La pistache, avec modération…

Le Canard Enchaîné – 25/04/2018 – Conflit de Canard –

A première vue, quoi de plus anodin qu’une pistache ? Sauf que cet Anacardiaceae, qui égaie l’apéro en terrasse dès les premiers jours de l’été peut se révéler redoutable pour le foie.

L' »amande de Perse », comme on l’appelle aussi, est trop souvent farcie d’aflatoxines. Une cochonnerie cancérigène pour le foie, secrétée par des champignons microscopiques qui prennent leurs aises dans des silos de stockage mal aérés. L’aflatoxine est suspectée de favoriser les lésions hépatiques, qui peuvent évoluer en cirrhose puis dégénérer en tumeurs. Avant de prendre l’apéro, on va y réfléchir à deux foi(e)s…

En plus de dézinguer notre santé, cette mycotoxine est en train d’empoisonner les relations entre l’Europe et les États-Unis. Ce mois-ci, Bruxelles a rendu public les résultats d’un audit effectué en 2017 qui étrille, entre les lignes, le lobby américain de la pistache, accusé de nous fourguer  de la marchandise bourrée d’aflatoxines. Ses auteurs déplorent la négligence des autorités sanitaires américaines. Celles-ci se ficheraient si les cargaisons qu’ils nous expédient dépassent la limite maximum autorisée par l’Union européenne de toxines cancérogènes dans les pistaches. Il faut dire que, outre-Atlantique, on tolère dans les Anacardiaceae des quantités cinq fois plus élevées d’aflatoxine. Quand on aime…

Pistachier

Cela donne d’autant plus les foies que l’Europe, premier importateur mondial de pistaches (peu ou prou 80 000 tonnes par an) s’approvisionne à 80 % chez l’Oncle Sam. Les Américains qui trouvent les contrôles européens trop tatillons – même si seulement 10 % des cargaisons sont vérifiées -, font pression afin que Bruxelles accepte un peu plus d’aflatoxines dans les aliments en passant de 4 à 10 microgrammes par kilo.

Deux fois moins que ce qu’ils autorisent chez eux, mais pile-poli la valeur qu’ils ont réussi à faire inscrire dans le Codex Alimentarius, la table des lois du commerce international des denrées alimentaires. Et tant pis si, avec une telles préconisation, n fait grimper le risque cancer du foie.

Voilà une raison de plus de détester Donald Trump !