Une vraie cochonnerie

Le Canard Enchaîné – 13/09/2017 – Conflit de Canard –
Ce jour-là, le ciel est tombé sur la tête des fabricants de la charcuterie industrielle. le 25 octobre 2015, l’OMS décrétait, au vu des travaux du Centre international de recherche sur le cancer, la charcutaille « cancérigène probable pour l’homme ». Une première pour un aliment. Principale raison : l’usage immodéré des sels nitrités.
Cinq ans avant, des chercheurs de l’Institut national de recherche pour l’agriculture avaient eu l’idée de mettre du jambon farci de cet additif dans la pitance de 344 rats. Résultat : les rongeurs qui avaient boulotté la plus grandequantité de jambonneaux nitrités affichaient le plus de microtumeurs du colon. Pour continuer à saupoudrer tranquillou de nitrite leurs jambons, lardons, knacks, chorizo, saucisses et charcuteries utilisées dans une flopée de plats surgelés, les industriels ont tout de suite fait valoir que cet additif protégeait contre le botulisme, une maladie, neurotoxique qui vous paralyse en moins de deux. Bigre !   
Sauf que tout cela relevait de l’enfumage. Comme le raconte par le menu un livre d’enquête qui porte bien son nom, »Cochonneries ». C’est pile-poil au moment où les sels nitrités ont été soupçonnés de provoquer le cancer du colon que le lobby de la charcuterie industrielle a sorti d ela marmite l’argument du botulisme. Pure baliverne, puisque les 150 producteurs membres du Consortium du jambon de Parme, qui ont décidé, en 1993, de revenir à la recette tradi, sans sels nitrités, n’ont jamais eu à déplorer, en vingt-quatre ans, un seul cas de botulisme parmi les consommateurs.  Mais pourquoi diantre s’accrocher ainsi à cet additif incriminé ?
D’abord parce que les sels nitrités allongent la durée de vie des charcuteries prétranchées, ensuite parce  qu’ils donnent à la charcutaille un joli teint rose vif qui persiste même sous la lumière des présentoirs, enfin parce qu’ils contractent le temps de fabrication des saucisses.  Nos deux auteurs, l’un journaliste, l’autre chef cuisinier, qui ont décortiqué la face cachée du jambon, mettent sur le gril l’Autorité européenne de sécurité des aliments. En juin, l’Efsa s’est en effet fendue d’un rapport pour expliquer, contre toute évidence, que l’utilisation desdits additifs ne présentait pas de risques pour la santé, tout en recommandant – comprenne qui pourra – de « conduire de nouvelles grandes enquêtes prospectives ». Un rapport qui ne manque pas de sel (nitrités) !
« Cochonneries », où comment la charcuterie est devenue un poison –
Un vent de panique souffle sur la filière cochon depuis que l’OMS l’a confirmé fin 2015 : les charcuteries sont cancérogènes, directement responsables du cancer de l’intestin. Aussi appelé « cancer colorectal », c’est le plus fréquent chez les non-fumeurs. Principal coupable : la charcuterie traitée au nitrate de potassium et au nitrite de sodium. Les industriels jurent que ces additifs sont indispensables pour protéger le public contre certaines bactéries. C’est un mensonge. En réalité, ils servent à accélérer la fabrication, à donner à la chair une appétissante couleur rosée, à baisser les coûts de production et à maximiser les profits. Fruit de cinq années d’enquête dans les archives administratives et médicales, ce livre dévoile l’histoire secrète des « charcuteries modernes » optimisées par la chimie. Popularisés par quelques entrepreneurs de Chicago, les knacks et les jambons nitrés ont conquis toute la planète en évinçant les charcuteries traditionnelles, plus longues à fabriquer. Face à ce scandale sanitaire, les charcutiers français, dépositaires d’un patrimoine gastronomique authentique, sauront-ils relever le défi d’une charcuterie honnête, sans cosmétiques et surtout sans victimes ?
De Guillaume COUDRAY / Date de parution : 14/09/2017 – Editeur : La Découverte / 272 p. / 18 €

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