots que certains n’achèteront plus que des plats cuisinés au brocolis ou de la purée de carottes arborant un feu vert nutritionnel. « Aucune évaluation n’a rapporté l’impact des systèmes d’information nutritionnelle sur la consommation alimentaire, dixit l’Anses, presque un copier-coller de la bafouille de l’Ania : « Ils n’ont fait l’objet d’aucune étude d’impact approfondi à ce jour. »
Pourquoi donc cette symbiose ? Cela n’a bien sûr à voir, mais, en épluchant les déclarations publiques d’intérêt des 19 auteurs du rapport, « Le Canard » a découvert une véritable caravane publicitaire. Non seulement l’expert qui a piloté le groupe de travail œuvre pour Danone, Research et Nestlé, mais huit de ses collègues sont liés, pêle-mêle, avec Lactalis, les chocolats Ferrero, Sofiprotéol, la collective des producteurs d’huiles, Armor Protéines, l’un des leaders mondiaux du cracking laitier, ou encore Gatorade, la filiale de Pepsico spécialisée dans les boissons et aliments énergisants.
Une petite pastille pour digérer ?
Lire : Etiquetage nutritionnel simplifié : les détails de l’expérimentation

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