Numérus clausus : une ordonnance pour les médecins

Charlie Hebdo – 26/09/2018 – Jacques Littauer –
Depuis 1971, en France, le nombre de médecins,  pharmaciens, chirurgiens-dentistes, sage-femmes, infirmières, etc., est limité par décret, a fin, officiellement, de préserver « la réputation et le prestige » de ces professions. Parce que s’il y avait tout plein de toubibs, on risquerait de recruter des racailles, comprenez… Et il se trouve, mais c’est sans doute un hasard – que limiter le nombre de diplômés est aussi un moyen très efficace de réduire sévèrement le nombre de concurrents quand on ouvre son cabinet, ce qui garantit de confortables revenus, ainsi que les menus avantages – 4×4, villa, prestige en société – qui vont avec. Ce malthusianisme a longtemps fait les délices de l’administration, qui y a vu un moyen simple de contenir la progression des dépenses de santé : moins de médecins, c’est moins d’ordonnances.
Le nombre de nouveaux diplômés en médecine a ainsi été massacré, puisqu’il est passé de plus de 80 000 par an durant les années 70 à moins de 4 000 en 2 000, alors que la population ne cessait d’augmenter. Ainsi, le nombre de généralistes n’a pas augmenté d’un iota en vingt ans en France, alors que la population a crû de 7 millions dans le même temps, et qu’elle se compose de plus en plus de vieux, qui aiment bien avoir des rhumatismes, des scléroses en plaques ou un Alzheimer.
La situation a commencé à devenir intenable pour les médecins, qui ont eux-mêmes poussé à l’augmentation du numérus clausus (8 200 en 2017). Mais le mal est fait : les toubibs vieillissent, les cabinets ferment, les déserts médicaux se multiplient, et cette situation est aggravée par ces feignasses de femmes médecins, qui elles, s’occupent non seulement de leurs patients, mais aussi de leurs enfants. Résultat : quand on  se compare aux autres pays, c’est un peu la honte. Il n’y a aujourd’hui que 3,3 médecins pour 1 000 habitants en France, contre 3,9 en Espagne, 4,2 en Suède et 5,1 en Autriche, des écarts considérables.
Pourquoi a-t-on recruté si peu de médecins ces dernières années ? Tout simplement parce que les praticiens, une foisinstallées, peuvent prescrire autant d’ordonnances qu’ils le veulent, sur le dos de notre brave Sécu et, pour ceux qui sont en honoraires « libres », rançonner paisiblement leurs patients.
La solution est pourtant connue :il faut maîtriser les dépenses de santé de bout en bout, en affectant d’autorité les médecins dans les déserts après leurs études, en limitant les prescriptions, voire en les salariant davantage. Vous dites, docteur ? C’est liberticide ? Mais si ce n’est que la contrepartie de la Sécurité Sociale qui assure vos revenus (et de vos études gratuites…). Si vous voulez être libérés, soyez boulangers, garagistes, épiciers… A vous la liberté, enfin, la vraie !

A propos werdna01

Hors des paradigmes anciens et obsolètes, libérer la parole à propos de la domination et de l’avidité dans les domaines de la politique, de la religion, de l’économie, de l’éducation et de la guérison, étant donné que tout cela est devenu commercial. Notre idée est que ces domaines manquent de générosité et de collaboration.
Cet article, publié dans Santé, est tagué . Ajoutez ce permalien à vos favoris.