Partir, et voyager en terre inconnue…

Plantes et Santé – juillet/août 2017 Agnès Rogelet/Jean-michel Scherpereel –

Que l’on soit casanier ou rompu aux voyages lointains, les vacances procurent un flot d’émotions. Boucler ses valises en vue de passer quelques jours loin de son « home, sweet home » suppose en effet de briser la routine. Au-delà d’un mode de vie et d’un rythme inhabituel, c’est aussi une attitude différente que l’on adopte. Avec l’espoir de revenir « transformé »… au moins un peu.
A New-York ou Katmandou, sur les chemins de Saint-Jacques de Compostelle ou au camping des Flots bleus… les vacances hors de chez soi invitent toujours à lâcher-prise. il s’agit de vivre une expérience -extra-ordinaire pendant un temps donné. Revenir chaque été au même endroit ne change rien à l’affaire: le décor et les horaires diffèrent du quotidien, et les comportements aussi. Seul ou en tribu (famille, amis,…), chacun projette ses fantasmes sur la destination choisie. Le voyage se prépare avec un mélange de désir et d’anxiété. arrivé à bon port, cet imaginaire se confronte à la réalité.Se dévoile alors un nouveau visage de soi-même et des autres à travers des compétences d’organisation, un tempérament un peu lâche ou courageux, irrespectueux ou altruiste… Des facettes inédites qui peuvent parfois faire émerger une sensation de vulnérabilité.
Un déracinement salvateur
S’exposer à cette fragilité n’est pas du goût du casanier ! Le dépaysement ? Non, merci répondent ces grands philosophes du « à quoi bon ? » D’autres n’aspirent au contraire qu’à parcourir le monde. L’aventure les attirent. Mais une soif obsessionnelle  peut aussi s’apparenter à une fuite.
N’oublions pas que si l’on part en voyage, on en revient un jour. Délesté, si possible d’une part d’égocentrisme.
Désirs d’ailleurs
Pour l’anthropologue du voyage Jean-Didier Urbain (1), nos aspirations à voyager peuvent s’articuler schématiquement autour de quatre points cardinaux : le désert, la société, soi et autrui.
– « L’appel du désert » renvoie à un désir de solitude. Il s’illustre dans le trekking, les week-ends « nature », la maison de campagne, le séjour en thalasso ou autres retraites spirituelles ou de bien-être. 
– la « tentation sociétale » correspond au contraire à une soif de « grégarité étendue ». On la retrouve dans les villages-vacances, les stations balnéaires ou à travers le tourisme urbain ou de festival. Ici, la quête d' »être ensemble, solidaire et hédoniste » est aussi celle, pas toujours consciente, d’une « recomposition sociale »
– « La rêverie cénobite », à l’image du moine vivant en communauté, combine le besoin d’isolement (plutôt que de solitude) et de groupe (et no pas de foule). C’est une recherche de compagnie. Club Med, camping, croisière, voyage en petit groupe… Il renforce un sentiment d’appartenance. – « Le songe altruiste » (voyages sur mesure, initiatiques, humanitaires, etc.) dénote un besoin d’altérité. Et si cette recherche de relations interculturelles reste souvent hypothétique, elle parvient à combler l’envie de dépaysement.
Et vous, pourquoi avez vous envie de partir en terre inconnue ?
(1) Jean-Didier Urbain, L’envie du monde, Paris, Bréal, 2011, 267 p., ISBN : 9782749530444 – 20 €  .
« Notre façon de voyager dit toujours ce que nous sommes, au moins à un moment de notre existence ». Comme dit Paul Morand, « on voyage pour exister ». Le tourisme ne peut se réduire à l’attrait estival pour la plage. Le voyageur est trouble dans ses aspirations et changeant dans ses attentes. Il est complexe de nature car sa raison de voyager n’a rien de nécessaire. Jean-Didier Urbain, anthropologue, analyse dans le présent ouvrage quelques grandes tendances actuelles de ce phénomène, et va à l’encontre de « nombre de voyagistes qui sont des caricaturistes qui s’ignorent ». Le développement d’une mobilité brève de l’ordre de l’escapade a initié un « tourisme de la fugue », un plaisir de l’instant en forme de disparition soudaine. « Le nomadisme résidentiel », autre grande tendance, qui passe par la possession d’une résidence secondaire permet une mobilité programmée et familière, afin de chercher à sauver un modèle perdu de stabilité. La fin de la dépendance aux instances organisatrices du voyage, ce rêve d’autonomie, est le rêve le plus partagé du monde. »

A propos werdna01

Hors des paradigmes anciens et obsolètes, libérer la parole à propos de la domination et de l’avidité dans les domaines de la politique, de la religion, de l’économie, de l’éducation et de la guérison, étant donné que tout cela est devenu commercial. Notre idée est que ces domaines manquent de générosité et de collaboration.
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