Déficit budgétaire : Macron peut plaire à tout le monde

Charlie Hebdo – 19/12/2018 – Jacques Littauer – 
Emmanuel Macron a donc sorti le chéquier. La baisse de la CSG pour les retraités percevant une pension entre 1200 et 2000 euros ? 1,5 milliards d’euros. Le fait de soustraire les heures supplémentaires à tout prélèvement ? 2 milliards de cotisations en moins pour la Sécu., et 1,5 milliards d’impôt sur le revenu perdu par l’État. La hausse de la prime d’activité pour les personnes percevant un Smic à à temps plein ? Euh ben ! que 600 millions, ce qui montre la misère de la chose.
Au total, l’Abbé Darmanin (ministre du Budget) estime que la tentative macronienne de préservation des vitrines des magasins de luxe des Champs-Élysées coûtera 10 milliards au budget de l’État (une fois incluse l’annulation de la hausse de la taxe sur les carburants, pour 4 milliards). Or, comme notre déficit budgétaire approchait déjà dangereusement de la limite des 3 % du PIB, au-delà de laquelle, les experts de Bruxelles sont formels, aucun forme de vie sur terre n’est possible, voilà que, une fois encore, nous allons exploser les règles européennes.
Pire encore : notre déficit, qui pourrait atteindre au minimum 3,5 % du PIB, risque d’être aussi élevé que celui des tristes clowns italiens. Dans ces conditions, de qui allons-nous nous moquer ? Mais le bon côté de la chose, c’est que de la contrainte naissent de nouvelles idées. On voit ainsi des députés de la majorité appeler à une surtaxe sur les très grandes entreprises, qui pourrait rapporter 5 milliard d’euros. Le citoyen a en effet entendu un député LREM proclamer que « l’ensemble de la nation doit se mobiliser, et notamment les grands groupes ». Au train où vont les choses, entre la date d’écriture de cette chronique (13 décembre) et le moment de votre lecture, on aura peut-être vu la Société générale, Renault, LVMH et consorts passer à la caisse !
Rien de rien, l’État ne demande rien
Mais il y aurait plus simple : renoncer à la folie consistant, pour le budget 2019, à ajouter au crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE), qui nous fait les poches de 20 milliards chaque année, une nouvelle baisse des charges. de 20 milliards également, prévue de longue date par Manu. En effet, ces politiques sont ahurissante au sens où elles consistent à donner de l’argent, beaucoup d’argent, aux entreprises, sans aucune demande de contrepartie. 
De l’emploi ? De la formation ? Des meilleures conditions de travail ? L’égalité entre hommes et femmes ? Rien de rien. L’État ne demande rien. Aux Chômeurs, il demande de chercher  « activement » un travail; il soumet les aides sociales à de « conditions de revenus »; aux retraités, il demande d’avoir cotisé… Mais les entreprises, même les plus riches, on droit à des milliards comme ça, gratuitement, si l’on ose dire.
C’est sans aucun doute le plus grand scandale de nos finances publiques, mais il ne suscite pas l’opprobre.  Et pourtant : même l’institution très macronienne France Stratégie reconnaît que le CICR n’a créé que 100 000 emplois, pour 40 milliards de baisse des charges sociales. Soit le montant vertigineux de 400 000 euros par emploi ! A l’inverse, les 35 heures n’ont coûté que…  7 500 euros par emploi (3 milliards de dépensés, 400 000 emplois créés).
Le constat est clair :  si la République en marche est, comme elle le proclame, pragmatique, si elle croit aux « évaluations », alors elle renonce aux 20 milliards de baisses de charges. Et ainsi, le déficit français demeurera en dessous des 3 % du PIB, et tous les gilets jaunes et les vestons anthracites de la Commission européenne pourront se donner la main.

A propos werdna01

Hors des paradigmes anciens et obsolètes, libérer la parole à propos de la domination et de l’avidité dans les domaines de la politique, de la religion, de l’économie, de l’éducation et de la guérison, étant donné que tout cela est devenu commercial. Notre idée est que ces domaines manquent de générosité et de collaboration.
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