Johnny Hallyday – Afin de mieux le comprendre … sa faille intime.

Léon Smet, le père vagabond de Johnny Hallyday
Le JDD 10/12/2017
Son abandon à l’âge de 6 mois par un géniteur fantasque est la faille intime de Johnny Hallyday

Le père de Johnny Hallyday, Léon Smet, en 1983. (Sipa)
En ce jour de mai 1965, le sergent Smet reçoit une visite inopinée. Un homme l’attend au poste de garde de la caserne d’Offenburg, en Allemagne. C’est Léon Smet, ce père vagabond qui avait abandonné son fiston à l’âge de 6 mois, le laissant seul à même le sol après avoir vendu tout le mobilier, y compris le berceau. Depuis, Jean-Philippe et Léon ne s’étaient pas revus. Le paternel n’avait jamais cherché à renouer avec son fils, sinon pour obtenir par voie de justice une pension alimentaire de 400 francs.
Arrivé au poste de garde, le bidasse Johnny Hallyday se retrouve donc face à un homme en pardessus et borsalino qui le prend dans ses bras, l’enlace tendrement et lui offre une peluche devant… une nuée de photographes. Pour immortaliser l’événement, Léon a en effet convié la presse. Contre 5.000 francs. Quelques jours plus tard, France Dimanche écrit en gros titres : « Johnny rouvre les bras à son père ». Le rocker ne mâchera pas ses mots suite à cette parodie de retrouvailles. « ll ne s’intéresse à moi que depuis ma réussite. Je n’aurai jamais de sympathie pour cet homme-là. Mais c’est quand même mon père… C’est un faible, un instable, mais je ne le juge pas. Je dis simplement qu’il n’a pas de droit sur moi puisqu’il n’a pas assumé ses devoirs quand j’avais besoin de lui » (Télé Magazine, 19 novembre 1965).
Se trouver des figures paternelles de substitution
C’est sa faille intime. L’une des clés, sinon la clé, pour appréhender la complexité du personnage. La force et la fragilité dans un seul homme, sa phobie de l’abandon, son penchant pour les excès et sa peur de la déchéance, la crainte de reproduire les mêmes erreurs que son géniteur et de se comporter en père indigne… Sans oublier le besoin de se trouver des pères de substitution fantasmés (Georges Brassens) ou réels (Charles Aznavour, son parrain en chanson, et Lee Ketcham, son « oncle d’Amérique »).
« Pendant des années, j’ai toujours désiré une vie de famille et je ne suis jamais arrivé à la construire »
Avec un mélange de mauvaise foi, de cynisme et sans doute de lucidité, Léon Smet, orphelin de père depuis son premier anniversaire, se donnera le beau rôle en arguant que s’il avait été un père aimant et présent, Jean-Philippe Smet ne serait sans doute jamais devenu Johnny. Celui-ci rétorquera : « Je pense aussi au désastre intérieur de ma vie. Pendant des années, j’ai toujours désiré une vie de famille et je ne suis jamais arrivé à la construire. »
Il tente de le sortir de sa vie de bohème misérable
A plusieurs reprises, le chanteur tend pourtant la main à ce père absent, noceur impénitent, alcoolique et artiste (maudit) dans l’âme. Il tente de le sortir de sa vie de bohème misérable en le faisant venir à Paris. « Je me suis retrouvé face à un clodo. » Il lui achète des costards Cerruti, Léon retourne illico chez le couturier pour les revendre au quart de leur prix. Il l’installe dans un appartement, Léon l’incendie et se retrouve à l’Armée du salut. Johnny jette finalement l’éponge, sans renoncer à payer les ardoises laissées par Léon.
Il ne le reverra plus, sinon au cimetière, le 20 novembre 1989. « Ce jour-là, j’étais le seul à assister à ses funérailles, pas un ami, pas une femme : c’est sans doute ça, la solitude absolue« , a raconté Johnny. En réalité, des journalistes présents ont rapporté que les amis de Léon étaient venus jusqu’à l’entrée du cimetière où ils furent empêchés d’entrer, sans doute pour laisser la star se recueillir en toute intimité. Auprès d’un géniteur dont il aura en vain cherché l’amour et la reconnaissance. Comme en témoigne cette confidence : « Un jour, mon parolier Michel Mallory m’avait dit qu’il avait demandé à mon père s’il était heureux et fier du succès de son fils. Il avait répondu : ‘J’en ai rien à foutre.’ J’en ai été beaucoup peiné. »
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Par Eric Mandel Suivre @leJDD

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