Le Temps
Décidément, les humains semblent préférer la fiction à la réalité. Sur Internet, les fausses nouvelles courent plus vite et vont plus loin que la vérité. Et les rumeurs séduisent, au détriment des informations, parce qu’elles semblent plus originales que le réel, parce qu’elles portent souvent une charge émotionnelle plus forte.
Une équipe du Massachusetts Institute of Technology (MIT) a étudié de près la propagation des nouvelles sur Twitter et la propension des internautes à les diffuser. Son corpus, 126 000 histoires relayées plus de 4,5 millions de fois par 3 millions de personnes. Les résultats, qui paraissent aujourd’hui dans la revue Science, montrent qu’une histoire vraie touche rarement plus de 1000 personnes, tandis que le 1% des informations fausses les plus virales atteint facilement entre 1000 et 100 000 individus.
– Eléonore Sulser, rédactrice en chef adjointe
Réseaux sociaux – Sur Twitter, le mensonge se diffuse plus vite et plus loin que la vérité
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Les «fake news» rencontrent un écho bien plus large sur Internet que les vraies informations. On le pressentait, mais une vaste étude scientifique vient de le démontrer. Elle livre des pistes d’intervention
Fake news, intox, rumeurs: les fausses informations, largement relayées sur les réseaux sociaux, sont une arme redoutable de manipulation de l’opinion publique. Elles auraient favorisé l’élection de Donald Trump et le Brexit, dit-on – mais dans quelle mesure cette rumeur est-elle abusive ou fondée? En France, une loi – très polémique – est en tout cas en préparation pour lutter contre ce phénomène.
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«Les réseaux sociaux ont démultiplié la diffusion de l’information, mais on sait peu de choses sur la façon dont ils favorisent la dissémination des fausses informations», écrivent Soroush Vosoughi et ses collègues du Massachusetts Institute of Technology (MIT), à Cambridge (Etats-Unis). Leur analyse parue dans la revue Science du 9 mars le démontre, chiffres à l’appui: sur Twitter, les fausses informations se propagent plus vite et plus loin, touchant davantage de gens que les vraies.
L’équipe du MIT a disséqué la diffusion de fausses ou de vraies informations sur Twitter entre 2006 et 2017. Au total, elle a épluché 126 000 histoires relayées plus de 4,5 millions de fois par 3 millions de gens. Précision importante: ces informations ont été classées comme «fausses» ou «vraies» par six organisations indépendantes de fact checking; leurs classifications ont été consensuelles dans 95% à 98% des cas.
Retweet en cascade
Résultats: globalement, les fausses informations avaient 70% de «chances» en plus d’être retweetées en «cascade» que les vraies. Alors qu’une histoire vraie était rarement diffusée à plus de 1000 personnes, le 1% de fausses informations les plus virales se propageait facilement à des groupes compris entre 1000 et 100 000 individus. La vérité mettait six fois plus de temps qu’une fake news à atteindre 1500 personnes.
Alors que la vérité n’était jamais retweetée au-delà de 10 fois, les fausses informations pouvaient être retweetées 19 fois; et ce, 10 fois plus vite qu’une vérité relayée seulement 10 fois.
La catégorie de rumeurs la plus largement colportée était les nouvelles politiques. Venaient ensuite les légendes urbaines, puis les affaires économiques, le terrorisme, les sciences et technologies, les loisirs et enfin les désastres naturels.
Une des stratégies de lutte contre la diffusion à grande échelle des «fake news» consiste à identifier et neutraliser les robots sur les réseaux sociaux. Cette étude suggère que ce ne serait pas si efficace. Ewa Kijak, de l’Université de Rennes 1